Mon père est déjà rentré, je l’ai laissé rentrer tout seul en voiture. Même si je n’ai pas demandé son avis à Weno, je sais qu’il est venu en voiture et qu’il va venir manger à la maison, comme toujours après un match. Je l’attends devant le gymnase, en premier lieu je me suis placée devant les portes des vestiaires. Malheureusement, j’ai entendu tout son discours après la défaite où il tentait de remonter le moral de son équipe. Je ne voulais pas le déranger et avoir les oreilles trop indiscrètes, j’ai donc décidé de m’éloigner.
Toutes les supportrices sont parties, il ne reste que quelques voitures sur le parking. Je regarde mon téléphone en ne pouvant m’empêcher de souffler, je déteste attendre et je commence à avoir froid. J’entends des bavardages dans le couloir, ça doit être lui, en tout cas je l’espère.
Le reste des membres de l’équipe sort en me faisant un grand sourire et un signe de la main. Je les regarde et vois les joggings, les teddys et les sweatshirts aux couleurs de l’équipe, ne sachant pas véritablement ce que je dois dire. Ils ont l’air de plutôt bien prendre la défaite, je n’ai pas envie de faire ressortir de mauvaises émotions. Weno n’est pas présent, il ne doit rester que lui dans les vestiaires. Ils se stoppent devant moi et me fixent. Elyas brise le silence :
- Salut Man-Man ! Tu vas bien ? Tu as assisté à tout le match ?
- Oui et vous ? Oui, comme toujours, j’étais aux premières loges à côté du coach. Vous rentrez déjà ?
- Oui on est crevés après ce match, on a qu’une hâte sauter dans nos lits et récupérer. Enfin ça c’est pour mon programme, il y a certains des gars qui ont envie de faire la fête pour se changer les idées.
- Vous devez manger pour récupérer des forces, n’oubliez pas de faire attention à votre santé les gars !
Je les regarde tous en leur faisant des allers-retours avec mon index, mon majeur entre mon regard et en les montrant, ils répondent tous, tout en avançant vers leurs voitures respectives et en se tapant des tapes dans le dos.
- Oui, ne t’inquiète pas !
- Promis m’dame !
- J’ai une pizza de prévu qui m’attend à la maison.
- Après le fût de bière, j’ai prévu de manger un petit peu !
Un enchaînement de portes qui claquent symbolise la fin de notre échange. J’arrête de les regarder alors qu’ils partent chacun à leur tour et je focalise mon attention vers la porte du gymnase. Ce n’est que lorsque j’entends des bruits de pas derrière moi que je me retourne. Je vois Isaac qui fait une petite course pour me rejoindre, il s’arrête à quelques mètres de moi en soufflant un peu.
- Tu attends Daich ?
- Oui il va venir manger à la maison, tu veux venir ? Il y a toujours de la place pour un couvert supplémentaire, en plus au menu c’est des lasagnes !
- Sans façon même si tes lasagnes me tentent beaucoup.
- Dans ce cas, je t’en ramènerais une part demain.
- C’est gentil, mais ce n’est pas pour ça que je suis venu.
- Dis-moi tout, qu’est-ce que tu veux ?
- Que tu prennes soin de notre capitaine ce soir, toi seule peux lui remonter le moral.
- Il ne va pas bien ?
- Il nous a dit qu’il ne fallait pas être déçu, qu’il était fier de nous…
Je complète sa phrase :
- Il vous a réconforté tout en repoussant ses propres émotions.
Il soupire tout en hochant la tête, confirmant mes dires. Même si je le connais depuis plus longtemps, Isaac connait Owen sur le bout des doigts. Depuis que je le connais, il a toujours été parfait, mais ne prend pas assez soin de lui. Par exemple, lorsque vous subissez une défaite collective, il va prendre sur lui, supprimer le sentiment de déception qu'il ressent aussi et te réconforter en priorité. Ce n'est une fois qu’il sera seul qu'il va s'autoriser à exprimer ses émotions et sa tristesse. Cela ne m'étonnerait pas qu’il soit en train de pleurer dans les vestiaires ou de serrer les lèvres jusqu'à qu'elles soient blanches. Il n’est pourtant pas si mauvais joueur, il ne s’est jamais énervé contre moi lorsque je l’explosais à Monopoly. Et pourtant, je me montre très mauvaise gagnante, le sentiment de joie qui m’emporte à chaque victoire de ce jeu est incomparable. Rien ne me fait me ressentir mieux, même pas la nourriture gratuite, ce n’est pas comparable à posséder plus de la moitié du plateau et de voir l’espoir quitter les yeux de mon meilleur ami alors que je lui prends tout son argent.
Je pourrais le rejoindre dans les vestiaires, mais il se renfermerait aussi vite et prendrait tout de suite le pas sur la conversation, cela ne ferait qu'empirer les choses. Je l'attends donc en le laissant digérer l'information et la défaite de son équipe pour mieux en parler avec lui dans la voiture.
Elyas me laisse, je me retrouve de nouveau seule sur le parking désert. L’obscurité est brisée grâce aux lumières réparties un peu partout. Cela me permet d’apercevoir la buée sortir de ma bouche causée par le froid de la nuit. Pour me réchauffer, je mets ma capuche et plonge mes mains dans la poche kangourou de mon sweat. Je commence à faire des allers-retours devant la porte, plus le temps passe et plus je m'inquiète pour lui. Je n’arrête pas d’imaginer des centaines de scénarii qui pourraient expliquer pourquoi il n'est pas encore là. Et s’il était tombé dans la salle de bain et évanouie ? Je prends mon mal en patience en faisant les cent pas et je lui donne 15 minutes pour arriver avant que j'aille le chercher.
Lorsqu'il sort enfin, j’entends sa voix, il parle tout seul : “Ce n’est pas un comportement de capitaine ça, demain entraînement… Heureusement qu'il n’était pas éliminatoire, c'est déjà ça…”. Je ne sais pas trop comment signaler ma présence sans lui faire peur donc je me racle la gorge, il se retourne et me regarde avec surprise, avant qu’il ne pose la question j’y réponds.
- J'ai dit à mon père de rentrer à la maison tout seul et de commencer à faire réchauffer les lasagnes, je voulais rentrer avec toi.
- Tu n'as pas attendu trop longtemps ?
Il regarde autour de lui comme si cela allait lui apporter la réponse.
- Tu aurais dû me le dire, je serai sorti plus tôt, dit-il en se grattant la tête, ce qui a pour effet de faire tomber une mèche de cheveux ondulés devant ses yeux.
- Non, ne t'inquiète pas. Tu avais besoin de temps tout seul…
Je lui adresse le regard spécial “tu vois exactement de quoi je veux parler, mais je ne vais pas le dire textuellement sinon ça va t’agacer”. Il ne répond pas à ma dernière phrase, ce qui me confirme qu’il sait de quoi je parle. On se ressemble sur ça, nous n’aimons pas être vus lors de nos moments de faiblesse, nous n’avons jamais parlé de ce sujet. Je ne pense pas qu’il ait les mêmes raisons, dans mon cas, je n'ai pas envie de déranger les gens avec ma tristesse et mes sentiments.
Il enchaîne habilement en changeant de sujet.
- Comment savais-tu que j'avais pris ma voiture ?
- Tu prends toujours ta voiture quand il y a match et je l'ai vu en sortant. Tu sais quoi, tu devrais me donner un double comme ça, je pourrais attendre directement dedans ! C’est l’idée du siècle, je suis un génie !
- Mouais je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée…
- Je n’ai pas dit que j’allais la conduire, c’est juste pour attendre dedans. En plus, c’est un peu sexiste ce que tu insinues, j’ai le permis et je suis super forte en conduite !
- Je t'adore, mais je ne te confierais jamais ma voiture.
- On verra ça, bon on rentre j'ai faim ! Tu sais ça prend de l'énergie d’acclamer, d'encourager et de faire des stratégies pour une équipe de volley.-ball, dis-je en me mettant derrière lui et en le poussant.
- Pauvre petite chose, je te plains.
On se dirige tous les deux vers la voiture, dans un mouvement fluide, il se décale pour réussir à me faire le doubler. Je dirige la marche tandis qu’il soulève l’anse de mon sac à main. Il le prend et le pose sur son épaule.
- Ce n’est vraiment pas lourd, je peux le porter toute seule, lui dis-je en tendant la main pour le récupérer.
- Mais j'ai envie de prendre ton sac en ajoutant un petit rire de méchant digne des films.
Voyant que je ne lâche pas ma prise, il se met alors à courir pour échapper à ma prise, ce qui a pour effet de faire taper nos deux sacs. Je ne le prends pas en course poursuite, je n’ai aucune chance de gagner contre lui. Il m’ouvre la portière avant de s’installer.
Durant le chemin nous sommes relativement calmes. Il me laisse mettre la playlist que nous avons créée sur notre Spotify commun. J’écoute la musique silencieusement tout en regardant le paysage défilé et la lune nous suivre. Je lutte pour ne pas m'endormir, la voiture a toujours eu cet effet soporifique sur moi. Lorsque je sens que je glisse vers les bras de Morphée, je me redresse et ouvre la fenêtre passagère, l'air frais me permettant de reprendre un peu mes esprits. Cela ne fonctionne pas, je suis beaucoup trop fatiguée pour lutter plus longtemps.
Lorsque je me réveille, je n’entends que le silence, m’indiquant que la voiture est arrêtée. Je m’étire de manière très peu discrète et vois qu’il me regarde. Je lui fais un petit sourire en fermant un peu les yeux pour ajuster ma vue et le voir net.
- Pourquoi ne m’as-tu pas réveillé ? je lui demande avec des petits yeux.
- Je savais que tu allais te réveiller toute seule et j'étais bien dans le calme.
- Oui bah la prochaine fois ne me regarde pas c'est flippant.
Nous regardons tous les deux la façade de ma maison. Les lumières allumées à l’extérieur éclairent le chemin et les arbres autour. Le premier étage est éteint, ce qui n’est pas étonnant vu qu’il n’y a que ma chambre, la salle de bain et la chambre de papa. Je le vois d’ailleurs passer devant la fenêtre, il fait différents allers-retours avec des assiettes et des verres pour mettre la table.
Je reprends doucement :
- Tu vas mieux ?
- Ça allait, il me fallait juste un peu de temps.
- Si jamais tu as besoin d'en parler, je suis là. Toujours.
- Je sais toujours derrière moi, à me coller aux basques dit-il en me frottant la tête affectueusement. Cela serait beaucoup plus facile si j’avais enlevé ma casquette.
- Ta vie serait beaucoup moins intéressante si je n'étais pas là.
- Ça c'est sûr.
Je vois bien qu'il n'est pas au top de sa forme et qu’il a encore besoin d'un petit boost pour le moral, son regard n’est pas aussi pétillant que d’habitude et je ne vois pas sa fossette se dessiner quand il me sourit. Je n’aime pas ça, je déteste sentir mes proches tristes ou même les personnes en général. J’ai l’impression de ressentir toute sa peine et de l’absorber.
- Ok ce que je te propose, une fois qu’on aura terminé de manger les lasagnes et on ne saute pas cette case du plan. J’ai une faim d’ours, je pourrais manger le plat entièrement. On descend dans le jardin et on se fait un match de volley-ball digne des plus grands championnats. Bien sûr tu as un handicap sinon ce n'est pas du jeu !
Un grand sourire illumine son visage, je vois enfin sa petite fossette se dessiner. Faire du volley-ball, est-ce qui le rend le plus heureux et épanoui, c'est la solution miracle pour résoudre tous ces problèmes. Je vais sûrement avoir des courbatures partout demain, mais voir ce sourire est la meilleure des récompenses.
- Allez viens que je te mettre ta pâtée rapidement, lui dis-je en me détachant et en sortant de la voiture.
- Est-ce que tu peux me rappeler ta détente s'il te plaît ?
- Gnagnagnagna, est-ce que tu peux me rappeler ta détente s'il te plaît… répondis-je en utilisant une voix d’enfant.
Je reprends tout de suite en le pointant d’un doigt accusateur :
- Tu sais très bien que la détente n'est pas la réponse à tout et déterminante pour la victoire, c'est la stratégie qui doit primer.
- Mais oui rassure-toi comme tu peux.
Je lève les yeux au ciel et me dirige vers la maison sans l’attendre. Je toque à la porte pour que mon père m’ouvre, même s'il savait que j'allais arriver d'ici peu, il a tout verrouillé. C'est un malade la sécurité, la porte ne reste jamais ouverte.
- Bonsoir ma chérie ! dit-il en me laissant sur place et en se dirigeant vers la cuisine, il doit surveiller le réchauffage du plat.
- Salut pa’.
Sans ferme la porte, je monte à l'étage pour enlever mes chaussures. Je ne fais même pas attention si Owen m’a suivi ou non. J’enlève tous mes bijoux, ma casquette et change de t-shirt.
Lorsque je redescends, je vois Owen rentrer et fermer la porte derrière lui en la verrouillant. Il me lance mon sac à main que j’attrape au vol. Il se dirige vers la cuisine pour rejoindre mon père. Je laisse mon sac en bas de l’escalier, je le remontrais plus tard pour les rejoindre.
- Bonsoir coach.
- Owen pas de ça ici ! À la maison tu es le petit Owen pas le capitaine de mon équipe. Combien de fois, je devrais te le dire ?
Mon père se baisse et ouvre le four pour regarder où en est le plat.
- J’ai compris… Monsieur.
- Et ne m’appelle pas Monsieur non plus, dit-il en se retournant et claquant la porte du four.
Owen part dans un rire silencieux, il est fier de lui en plus. J’ai envie de rire à mon tour, je me pince les lèvres pour ne pas partir dans un rire fort. Je sais que je ne pourrais pas le contrôler. Voyant ma réaction, Owen rigole plus fort et menace de craquer à son tour. Je prends donc la décision de désamorcer la situation en changeant radicalement de sujet.
- Papa c’est bientôt prêt ? Je suis affamée.
Très sympa ce petit chapitre, je n'ai pas beaucoup de remarques à faire pour cette fois-ci ;)
1) Répétitions
« Mon père est déjà rentré, je l’ai laissé rentrer tout seul en voiture. »
Un peu dommage de commencer sur une répétition comme ça. Les phrases qui entament ou terminent un chapitre, il faut vraiment les soigner à fond ;)
Reformulations possibles :
→ Mon père m’a devancé en voiture.
→ J’ai laissé mon père repartir seul en voiture.
→ J’ai laissé mon père rentrer seul.
Dans l’ensemble, tu ne fais pas beaucoup de répétitions, c’est très correct. Mais quand tu en fais, ce sont souvent des répétitions très très proches, voire dans la même phrase.
Par exemple : « en se tapant des tapes dans le dos ». Ou encore : « je ne lâche pas ma prise, il se met alors à courir pour échapper à ma prise ».
2) Astuce pour les dialogues
« Oui et vous ? Oui, comme toujours, j’étais aux premières loges à côté du coach. »
Petite astuce : supprimer les « Oui » au début des répliques (lorsqu’ils ne sont pas indispensables à la compréhension de l'échange en cours) fluidifie et redynamise les dialogues.
Pour cette réplique-ci, on pourrait carrément commencer à « Comme toujours ».
→ Comme toujours, j’étais aux premières loges !
Même remarque pour la réplique suivante :)
3) Paragraphe confus
« en leur faisant des allers-retours avec mon index, mon majeur entre mon regard et en les montrant »
Je ne comprends pas bien cette phrase, qu’as-tu voulu dire ? (+ répétition « en se tapant des tapes ») Ce paragraphe me paraît un peu confus, je pense qu’il faudrait le retravailler :)
5) Encaisser la défaite
Chapitre intéressant à la fois sur le thème de l’amitié et le thème de la défaite. En effet, chacun a sa façon (parfois très personnelle) de gérer la victoire ou la défaite. J’ai beaucoup ri avec la petite pique sur le Monopoly ^^’ Je pense que tu pourrais aller légèrement plus loin en évoquant un peu plus le ressenti des personnages et, justement, leurs différentes manières d’encaisser cette défaite, même brièvement.
« dans mon cas, je n'ai pas envie de déranger les gens avec ma tristesse et mes sentiments »
Ici aussi, je pense que tu pourrais étoffer avec, par exemple, une anecdote personnelle, des hypothèses concernant son ami, les conséquences que ça peut avoir sur leur relation, creuser davantage le ressenti de la narratrice.
5) Les erreurs repérées
« récupérer des forces »
→ Mélange entre « pour récupérer » et « pour recouvrer des forces » ?
« je t’en ramènerai* une part demain »
« Il vous a réconfortés* »
« Et s’il était tombé dans la salle de bain et s’était* évanoui* ? »
→ Les constructions « était tombé » et « s’était évanoui » sont différentes, donc « s’était » ne peut pas être sous-entendu.
« je l'ai vue* en sortant »
« je ne te confierai* jamais ma voiture »
« pour une équipe de volley*-ball »
→ Il y a un point qui se balade ^^’
« je ne lâche pas ma prise, il se met alors à courir pour échapper à ma prise »
→ On écrit plutôt « lâcher prise » ou « lâcher » tout court
« Faire du volley-ball* est ce* »
→ Il ne doit pas y avoir de virgule entre le groupe sujet « Faire du volley-ball » et le verbe conjugué.
« en regardant le paysage défiler* »
« Pourquoi ne m’as-tu pas réveillée* »
« c'est la solution miracle pour résoudre tous ses* problèmes »
→ « ces » peut fonctionner aussi, selon le sens que tu veux donner à ta phrase ;)
« C'est un malade de* la sécurité »
« Sans fermer* la porte »
« Je ne fais même pas attention si Owen m’a suivie* ou non »
« je le remonterai* plus tard »
« Combien de fois devrai-je* te le dire ? »
Et ce sera tout !
Ça peut paraître beaucoup vu comme ça, mais en vrai ça va ^^’ Je pense que ce sont surtout des fautes d’inattention ;)
J’espère que mon commentaire te sera utile :)
À très vite !
Rosa
C'est un plaisir de te revoir dans mon espace commentaire ! Merci beaucoup pour tes retours, je me les garde précieusement pour la réécriture :)
L'histoire continue et on en apprend plus sur leur relation. C'est vraiment adorable ce qu'ils font et comment ils se comportent tous les deux.
Je vais continuer à te lire ! :)
Bonne continuation :)