Chapitre 10 : Discussion

– C’est de la folie, Arthur, tu le sais comme moi ! Tu l’as laissée utiliser ses pouvoirs ? Tu sais pourtant que c’est dangereux, autant pour elle que pour nous ! Elle aurait pu en mourir, et dans ce cas-là, qu'aurais-tu fait, dis moi ?

– Écoute, je savais ce que je faisais ! Ses pouvoirs ne sont pas encore assez développés pour me tuer.

– Tu ne te rends pas compte de ce que tu lui fais ?

– Je ne lui ai pas infligé de mauvais traitements ! répliqua le duc Arthur, qui tentait en vain de calmer Griselda, sa sœur cadette.

Or, une fois qu’elle commençait à le réprimander, ce qui arrivait souvent bien qu’ils aient neuf ans d’écart, elle ne s'arrêtait pas avant que son frère ne lui donne raison. Ce qui pouvait durer très longtemps.

– Tu m’as très bien comprise ! Elle se réveille sans aucun repère, sans souvenirs et toi, que fais-tu ? Tu fais d’elle ta servante !

– Et alors ? Pour autant que je sache, je suis toujours maître de mes actions ! Et cette fille n’a pas besoin de savoir ce qui l’attend !

Griselda soupira. Son frère était vraiment une tête de mule irresponsable.

– Je sais ce que tu veux faire… Et je continue à penser que c’est une très mauvaise idée, murmura-t-elle. Tu vas t’attirer les foudres des autres familles. Que vont dire Mère et Père ? Cela fait presque un siècle que le pays fonctionne sans royauté… Tu ne peux pas tout changer si facilement.

– Pense ce que tu veux, ça m’est bien égal. Je n'ai besoin ni de toi, ni de ton avis. Fais ce qui te chante, mais n’interfère pas avec mes plans.

– Tu finiras bien par voir que tu t’es embarqué tout seul dans une sacrée galère…

– C’est ça ! s'exclama le duc Arthur, agacé par l’attitude de sa sœur cadette. Et maintenant, du vent ! Et que je ne te revoie pas !

Griselda lui claqua la porte au nez en sortant. Accablé, le duc Arthur s’affala sur un des fauteuils de la pièce et prit un verre de boisson.

Griselda approcha une chaise du lit où la servante de son frère dormait paisiblement, dans un grand lit à baldaquin. Elle semblait si sereine, alors qu’elle venait d’utiliser une énorme dose de magie sans y être prête. Elle ne respirait presque pas, et si Griselda ne voyait pas sa poitrine se soulever légèrement, elle aurait tout aussi bien pu croire qu’elle était morte.

Son frère ne comprenait pas. Il ne comprenait pas que cette jeune fille avait d'énormes pouvoirs et un rôle important à jouer dans ce monde. Les autres familles n’étaient pas au courant de son existence, mais Arthur ne comptait sûrement pas le leur dire.

“Il joue vraiment avec le feu” pensa la jeune femme.

Elle veillait toujours sur lui, sur son frère irresponsable, mais cette fois, il allait vraiment trop loin.

Perdue dans ses pensées, Griselda contempla la jeune fille aux cheveux d’or. Attendrie, elle lui caressa le front. Puis elle décida de la laisser se reposer encore un peu et se leva sans bruit de sa chaise. Mais au moment où elle tourna les talons, une main la retint. La jeune servante agrippait fermement la chemise de Griselda, avec plus de force que celle-ci ne lui aurait imaginé.

– Bon… On dirait bien que je vais être obligée de rester ici, murmura la jeune femme avec un petit sourire.

Elle se rassit et resta donc au chevet de la blonde.