Chap 33. Ténèbres, prenez moi la main

Trois jours auparavant

Elle n'avait pas fermé l'œil.
Dans la nuit, elle avait sursauté de son lit, trempée de sueur et s'était ruée dans la salle de bain, aspergeant son visage d'eau fraîche.
Roberta se regardait dans le miroir, pensant qu'il s'agissait sans doute de la dernière fois qu'elle le ferait sans honte. Depuis sa dernière discussion avec Brant, ce qui lui avait dit la hantait, mais pire encore était la question qui revenait sans cesse dans sa tête.
Qu'allait-elle faire avec ça ?
Faire comme si de rien n'était ? Ignorer le fait qu'Hux ait des soupçons sur Lewis ? Sur SON capitaine ? Cet homme d'une loyauté et d'une clairvoyance sans faille ?
Ridicule...
Pourtant, au fond d'elle, quelque chose ne cessait de la tourmenter. La jeune femme avait fréquenté Hux, ils avaient d'ailleurs été ensemble dans une sacrée galère. Il était posé, intelligent, ambitieux, certes, parfois même arrogant... Mais pourquoi voudrait-il nuire à Lewis ?
Et surtout, qu'avait-il comme autre bonne raison de suspecter le capitaine, si ce n'était que pour lui nuire ?
Elle frotta délicatement son visage avec un essuie éponge. Everson réfléchissait alors au fait que certaines personnes parvenaient à vivre avec des questions aussi épineuses que celles qui ne cessaient de la hanter, sans vouloir les résoudre.
Repensant à son parcours sur le Donnagher depuis qu'elle avait été détachée de ses machines pour l'enquête Sentinelle, elle n'arrivait désormais plus à chasser cette étrange sensation, qu'elle avait réussi à enterrer au fond d'elle et qui lui revenait désormais en pleine figure.
La sensation qu'elle était là, pour une raison particulière, pour comprendre ce qui clochait depuis le début.
« Deux semaines... » souffla-t-elle.
C'était le temps qui lui restait, pour mettre en terme à ce tourbillon de questions qui ne cessait de la hanter.

 

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2 jours et 19 heures auparavant
« Ce plan est rudement épineux. »
Lewis lisait avec attention le plan d'action imaginé par Spencer et Hux. Il avait du mal à comprendre comment ce genre de mission avait pu avoir un feu vert du Suprême Leader, mais au fond, ce qui l'inquiétait surtout c'était le haut taux de dangerosité de la manœuvre.
« Vous avez une autre idée capitaine ? »
Il lui lança un regard en coin en souriant, bien sur que non, c'était sans doute la seule solution qu'ils avaient. Et puis, il fallait bien en finir une bonne fois pour toute avec cette affaire, et il semblait que cette mission, bien que complexe, en soit le point d'orgue.
« Deux semaines, est-ce bien suffisant pour préparer nos troupes ?
- C'est en tout cas la limite maximum pour éviter que nos ennemis n'aient le temps de se retourner.
»
Enael avait du mal à être à son aise, elle essayait de chasser de son esprit le fait qu'elle mentait délibérément à son capitaine et à tout son équipage.
« Qui dirigera les opérations sur place ? Vous ou Hux ?
- Moi.
» souffla-t-elle. « Hux sera toujours ici pour se charger de l'opération à plus large échelle. »
Lewis resta silencieux.
« Vous vous doutez que je n'aime pas l'idée que vous vous lanciez à nouveau dans ce genre de mission après votre incident sur Jawa.
- Cela n'arrivera plus.
- J'y compte bien, puis-je vous accompagner ?
»
Spencer lui lança un regard complice. Pouvait-elle refuser à Lewis de l'accompagner pour cette mission alors qu'elle l'avait laissé en charge du Donnagher pendant tout ce temps ?
« A vous de voir si vous tolérez de reprendre les missions avec moi !
- Les missions, Madame ? Je pensais que nous allions prendre quelques vacances ...
»
Ils ne dirent plus un mot, Lewis adressa un clin d'œil à Spencer et elle lui sourit presque par automatisme.
Elle espérait sincèrement qu'il lui pardonnerait un jour ce qu'elle faisait.

Soudain la porte s'ouvrit, la jeune femme qui entra dans la pièce semblait nerveuse, mais salua l'amirale et le capitaine docilement.
« Tout va bien Sergent ? » Spencer avait perçu une pointe de malaise et d'inquiétude sur le visage d'Everson. Quelque chose qu'elle n'avait pas spécialement l'habitude de voir chez elle, toujours si enjouée d'habitude. Lewis lui adressa un regard inquiet puis hocha la tête, comprenant ce que Spencer lui avait dit à travers son regard.
« Je vais vous laisser, il me semble que vous souhaitez parler avec l'amirale. »
Il inclina à nouveau la tête pour saluer les jeunes femmes. Spencer désigna un siège à Roberta pour qu'elle puisse s'installer.
« Voulez-vous un verre d'eau ?
-Non ...Non merci Madame...
»
L'amirale vint se rasseoir, posant nerveusement ses mains sur le bureau.
« Vous allez bien ?
- Pas vraiment non...
»
Un silence de quelques secondes s'abattit sur elles.
« Que se passe-t-il ? »
Roberta serra les poings sur ses genoux, un malaise intense tordait son estomac. Allait-elle vraiment faire une chose pareille ? Allait-elle se le pardonner un jour ? Pourtant, elle savait au fond d'elle que c'était la seule chose à faire...Elle le savait et si Spencer l'avait su, elle aussi, elle lui aurait dit de suivre son instinct.
Ce qu'elle allait faire.
« J'ai besoin d'une permission...
- Roberta, que se passe-t-il ?
»
Elle sursauta à l'écoute de son prénom prononcé par la bouche de Spencer. Rare ont été les moments où elle lui avait adressé la parole en utilisant son prénom et toujours, cela marquait la gravité de la situation et de son inquiétude.
« J'ai appris une mauvaise nouvelle je...J'aimerais retourner sur Jakku revoir mon frère pour m'assurer qu'il va bien. »
Spencer haussa les sourcils. Il était rare qu'Everson parle de sa famille et du milieu dans lequel elle avait grandi. Cela avait toujours été très compliqué. Everson n'a pas ou peu de contact avec les siens depuis toujours. Livrée à elle-même, elle a survécu grâce au Premier Ordre et à son plan de formation de militaire. Mais elle savait la jeune femme fortement attachée à ses racines malgré tout.
« Je ne vous parle pas en tant que soldat, mais je m'inquiète vraiment à l'idée que vous...
- Tout ira bien madame, je reviendrai aussi vite que possible, je le promets.
»
Enael était hésitante, mais la mine décomposée de la jeune femme faisait peine à voir. Allait-elle vraiment prendre le risque de la laisser retourner là-bas ? Au fond, c'était peut-être une façon de constater que Roberta s'était détachée de son passée sur Jakku.
« Bon, si ça peut vous faire du bien...Mais, j'aimerais que vous soyez revenue dans quelques jours, nous avons besoin de techniciens comme vous pour préparer l'offensive et les jours sont comptés.
- Bien sûr Madame.
»
Spencer prit le document de permission et le signa, permettant à Roberta de quitter ses fonctions pour quelques jours seulement. La course contre la montre commença alors. Saluant l'amirale Spencer, elle souffla doucement en quittant la salle.
*Quelques jours pour tout comprendre. *
Marchant d'un pas déterminé, elle ne remarqua pas le regard de Brant se poser sur elle lorsqu'elle partit chercher son chasseur TIE.

 

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Sentinelle, 2 Jours auparavant

Fredonnant un air connu dans toute la galaxie, le lieutenant Gibbs était assis sur son fauteuil en cuir, les pieds sur le tableau de bord. Depuis que tout était rentré dans l'ordre sur sa station de construction, tout semblait être plus simple. Le projet avançait rapidement, les matériaux s'acheminaient sans peine et sans aucune attaque pirate. Sa promotion, sans aucun doute, il l'aurait prochainement.
« Lieutenant. »
Il sursauta en voyant son adjoint entrer sans même se faire annoncer.
« Pardon de vous déranger Monsieur, mais une demoiselle voudrait vous voir, elle dit qu'elle vient du Donnagher. »
Du Donnagher ? Non mais, quand en aurait-il fini avec cette histoire ? Cette attaque avait déjà fait suffisamment de grabuge dans sa tranquillité, et revoilà qu'ils rappliquent ?
« Elle dit que c'est...
- Ca va, j'ai compris, merci ! Dites-lui que j'arrive.
» le soupire qu'il poussa à ce moment en disait long sur son envie de la rencontrer. Nonchalamment, il se leva de son siège et suivi son adjoint sans broncher. Arrivant dans la salle de commandement où la jeune femme avait été sommée d'attendre, il ouvrit grand les yeux.
« Mais, je vous connais, vous êtes la cadette qui...
- Sergent.
- Oh...
» Il marqua une pause, peinant à cacher sa jalousie. « Les promotions pleuvent davantage sur le Donnagher qu'ailleurs.
- L'avantage d'avoir un bon chef, Lieutenant.
»
Il grimaça face à la répartie de la jeune femme.
« Sergent Everson. Je suis ici à titre personnel. Je suis en pleine rédaction du rapport final des expertises des pièces des droïdes et chasseurs qui ont attaqué votre station. J'aimerais voir vos techniciens. »
Gibbs haussa les sourcils.
« Vous en mettez du temps pour le rédiger, ce rapport. »
Roberta ne prit même pas la peine de répondre, tandis que le lieutenant ordonna la venue des techniciens sur la plateforme.
« Messieurs, le sergent » son mépris transpirait de ses mots. « Souhaiterait s'entretenir avec vous. »
Elle lui lança un regard en coin avant de s'adresser aux trois soldats alignés devant elle.
« J'aimerais revoir avec vous les analyses des épaves. »
Ils se lancèrent un regard suspect.
« Quelque chose m'a échappé, je voudrais juste qu'on reprenne ensemble la procédure d'analyse si vous le voulez bien. Donc, vous avez analysé les pièces de vaisseau n'est-ce pas ?
- Oui Madame, nous étions assistés par certains techniciens du Donnagher, mais nous nous en sommes chargés sous le commandement du capitaine Lewis.
»
Jusque-là, tout allait pour le mieux, Roberta hocha la tête pour acquiescer.
« Vous savez également que j'ai pratiqué la contre-expertise de ces pièces, sous les ordres du général Hux. »
Les soldats se dévisagèrent, leurs expressions semblaient soudain changer.
« Un problème ?
- Madame, je pense que vous faites erreur...
»
Un frisson la parcouru, comme si soudain, quelque chose n'allait plus dans son plan.
« Comment ça ?
- Selon les informations que nous avons reçues, c'est le capitaine Lewis qui vous a convoqué pour approfondir nos découvertes sur les épaves...
»
Sa gorge se noua alors. Bien sur que c'était lui qui était venue la chercher. Mais sous les ordres de Hux, pas sous son impulsion.
Ce qu'ils avaient trouvés ?
« Je ne comprends pas, qu'aviez-vous trouvé ? » sa voix semblait soudain beaucoup plus fragile.
« Eh bien, on avait détecté une pièce étrange au niveau d'un fuselage. C'était le type de pièce qu'on trouve sur une planète pirate de la bordure extérieur et... »
Elle n'écoutait plus, soudain le sol semblait trembler sous ses pieds. Ce technicien, face à elle, lui annonçait qu'en vérité, ce qu'elle avait pris pour une découverte était en réalité bien autre chose.
« Qu'avez-vous fait lorsque vous l'avez découverte ?
- Nous l'avons signalé au capitaine Lewis.
»
Silence.
« On lui a proposé de l'extraire pour analyse, mais il nous a demandé de ne pas le faire, il a dit qu'il s'en chargerait personnellement. Nous avons donc pensé que c'était vous qu'il avait demandé pour une expertise. »
Silence.
« Vous allez bien mademoiselle ? »
Roberta avait l'impression que tout tournait autour d'elle. Se pouvait-il qu'il y ait eu une erreur ? Un problème de communication ? Oui, bien sûr, ça ne pouvait s'expliquer que comme ça. Sinon, comment Lewis aurait-il pu savoir pour la pièce et ne pas en faire mention ? Quel instinct l'avait poussé à revenir sur Sentinelle pour tout reprendre depuis le début ? Probablement le fait qu'il était impossible, à ses yeux, qu'une équipe n'ait pas pu tomber sur cette pièce avant elle.
A moins bien sûr, qu'on le lui ait caché.
« Oui...Je m'excuse, je réfléchissais. »
Il y avait cette chose au fond d'elle, cette petite impulsion qui irradiait son corps, ce même courant qui l'avait entrainé ici, celui qui avait bercé sa vie, il était encore là. Bien présent, et il bouillonnait.
Si elle voulait se convaincre qu'il s'agissait là d'une erreur humaine...
...sa petite voix, celle qui était là, au fond d'elle depuis toujours. Lui criait l'horrible vérité.

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1 jours auparavant

Le Donnagher était en effervescence.
Sur le point, les soldats et les troopers s'affairaient à la préparation du plan. Spencer avait élaboré un plan dangereux. Faire croire à tout le monde que l'attaque avait été avancée était chose facile, mais seule elle savait la suite des évènements.
Pendant la diversion menée par les chasseurs, son vaisseau s'introduirait dans la base avec ses soldats. Ils seraient briefés uniquement à leur arrivée sur place et devraient s'adapter, ce qui n'était pas encore certain. Mais elle était confiante du succès de cette mission de haut vol.
Lewis avait été surpris par le changement de programme concernant la date, mais était habitué « aux changements d'humeurs de la hiérarchie », comme il aimait le dire. Il avait rassemblé son équipement, les troupes et attendait son amirale de pied ferme.
Brant avait été chargé de l'intendance et d'assister le général Hux aux commandes sur le Donnagher.
L'amirale Spencer attachait ses dernières armes à son ceinturon tandis que sa tenue d'intervention était déjà enfilée et opérationnelle, croisant Hux dans le couloir, elle lui adressa un sourire réconfortant, lisant l'inquiétude sur son visage. Il lui emboita le pas.
« Avez-vous parlé à Lewis ?
- Je n'ai rien dit...
»
Hux lui lança un regard en coin, sachant à quel point cela lui coutait de mentir.
« Vous savez que c'est pour mener à bien cette mission...
- Oui, j'en ai conscience, Hux.
»
Alors qu'ils étaient sur le point d'arriver sur la passerelle de décollage, Hux l'attrapa par le bras. Un instant ils restèrent là, à ce faire face dans cette position étrange. Elle sentait la poigne de Hux lui serrer le bras de manière délicate, et son regard émeraude transpercer le sien.
« Quelque chose ne va pas ? » lui demanda-t-elle intriguée.
Le général resta un bref instant muet avant de lâcher sa prise sur son bras. « Non. Rien... » souffla-t-il. Elle hocha doucement la tête.
« Soyez prudente... » ajouta-t-il doucement. A ces mots, elle se retourna et une étrange lueur brilla dans ses yeux, elle eut envie de revenir vers lui et de lui dire aurevoir. Elle, qui était encore seule avec lui dans ce couloir, aurait très bien pu revenir vers lui, se glisser dans ses bras et déposer un baiser sur ses lèvres.
Mais elle ne le fit pas, bien évidemment.
« Vous aussi. » Souffla-t-elle. Avant de se retourner pour rejoindre la passerelle.

 

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18 heures auparavant


Quelques jours étaient déjà passés depuis son départ de Sentinelle.
Roberta n'avait pas beaucoup dormi, trop occupée à fabriquer ce dont elle avait besoin.
Sous sa lampe de chevet brillait de petites pièces métalliques qu'elle assemblait tel un orfèvre. Cela lui avait pris deux soirées, deux nuits et elle y était parvenue. Enfin, elle l'espérait.
Lorsqu'elle était arrivée à la salle des archives avec ce badge, elle espérait très sincèrement qu'elle lui ouvre les portes à ce qu'elle cherchait. Il était facile de duper un droïde, moins un système de sécurité.
« Identité ? » lança la machine d'une voix monocorde.
« Zoe Polson.
- Fonction ?
- Administrateur, bureau des renseignements
- Badge ?
»
Elle tendit la pièce, moment de vérité, pendant trente secondes elle crut mourir.
« Accepté. »
Soulagement, satisfaction. Ses talents de faussaires n'étaient visiblement pas si rouillés que ça.
Ordre alphabétique, des dossiers à perte de vue, de longs couloirs dignes du plus grand dédale. Ici, on sait tout de vous, même ce que vous ne savez pas encore. A ce moment, elle était tentée de se laisser envahir par un sentiment de toute puissance, mais il n'en fut rien, rien ne devait la détourner de son objectif.
« L...LE... » elle se mit sur la pointe des pieds, elle semblait avoir aperçu le boitier de documents dont elle avait besoin. Ces fichus dossiers papiers que chérissaient le Premier Ordre aura bien pu être informatisés, mais ils craignaient bien trop un piratage du système.
« Merde ! »
Elle glissa de l'étagère et le boitier tomba à ses pieds, éparpillant au sol les dossiers dont elle avait besoin. Elle se détestait, elle et sa maladresse. La jeune sergent se posa à quatre pattes pour ramasser un à un ce qu'elle avait fait tomber, espérant tomber sur le dossier de Lewis au passage. Mais alors qu'elle rassemblait ses documents, elle se figea.
Un dossier venait de la paralyser totalement.
Elle cligna plusieurs fois des yeux, croyant avoir rêvé.
Mais non, c'était bien réel.
Devant elle se tenait un dossier dont elle ignorait l'existence.

Il portait le nom d'Ismérie Lewis.

Mais si déjà, ce nom l'avait interpellé, le mot qui était inscrit en grands caractères rouges le long de la couverture cartonnée lui avait donnée le tournis. Elle plongea dans l'abime à la lecture de ces huit lettres assassines.

«TRAHISON »

 

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Plateforme de décollage, cinq heures auparavant.

« Quelque chose ne va pas, Madame ? »
Perdue dans le vide, elle parcourait une dernière fois la plateforme de décollage à sa recherche, en vain. Une vive inquiétude s'était emparée d'elle. Où était Everson ? Normalement, elle lui avait promis d'être revenue sous quelques jours et elle brillait par son absence.
Des milliers d'hypothèses lui venaient en tête pour la justifier, mais aucune ne lui inspirait quelque chose de positif.
« Everson n'est pas là, Lewis... »
Ce dernier parcouru l'étendue à son tour, ne pouvant que constater les dires de Spencer.
« Vous lui avez donné repos.
- Je sais, mais elle ne devait pas prendre si longtemps. Je suis inquiète... Vous savez de quoi elle s'est sortie je...
»
Lewis posa une main réconfortante sur l'épaule de l'amirale, il aimait ce côté bienveillant de sa personnalité. Spencer s'inquiétait toujours pour les autres et pour leur bien-être, c'était cela qui en faisait, à ses yeux, un leader d'exception.
« Elle vous a promis que tout irait bien, faites lui confiance. Apprenez à lui faire confiance, elle nous a prouvé de quoi elle était capable non ? »
Spencer hocha la tête positivement, Lewis avait raison. Elle devait accepter de faire confiance à Everson et se dire qu'elle était probablement absente pour une bonne raison. Et c'est le cœur bien plus léger qu'elle laissa la porte de son vaisseau d'assaut se refermer devant elle.

 

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Poste de commandement 4 heures auparavant

Le communicateur de Hux avait retenti peu après le départ de Spencer.
Intrigué, il s'isola du poste de commandement pour prendre cet appel auquel il ne s'attendait pas.
« Saviez-vous que Lewis avait une fille ? »
Il reconnut de suite la voix qui s'élevait dans le communicateur, il essaya de ne pas être vu en communication avec elle.
« Oui, certains le savaient, les gradés en tout cas, mais...
- Saviez-vous qu'elle était morte ? Saviez-vous pourquoi ?
»
La gorge de Hux se serra.
« Qu'êtes-vous en train de faire Everson ?
- Ce que je fais ? Cela ne se voit pas ? Je suis mon instinct. J'ai...J'ai senti que quelque chose clochait, ne me demandez pas quoi, ni même comment, c'est comme ça... Et ce que m'a dit Brant m'a...
- Attendez une minute, que vous a dit Brant ?
»
Elle marqua une pause, réalisant qu'elle venait de vendre le lieutenant en même temps que ses révélations.
« Il m'a dit que vous soupçonniez Lewis et... »
Elle n'acheva pas sa phrase. De l'autre côté du communicateur, elle pouvait sentir Hux bouillir et elle savait à ce moment-là que la seule chose qui le retenait d'aller l'étrangler, c'était sa fierté.
« Elle a été exécutée pour trahison. »
Le cœur de Hux rata un battement.
« Je vous demande pardon ? »
Everson sut au ton de la voix du général que celui-ci apprenait la nouvelle, comme elle cinq minutes plus tôt.
« Ismérie Lewis, a été exécutée peu avant la fin de la première guerre impériale. Elle a été accusée de faire partie de l'alliance rebelle et d'avoir vendu des informations sur les stratégies impériales. Son procès a été arbitraire, l'époque était sombre, mais les preuves étaient accablantes. Selon toutes vraisemblances, ils ont intercepté une communication entre elle et la princesse Leia Organa. C'est ça, qui l'a mise définitivement sur l'échafaud. »
Hux bouillonnait, c'était trop d'un seul coup, mais il essayait de garder la tête froide.
« Ce n'est pas suffisant pour confirmer ou non mes soupçons.
- C'est vrai, mais j'ai également le dossier de Lewis sous les yeux. Des choses...Ne collent pas.
- Par exemple ?
- Il a disparu pendant un certain temps, disons deux ans, durant la période de formation du Premier Ordre. A l'époque où votre père et les derniers grands noms de l'empire essayaient de reformer une alliance.
»
C'était une époque bien trop vague pour Hux, qui à ce moment-là, ne devait être qu'un jeune garçon sur le jouc de son père tyrannique. Il était difficile pour lui de savoir ce qu'il ressentait à ce moment précis, de la colère envers Everson et Brant, il était passé à l'intrigue puis à l'inquiétude. Car si ce que Roberta disait était vrai, alors il fallait aller jusqu'au bout des choses et répondre à cette terrible question.
Où était Lewis pendant ce lapse de temps ?
« Cherchez la réponse. » lança-t-il. « Trouvez où était Lewis à cette époque. »
La flamme dans le cœur de Roberta s'alluma alors, elle sut à cet instant qu'elle avait la confiance de Hux, que celui-ci avait compris pourquoi elle avait fait ça sans en parler à quiconque.
« Mais faites vite. Ils sont déjà partis en mission, les plans...ont changé ! Je ne vais pas gaspiller votre temps à vous expliquez les détails, mais dépêchez-vous. »
Si Roberta sentit un vent de panique parcourir sa colonne vertébrale, elle reprit rapidement ses esprits, plus déterminée que jamais.
« Général ?
- Sergent ?
- Pas un mot à Brant, s'il vous plaît.
»
Un instant d'hésitation.
« Entendu, le temps presse Everson. »
La communication se coupa sur ses mots, laissant Roberta seule face à la panique qui la submergeait.
Elle n'avait qu'une seule solution pour trouver la réponse à cette question.

« Tout va bien général Hux ? »
La voix de Brant s'était élevée du brouhaha de la salle de commande, Hux lui lança un rapide regard, essayant de ne pas trahir ses émotions.
« Oui, rien de grave, Ren demande où en est l'opération. J'ai fait mon rapport. »
Les heures défilaient à vive allure, pourtant, pour le général Hux, tout semblait durer une éternité. Le retour de Roberta, le basculement des opérations, la fin de tout ça...Semblait être tellement loin.

 

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Il ne lui avait fallut que quelques instants pour se rendre là-bas...

Jawa – Trois heures auparavant

Repensant à la mésaventure de Spencer, Roberta s'était sentie poussée vers cette planète, d'une part, car elle la connaissait très bien, mais aussi car quelque chose, au fond d'elle, lui dictait de se rendre là-bas. Elle savait qui aller voir pour trouver la trace d'une personne disparue, elle savait aussi à quel point le revoir lui posait problème. Mais au fond, avait-elle le choix ? Sa conscience la laisserait-elle en paix si elle n'allait pas au bout des choses ? Bien sûr que non.

La chance voulu qu'il ne pleuve pas sur Jawa, et visiblement c'était le cas depuis plusieurs jours déjà, en témoignait le sol déjà séché par les rayons d'un soleil ardent. Les habitants la dévisagèrent d'un air intrigué et inquiet, mais elle ne prêta pas attention à cela, seule comptait cette maison, en face d'elle, dont elle ouvra la porte sans même frapper.
« Bordel ! » souffla la voix d'un homme d'un certain âge, « On ne peut pas frapper à cette putain de ... »
Il s'arrêta net, comme saisit par une crise cardiaque. Leurs regards se croisèrent un instant, et il semblait terriblement troublé de la voir là, quant à elle, ses yeux mêlaient inquiétudes et émotions. Il avait tellement vieilli.
« Salut, papa. »
Il désigna la chaise usée proche de sa vieille table en métal. Elle s'y installa sans un mot de plus.
« Tu t'es rappelé d'avoir un père ? »
Elle ne répondit pas, elle sentait les yeux de ce vieil homme la dévisager de la tête au pied.
« T'es sergent maintenant ? De mieux en mieux...
- Mamy aurait été fière de moi.
- Ta grand-mère était juste une vieille sénile.
»
Elle frappe du poing, il n'avait pas le droit de parler d'elle sur ce ton.
« Enfin, t'es moins pire que ton frère... » siffla-t-il. « Il est toujours en vie au moins ? »
Elle haussa les épaules.
« Sur Jakku, c'est tout ce que je sais. »
Il termina de nettoyer la tasse qu'il posa devant elle et lui servit un café si clair qu'on aurait dit de l'eau charbonneuse.
« T'es pas là pour prendre un biscuit n'est-ce pas ? »
Elle leva les yeux vers son père. La relation qu'elle avait avec lui n'était pas des plus simples, elle aurait voulu les oublier, tous, autant qu'ils étaient.
Hochant négativement la tête, elle sortit une photo et la balança sur la table.
« Tu as déjà vu cet homme ? »
Son père lui lança un regard intrigué puis jeta un coup d'œil au portrait qu'il avait en face de lui.
« Merde...Quel coup de vieux.»
Elle se pencha vers son père.
« Tu le connais alors ?
- Peut-être ouais... Il lui est arrivé des bricoles ?
- ça se peut, mais pour ça tu dois être plus loquace.
»
Son père soupira.
« On était jeune à l'époque, on célébrait la victoire sur l'empire, la chute de Palpatine, quand ce type est arrivé avec son uniforme impérial. On a d'abord cru qu'il nous piégeait, mais ses yeux-là, ceux qu'il m'avait adressé, j'ai su que ce n'était pas ça qui l'attirait à nous. C'est là qu'il m'a montré...La photo.

-La photo ?
- Sa gamine, enfin, elle devait avoir à peine dix-huit ans. J'ai compris qu'il était le père d'Ismérie, c'était une héroïne dans nos rangs. Elle avait fait...Le choix de nous rejoindre quelques années plutôt. Sans le dire à son père, ni à personne.
»
Il marqua une pause, lui désignant la tasse à côté d'elle pour lui rappeler de boire ce café avant qu'il ne devienne froid.
« Il était perdu, il ne comprenait pas. Si j'avais su que ça me tomberait dessus à moi aussi.
- On ne parle pas de ça papa.
» le coupa-t-elle froidement.
« Il ne comprenait pas pourquoi sa fille, la chair de sa chair, avait pu faire un tel choix. Mais au bout de quelques temps ici, il a ouvert les yeux sur ce qu'il défendait réellement, ce fut tellement limpide pour lui. Je me souviens des conversations que nous avions eu alors. »
Roberta avait peur de bien comprendre.
« Qu'a-t-il fait ensuite ?
- Il est resté ici.
- Pour faire quoi ?
»
Son père se contenta de la regarder droit dans les yeux en soupirant.
« Je ne peux pas t'aider ma fille, je regrette. Cela va au-delà de mes valeurs, de la cause que je défends. Mais tu ne peux pas comprendre ça toi qui as trahi les tiens. Tu as trahi ce pour quoi on t'éduquait.
- Tu te trompes papa, tu pensais me construire, mais en réalité, toi, les autres, vous n'avez fait que détruire ce que je suis, ce que j'étais... Tu peux me cracher ce que tu veux à la figure, mais aujourd'hui, je suis fière de moi et c'est absolument tout ce qui compte désormais.
»
Il ne répondit pas, mais Roberta savait qu'il n'avait rien à répondre à cela, se préparant à quitter la maison de son père, elle se leva et lui tourna le dos sans même un aurevoir.
« Je connais quelqu'un...qui pourrait t'aider. »
Elle n'en crut pas ses oreilles, et se retourna vers son père d'un air surpris.
« Mais je te préviens, ce qu'il va te dire, ne te plaira pas du tout. »

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