**BEN - Opus 1**

Notes de l’auteur : J’ai écrit cette histoire il y a un peu plus de 25 ans. Je ne m’y suis plus penché depuis au moins 20 ans et je ne l’ai pas terminée, non par manque d’idées, mais parce que je n’arrive pas à me convaincre qu’elle mérite d’être achevée. Je la publie donc ici pour la tester.

Benoît Sylvaraice est né 127 ans après que vous aurez commencé à lire ce récit. Le début de sa vie n’a rien d’exceptionnel : une enfance heureuse dans un quartier calme du nord de la ville de Nicaïapolis. Il est le cadet d’une famille de trois enfants, et jusqu’à ses seize ans, rien ne laissait présager l’incroyable tournant que prendrait son destin.

Mais n’allons pas trop vite. Pour bien comprendre toute cette histoire, commençons quelques années avant les événements.

À quatorze ans, Benoît vient de fêter son anniversaire. Pour l’occasion, ses parents, Linus et Inspira Sylvaraice, lui ont offert un implant cérébral pour la cybernavigation. Depuis que le web est passé en quatre dimensions visuelles, cet implant est devenu indispensable. Sans lui, impossible de naviguer sans risquer d’être lobotomisé par les flux électriques. Mais l’obligation est aussi légale : chaque implant contient une puce de stockage et un identifiant unique, permettant aux autorités de surveiller les accès aux zones sécurisées ou « sensibles » du web.

Cependant, une alternative existe. Un marché noir s’est développé autour des implants modifiés, dépourvus de puce de stockage et d’identifiant. Leurs utilisateurs, appelés les C.N.I. (Connexions Non Identifiées), échappent à toute traçabilité. Jusqu’ici, ces implants étaient réservés à des membres du gouvernement ou à des criminels organisés. Mais récemment, leur nombre a explosé. Le Service Gouvernemental de Surveillance Web (S.G.S.W.) signale une augmentation de 15 % des C.N.I. détectés en seulement un mois.

Benoît, pourtant, ne se soucie pas de ces questions. Lui, il explore les archives numériques de la NASA et de la CIA, mises à disposition du grand public après la dissolution des deux agences. Il faut préciser que, comme l’URSS en son temps, les États-Unis d’Amérique ont fini par s’effondrer sous le poids de leur propre pouvoir.

Plongé dans ses recherches, Benoît parcourt des milliers de photos stockées sur le site de la NASA. Autrefois, l’agence promettait une prime à quiconque découvrirait un cliché authentique d’OVNI parmi des milliers d’images accessibles au public. En un siècle, personne n’a jamais rien trouvé. Grâce à son implant, Benoît analyse les fichiers à une vitesse vertigineuse : 790 clichés par seconde. L’ennui s’installe rapidement. Il bifurque alors vers des données confidentielles : rapports d’agents, analyses géothermiques de Saturne, enregistrements de conversations téléphoniques, plans de satellites…

Les informations affluent sans interruption, poussant son implant à ses limites. Mais Benoît continue, accélère. Il lit, absorbe, comprend à une vitesse surhumaine. En seulement quatre heures, il a ingéré vingt-sept ans d’archives de la NASA et trente-huit ans de dossiers de la CIA. Son cerveau est en ébullition.

Quand il se déconnecte, il réalise subitement une chose: il vient de traiter un volume d’informations qu’un utilisateur ordinaire aurait mis trois semaines à assimiler. Et il a tout retenu. Chaque donnée, chaque détail. Aussitôt, une vague de nausées le submerge, suivie d’une migraine insoutenable. Puis tout devient noir.

Le bruit sourd de sa chute alerte Inspira. Elle accourt et découvre son fils, inanimé, secoué de violentes convulsions, les yeux révulsés. La panique la saisit. Que faire ? Linus n’est pas là. Il était connecté… Faut-il le rebrancher ? Poussée par une intuition désespérée, elle saisit la fibre et reconnecte l’implant. Instantanément, les spasmes cessent. Le visage de Benoît retrouve son calme. Inspira éclate en sanglots et serre son fils contre elle.

Après trois jours d’examens, les neurologues diagnostiquent une crise épileptique, tandis que les neuro-biotechnologistes ne détectent aucune anomalie sur l’implant. Benoît est en parfaite santé. Pourtant, il est désormais le seul adolescent de quatorze ans à connaître sur le bout des doigts la géographie, le climat et la composition gazeuse de la moitié des planètes du système solaire. Il maîtrise aussi les relations politiques et secrètes des États-Unis, les accords dissimulés, les réseaux terroristes, les opérations clandestines et des décennies d’espionnage.

Mais Benoît garde le silence. Il craint de devenir un sujet d’étude. Après tout, il se sent bien. Convaincu que son secret est intact, il reprend sa vie normalement. La seule conséquence visible ? Une explosion de ses notes en histoire, géographie, géologie, astronomie et chimie. Et honnêtement, il ne va pas s’en plaindre.

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