15) Lambda

Cette journée avait très bien commencé et semblait vouloir se dérouler tout aussi bien, dans tout ce que cela impliquait de normalité. Aller en cours d’histoire de la musique sans me faire agresser par des manieurs d’Emprise avait été un début formidable. Les cours des diverses matières composant la musicologie seraient donc tous assurés par une dame d’un certain âge, mais qui ne semblait avoir rien perdu de sa sévérité et de sa discipline : madame Valérie Riedel. Son petit accent allemand et son port altier, ajouté à ses vêtements cintrés et bien repassés, avec ce petit camé au col de sa chemise, lui donnaient une allure incroyable. Nous avions abordé avec elle l’histoire musicologique de la Grèce antique. Elle avait précisé qu’en fin de programme, nous en serions arrivés à étudier la musique moderne. En bref, une personne tout à fait charmante. Je prenais méthodiquement le plus de notes possible tandis que se déroulait son cours magistral. Je ne m’y ennuyais pas une seule seconde, notre professeure offrant même un jour nouveau sur les rares choses que je savais déjà, ou que je croyais savoir. Que du plaisir.

Cependant, je devais bien admettre que rester trois heures d’affilée, assise sur un siège inconfortable, le tout sans prendre de pause était particulièrement éprouvant. Et je devrais certainement commencer à m’y habituer, car ce serait ainsi tous les mardis de la semaine.

Mais plus l’effort était intense, plus le plaisir de l’avoir produit était grand. Et c’était sans compter sur la joie qui m’animait à l’idée de me rendre à la cafeteria, sous le pâle soleil de midi.

J’avançais donc d’un pas léger et enthousiaste tandis que je quittais le bâtiment dédié aux cours théoriques de musique.

Je profitais pleinement du décor agréable qu’offrait la végétation autour de moi, fermant les yeux quelques secondes pour mieux entendre le son du cours d’eau qui serpentait à travers le campus. C’était vraiment apaisant, d’entendre le bruissement de la végétation sous le vent, accompagné du clapotis du ruisseau.

C’est alors qu’au détour d’un bâtiment administratif, non loin de la cafeteria, je commençais à ralentir en plissant légèrement les yeux. Je croyais apercevoir une sorte de petit animal qui flânait sur le bord du chemin pavé.

Par curiosité, je m’approchais alors un peu plus et ne pus réprimer un sourire en constatant qu’il s’agissait d’un petit caneton, peu farouche, qui me rendit mon regard lorsqu’il s’aperçut de ma présence. Je m’accroupissais alors délicatement, pour ne pas lui faire peur, continuant de sourire un peu bêtement.

— Hé bonjour toi, babillais-je du haut de ma bonne humeur. Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu es perdu ? demandais-je en lui tendant le plat de ma main.

Il y eut alors un petit coup de vent et, comme si cela l’incommodait, le petit animal se rapprocha de moi pour que je l’en abrite. Il était trop mignon, je ne pouvais pas l’abandonner ici. Le caneton faisait partie de cette catégorie d’animaux, envers lesquels on ne pouvait pas s’empêcher d’exprimer de l’affection, pour peu que l’on n’ait pas un cœur de pierre.

— Come here boy, come here, invitais-je avec bonne humeur en approchant ma main, sans résultat. Oh, je vois, tu es un canard français ? Viens là mon petit, viens, répétais-je.

Voyant que la petite boule de plume ne semblait pas comprendre mon invitation, je m’approchais encore un peu plus afin de le saisir délicatement. Et c’est sans protester qu’il se laissa faire, se blottissant au creux de mes mains comme s’il y avait trouvé un refuge acceptable. Et malgré toute la retenue dont je faisais habituellement preuve, je ne pus m’empêcher de sourire devant cette scène parfaitement adorable. Il était mignon à croquer, on aurait eu envie de le ramener chez soi pour le ranger précieusement parmi ses peluches. Cependant, je me mis plutôt en tête de me rapprocher du cours d’eau non loin, afin de l’y ramener pour que le caneton y retrouve éventuellement sa famille.

Et tandis que je tournais au coin du bâtiment en suivant le son de l’eau, j’entendis une voix vaguement familière qui m’interpella :

— Hey, Lili, tu sors de cours ?

— Oui, répondis-je en même temps que je me retournais.

Négligemment assis par terre contre le mur, entouré de plein d’autres canetons, je reconnus Evans Doroski, la personne qui s’asseyait derrière moi pendant les cours du professeur Krasny. Je levais alors un sourcil, plutôt surprise.

— Oh, Evans, bonjour. Mais dis-moi, tu t’es lancé dans l’élevage ? demandais-je avec un mince sourire.

— Heuu, non… fit-il, un brin embarrassé. Ça a à voir avec mon Emprise mais, heu, c’est pas une agression contre toi hein ! dit-il, visiblement mal à l’aise.

J’arquais soudainement les sourcils avec un air désolé.

— Oh, si c’est par rapport à ce que j’ai dit en cours, je suis désolée, c’était simplement sous le coup de la colère. J’avais passé une mauvaise journée avec toutes les personnes qui avait essayé de me bizuter à coup d’Emprises, expliquais-je avant de pencher la tête sur mon petit passager. Et tu agis sur les animaux ? demandais-je.

— Baaah… réagit le garçon, à peine moins gêné. Non, en fait, je m’entraîne à plier des origamis… avoua-t-il.

Je ne fus pas longtemps intriguée par cette réponse lorsque mon regard se posa de nouveau sur le caneton que je tenais. Il n’était plus là. À sa place se tenait une sorte de cocotte en papier sophistiquée. Je me sentais soudainement un peu stupide. Je me rendais compte que mes babillages avaient été à l’attention d’un simple morceau de papier.

— Je… je vois, soupirais-je. Et ça affecte tout le monde aux alentours ?

— Ouais, c’est ça, du coup c’était pas contre toi en particulier, quoi… justifia-t-il en rassemblant ses origamis que le vent menaçait d’emporter au loin.

— Ouf… soupirais-je de soulagement. Donc, même si quelqu’un m’avait aperçu, il ne m’aurait pas vue en train de parler à un canard en papier ?

— Ah, si c’est ça qui t’inquiète, non, tout le monde voit l’animal auquel je pense, expliqua-t-il avec un sourire tandis qu’il sortait une feuille de sa poche.

— Et qu’est-ce que tu comptes faire avec une feuille aussi petite ?

— Heu… hésita-t-il en sortant une petite boîte en fer de son autre poche. En fait, je vais juste me rouler une clope, histoire de faire une pause.

Une seconde de silence s’installa, et je manquais de rougir. Cependant, je changeai rapidement le sujet de la conversation après avoir vérifié que nous étions bien seuls :

— Et, tu pourrais réactiver ton Emprise ?

— Ah, heu, ouais, répondit-il tandis que l’origami entre mes mains redevenait un adorable caneton.

Et comme je savais qu’il ne s’agissait pas d’un vrai, je ne me gênais pas pour le caresser et le grattouiller autant qu’il me plaisait. C’était adorable, la manière dont il réagissait toujours positivement, ou plutôt la manière d’on j’imaginais qu’il réagissait. Et même en sachant qu’il ne s’agissait que d’une illusion, elle restait parfaite.

— Enfin bref… soufflais-je finalement en déposant le caneton près de son créateur. Je suis ravie de t’avoir croisé, mais je dois absolument aller à la cafeteria, je meurs de faim !

— Ahh, ouais c’est cool, réagit Evans assez mollement.

— Tu ne viens pas ?

— Ah, non désolé, j’dois finir des restes d’hier soir, j’vais pas tarder à y aller, répondit-il en allumant sa cigarette fraîchement roulée.

C’est alors qu’une odeur bien particulière me parvint, quelque part entre le gazon fraîchement tondu et les pieds restés trop longtemps dans les mêmes chaussettes. Et il serait faux de dire qu’une enfance aisée permettait de ne pas reconnaître cette odeur en particulier. Certains seraient surpris de ce qui se trame derrière les boxes des chevaux, dans les clubs d’équitation, ou même dans les petits jardins des conservatoires. Je grimaçais.

— Avec une Emprise pareille, tu ne devrais pas avoir besoin de ça… fis-je remarquer sans animosité.

— Héhé, ouais mais, elle marche pas sur moi-même… fit-il en exhalant une épaisse fumée rapidement dissipée par la brise.

— Oh, c’est vraiment dommage, mais bon… fis-je avec un vague geste de la main. Bref, si un jour tu veux venir à ma table à la cafeteria, je t’en prie, invitais-je avec un sourire.

— Okay, c’est cool Lili, me répondit-il en commençant à ranger ses origamis de sa main libre.

Soudainement, j’écarquillais brièvement les yeux en sentant mon téléphone vibrer trois fois d’affilée dans mon sac. C’était assez inhabituel.

— Bon, à la prochaine alors, saluais-je.

Evans leva simplement la main en hochant la tête, et je repris mon chemin tandis que je tirais mon portable de mon sac, avant de constater que j’avais reçu trois notifications quasiment en même temps. Il s’agissait de trois textos de numéros inconnus, chacun d’entre eux ne contenant qu’un seul mot. Le premier disait « Hell » le deuxième disait « Morituri » et le troisième « Tyran ».

Je devinais immédiatement qu’il s’agissait de mes trois camarades du bâtiment G et enregistrais leurs numéros en utilisant leurs surnoms. D’ailleurs, je me doutais que Tyran devait être Timothée, mais je notais dans un coin de ma tête qu’il faudrait que je lui demande l’origine de son surnom, à l’occasion. Je me permettais même de leur répondre avec une pointe d’humour, envoyant à mes trois nouveaux contacts le même message :

« Maintenant que vous connaissez ce numéro, je vais être obligée de vous faire assassiner. »

Je souriais d’un air amusé avant de replonger la main dans mon sac pour y ranger mon téléphone. Au passage, ma main effleura un morceau de papier glacé, ce qui m’intrigua. Puis mes souvenirs revinrent en flèche au simple contact de la texture particulière de ce flyer froissé. Le numéro d’Améthyste, avec son petit message des plus sympathique, écrit au feutre noir, me laissait un goût amer dans la bouche. Je m’en voulais encore pour la façon dont nous nous étions séparées, et c’était en grande partie de ma faute. À moi et à ma fierté mal placée.

D’un geste machinal, j’enregistrais le numéro en observant le flyer de plus près. L’adresse du club en question se trouvait dans cette ville. Le petit plan qui figurait au dos le situait un peu avant la petite zone industrielle locale. J’imaginais que c’était normal d’être éloigné du centre-ville lorsque l’on tenait un établissement diffusant de la musique à haut volume jusque tard le soir.

Je soupirais brièvement et observais l’écran de mon téléphone, toujours sur le menu des nouveaux contacts. Comme une invitation, un encouragement à faire mes excuses, il me présentait les options « Call Amethyst », « Send text to Amethyst », « Remove Amethyst from contacts ».

En lisant cette dernière proposition, je secouais inconsciemment la tête. C’était exactement le contraire de ce que je souhaitais. J’avais envie de rétablir le contact avec elle, de communiquer.

Pourtant, je verrouillais simplement l’écran de mon téléphone.

Je pressais alors le pas en direction de la cafeteria, espérant soudainement l’y croiser de nouveau. Peut-être qu’elle m’y attendait avec un agaçant sourire chafouin, qu’elle n’attendait que de me voir arriver pour constater que je m’étais fait du souci au sujet de notre dispute. Peut-être même qu’elle avait oublié tout ça et qu’elle me rassurerait, qu’elle me dirait quelque chose du genre « C’est cool meuf »…

— Enfin, qu’est-ce que j’imagine ?

Il n’y avait personne adossée aux larges panneaux de bois ornant l’entrée. Personne n’y fumait nonchalamment une cigarette. Et même si cette personne avait été présente, elle ne m’aurait certainement pas dit exactement ce que je voulais entendre.

Mais l’heure n’était pas à laisser mon imagination divaguer. Il fallait que je mange, que je reprenne des forces pour avoir un esprit plus clair.

J’entrais donc et me saisis d’un plateau ainsi que de quelques couverts avant de me mettre sur le rail et d’observer ce qu’il y avait de bon aujourd’hui… Puis je grimaçais discrètement en fronçant les sourcils. Il n’y avait pas grand-chose. Mais soudain, une voix derrière moi me fit sursauter :

— Lindermak ! appela une voix désagréablement familière, un peu trop fort pour la faible distance qui nous séparait.

— Oui, Miraud ? répondis-je en me retournant avec un sourire forcé. Bonjour, que puis-je pour toi ?

— Déjà et d’une ! Je désapprouve le comportement de Léa et Chloé !

Je haussais un sourcil. Sandra Miraud était habillée comme hier, portant toujours ses horribles lunettes et son chandail bariolé, elle semblait être venue vers moi assez vite et portait encore sa veste en laine épaisse, elle n’était donc pas assise en train de manger. Cependant, une autre question m’occupait l’esprit :

— Heu, de qui tu parles ?

— Quoi ? Les deux qui t’ont embêtée hier soir ! déclara-t-elle comme si j’étais en tort de ne pas connaître le nom de mes agresseuses. Cependant, je n’approuve pas non plus ta réaction ! Même si tu étais en légitime défense ! Des femmes ne doivent pas se battre, elles doivent montrer l’exemple !

— Chhhut… soupirais-je en portant subrepticement mon index à ma bouche, comme pour montrer l’exemple. Je suis juste en face de toi, tu peux baisser d’un ton, ou même d’une octave entière si possible, ajoutais-je en souriant à ma propre plaisanterie. Et ce n’est pas grave, nous sommes quittes et nous repartirons d’un meilleur pied plus tard, formulais-je pour simplement me débarrasser de la conversation.

— Exactement ! déclara Sandra sans me faire la grâce de parler moins fort ou moins aiguë. Mais il y a aussi autre chose ! Toi qui prétends être féministe, tu dois signer la pétition ! ajouta-t-elle en brandissant un large papier sous mes yeux, fixé sur une simple planchette de balsa.

— Heu, de quoi s’agit-il ? demandais-je en reculant d’un pas, afin de ne pas avoir le papier dans la figure.

— Nous réclamons plus de menus végétariens le midi ! répondit-elle immédiatement.

Je grognais légèrement en roulant des yeux et m’emparais du stylo qu’elle me tendait.

— Très bien, mais je ne vois pas le rapport entre le féminisme et… Oh et puis finalement, je n’ai pas envie de le savoir, concluais-je un peu sèchement en mettant le point final à ma signature. Voilà, tu peux me laisser à présent.

— Mais, tu ne sais donc pas que la testostérone pousse les hommes à consommer de la viande et des protéines animales ? Et il a été prouvé qu’un régime carnivore rendait les humains plus agressifs ! Et je ne te parle même pas du gluten !

— Tu sais quoi ? l’interrompis-je soudainement en lui plaquant rapidement sa pétition entre les bras. Je suis convaincue de l’exactitude et du sérieux de ces études scientifiques, mentis-je avec un brin d’agacement dans la voix. Moi-même je ne mange pas de viande, mais j’aimerais tout de même manger. Alors si tu permets… concluais-je en me tournant de nouveau vers les entrées.

Derrière moi, j’entendais Miraud psalmodier d’autres mots indistincts tandis que sa voix s’éloignait, pour mon plus grand plaisir.

Cependant, je devais bien admettre que sa pétition pourrait bien jouer en ma faveur, si elle était prise en compte par l’administration du campus. Car j’avais toutes les peines du monde à trouver un plat qui me faisait envie. Donc, par défaut, je pris une petite salade de pois chiche aux oignons. Non pas que j’aimais particulièrement cela, mais je devais bien faire avec. En plat principal, rien de bien fou non plus, j’étais un peu exaspérée, ce que la caissière ne manqua pas de remarquer :

— Ben alors Lili, pourquoi tu prends pas une bonne tranche de rôti ? demanda-t-elle avec bienveillance.

— Pour beaucoup de raisons, répondis-je avec un sourire poli.

— Ah je vois, c’est pour ça que t’as signé le truc à Misandre, réagit-elle en hochant la tête et en haussant les épaules. J’ai signé aussi pour lui faire plaisir, mais tu sais, ce cochon-là, il est déjà mort, tu le sauveras pas ! encouragea-t-elle, toujours avec cette bienveillance empreinte d’une malheureuse méconnaissance des tenants et aboutissants du sujet.

J’aurais eu tellement de choses à dire là-dessus. Cependant, j’étais courtoise et je détestais faire la morale à quelqu’un qui avait de bons sentiments, alors je me contentais de répondre gentiment :

— Oui, mais c’est surtout une question de principe.

— Ohh, je vois, c’est bien ça, jugea-t-elle en hochant de nouveau la tête. Ah, c’est beau d’être jeune ! conclut-elle.

Je savais bien qu’elle sous-entendait que ce genre de principes n’était que des caprices d’adolescents encore un peu rebelles. Cependant, je savais qu’elle avait tort, au plus profond de moi, et je n’avais aucun intérêt à ce qu’elle en prenne conscience. Donc, je laissais couler avec un petit sourire courtois, tandis que je me saisissais d’une simple assiette de petits pois et de carottes.

Je m’arrêtais ensuite face aux desserts et me fit songeuse un bref instant. Je constatais que la perspective de céder mon dessert à Améthyste me réjouissait davantage que de manger moi-même un fondant au chocolat à la crème anglaise.

Je me disais alors que je devais vraiment me sentir coupable pour penser de la sorte. Cependant, comme pour conjurer le spectre de ce souvenir, je pris un simple fromage blanc. Après tout, j’adorais les produits laitiers. Je pris ensuite une petite bouteille d’eau pétillante et me présentais devant la caisse.

— Et voilà, dis-je en présentant ma carte.

— Bon appétit ! me souhaita la caissière avec enthousiasme après avoir bipé le morceau de plastique.

— Merci, répondis-je avant de me diriger vers une table un peu à l’écart.

Je préférais ne pas trop me mêler aux autres élèves en ce moment. Sur mon chemin, j’entendais encore quelques murmures à mon sujet, par rapport à Mauricio et, plus fraîchement, par rapport à Misandre. J’avais bien envie que l’on m’oublie un petit peu, alors j’allais m’asseoir toute seule.

Et au moment où je posais mon plateau sur ma petite table, mon téléphone vibra de nouveau.

Prenant mon temps, je m’installais et déposais mon sac à même le sol. J’avais rapidement remarqué qu’en France, il n’y avait pas ses pratiques petits crochets sous les rebords de tables, qui permettaient à ses utilisateurs d’y accrocher leurs sacs. Et même si c’était une pensée de pauvre petite fille riche, cela me faisait un peu mal au cœur de poser un sac à main Gucci en cuir sur une surface où les gens marchaient avec leurs chaussures sales, et renversaient éventuellement liquide ou aliment.

Avant de commencer à manger, je sortis mon téléphone et lisais le texto de Mauricio :

« Ah, c est bien les riches ca ! Tu envoi quelqu’un fair te course a ta place. Et meme tes assassina ! lol XD », dénonçait-il avec une horrible orthographe.

Je pouffais de rire. Normalement, j’aurais répondu plus tard, après avoir pris mon déjeuner, mais je me sentais d’humeur à lui répondre tout de suite :

« Toi c’est différent Mauricio, je t’étranglerais de mes propres mains pendant ton sommeil, tu mérites bien ça. »

Un rire m’échappa de nouveau. Ce n’était pas une plaisanterie très élégante, mais ça n’était qu’un texto, envoyé à une personne que je savais être désespérément peu sérieuse.

Je tournais donc mon attention vers mon entrée, après avoir posé mon téléphone à côté de mon plateau, et entamais ma salade de pois chiche. Ça n’était pas mauvais, c’était nourrissant et certainement assez bon pour la santé, mais le goût n’y était franchement pas, de mon point de vue. Je mis donc un certain temps à finir ma petite assiette tandis que mon portable vibrait de nouveau. J’attendais cette fois-ci de bien avoir fini pour regarder mon nouveau message, prenant une grande gorgée d’eau pétillante. Il s’agissait d’Hélène cette fois-ci :

« Utilise des émot' dans tes SMS, Lili… Mauricio a cru que t’étais énervée contre lui. »

J’écarquillais les yeux, tentant de réparer mon erreur le plus promptement possible, passant sur ma conversation avec Mauricio afin de le rassurer :

« Je plaisantais bien sûr ! XD », envoyai-je en réponse.

Sa réponse fut tellement vive que je le soupçonnais d’être stressé au point d’être resté pendu à son portable jusque-là :

« bordel tu m as fait peurrr ! »

Je soupirais en roulant des yeux et retournais au fil de conversation d’Hélène :

« Oui, je ferais attention, merci. » écrivis-je simplement.

Ce à quoi elle répondit très rapidement avec un simple smiley faisant un clin d’œil.

Décidant que l’affaire était résolue, je me tournais vers mes petits pois et carottes, insipides et tièdes, mal assaisonnés et cuits trop longtemps. Pendant que je les mangeais sans enthousiasme, mon portable vibra, mais je décidais d’y prêter attention après avoir fini.

Il me restait encore sept repas comptabilisés sur ma carte, et je me voyais déjà assez mal manger ce genre de tambouille autant de fois. Cependant, j’avais tellement besoin de reprendre des forces, surtout en l’absence d’un petit déjeuner digne de ce nom ce matin, que je terminais mon plat, reposant ensuite ma fourchette avec un soupir.

Avant d’attaquer le dessert, avec lequel je prendrais au moins davantage de plaisir, je me décidais à regarder le texto que je venais de recevoir.

Me demandant quel genre de plaisanterie Mauricio pouvait bien encore m’envoyer, je pris quelques gorgées à ma bouteille d’eau en déverrouillant mon écran… et manquais m’étouffer en avalant de travers, reposant mon téléphone sur la table en toussant comme une perdue au creux de ma main.

« tu fai quoi », m’avait simplement envoyé Améthyste.

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