Chapitre I

Par Melau
Notes de l’auteur : Cette histoire est en cours d'écriture et n'est pas encore corrigée, je m'excuse par avance pour les fautes et éventuelles coquilles qui se baladeraient dans le texte !

Bonne lecture !

La lourde voiture noire se frayait un chemin au milieu de l’épaisse foule. Le chauffeur peinait à avancer, devant faire attention à la moindre petite chose. Les jointures de ses doigts blanchissaient à vue d’œil, l’angoisse montait en lui. Il priait pour que le véhicule ne fût pas la cible d’un attentat – après tout, il transportait une invitée de marque. Il essuya son front couvert de sueur d’un revers de manche. Le volant devenait glissant.

De l’extérieur, on ne pouvait pas discerner les deux silhouettes qui se trouvaient dans l’habitacle, sur la banquette arrière. Le public savait pourtant pertinemment qui arrivait dans cette espèce de limousine, grosse voiture beaucoup trop chic qui faisait un peu tache dans cet environnement, surtout aujourd’hui. A l’intérieur, une femme et un homme se faisaient face. Ils ne parlaient pas. Lui, la cinquantaine bien entamée, les cheveux poivre et sel gominés, lisait attentivement les pages d’un dossier. Le papier cartonné lui collait aux mains. Comme le chauffeur, lui aussi était angoissé. C’était un très grand jour. Elle, au contraire des deux hommes qui se trouvaient dans la voiture, ne semblait pas particulièrement apeurée. Au fond, elle savait déjà ce qui allait se passer. Alors, elle n’avait aucune raison de s’inquiéter. Ses longs cheveux noir de jais s’éparpillaient sur ses épaules, sur le blazer vert foncé, ainsi que sur sa poitrine. Bien qu’elle aurait assuré que, non, elle n’était pas stressée, sa respiration était rapide, saccadée. Elle caressait distraitement le fauteuil en cuir, laissant ses doigts s’attarder sur les craquelures, les aspérités et les petites coutures bordeaux. Un instant, elle ferma les yeux. Que ne ferait-elle pas pour revenir en arrière ! Enfin, elle n’aurait pas changé grand-chose à ces dernières années. Non, bien au contraire, elle aurait tout fait exactement de la même manière. Tout, sauf une seule petite chose. Mais ça, elle n’aurait pas pu deviner. Comment l’avaient-ils trouvée ? Et pourquoi avaient-ils tant tenu à mettre la main sur elle ? Elle leva une main et fit un geste pour balayer l’air comme si elle balayait ces questions ; l’heure n’était plus aux regrets ni aux incompréhensions.

Dehors, la foule n’arrêtait pas de hurler le nom de cette femme. Les gens scandaient, criaient, ils savaient, eux aussi, comment toute cette histoire allait se terminer. Cela ne les empêchait pas de laisser sortir leur venin, de faire les langues de vipères. Certains tenaient même des paris, ils riaient grassement du sort qui attendait cette femme, assise là, dans cette grosse voiture trop encombrante dans ces petites rues.

La police suivait la voiture, personne n’ouvrait la route. Le chauffeur devait se débrouiller tout seul. Quelque part, il était puni – ou plutôt, il souffrait de la punition qu’on infligeait par avance à la passagère au blazer vert.

On frappait aux portes de la voiture. La femme entendait bien les menaces, mais elle essayait de ne pas en faire fi.

— Crève !

— Va pourrir en enfer !

— J’espère qu’on t’éclatera la gueule avant même que tu puisses ouvrir ta bouche de salope !

L’homme sur la banquette arrière releva la tête à cette dernière invective. Il haussa un sourcil, referma son dossier et donna deux petits coups brefs sur la vitre teintée qui séparait le chauffeur de ses passagers. C’était le signal pour avancer plus vite. Le chauffeur soupira ; que pouvait-il faire de plus ? Il faisait du trois à l’heure, et ça l’énervait autant que ça l’apeurait. Pourtant, lui, il ne se plaignait pas…

 

Aucun des trois ne put déterminer si le temps s’était étiré de tout son long dans le but de les faire souffrir, ou s’ils avaient simplement été si crispés et incapables de penser à quoi que ce fût d’autre que les démons qui menaçaient de renverser la voiture, voire pire. Pourtant, au bout d’un moment, une petite éternité, le véhicule finit par s’immobiliser.

Le bâtiment devant lequel ils se trouvaient était infesté de monde. Les escaliers de marbre qui montaient jusqu’à l’entrée étaient quasiment invisibles. Les colonnades disparaissaient à cause de la foule. Le bruit du moteur fut remplacé par le brouhaha.

Le chauffeur garda une main sur le volant, l’autre sur le levier de vitesse. Il n’avait qu’une seule hâte, décamper à toute vitesse dès qu’il le pourrait. Un signe des forces de l’ordre et il appuierait sur la pédale aussi fort qu’il le pouvait, tant pis si un de ces fous se trouvait sur sa route. Après tout, on ne se préoccuperait pas de lui cet après-midi.

Pendant ce temps, l’homme sur la banquette arrière sortit de la voiture, côté rue. Il fit le tour du véhicule péniblement ; il calculait. Combien y avait-il de journalistes ? Pourrait-on tous les écarter ? Les forces de l’ordre semblaient avoir pris les bonnes mesures pour garantir la sécurité de tous. Était-ce vraiment le cas ? Les questions se bousculaient dans son esprit, mais il dut y mettre un terme lorsqu’il arriva enfin au niveau de la portière. Il prit une grande inspiration.

C’était l’heure.

Une fois qu’il tirerait sur cette poignée, une fois que la portière s’ouvrirait, et une fois que la femme au blazer vert sortirait de cette voiture, il n’y aurait plus de retour en arrière possible. En fait, à bien y penser, c’était déjà trop tard. Lui, déjà, était arrivé trop tard. Il était là, mais sa présence ne servirait à rien. Pourquoi avait-il accepté ? Sa carrière était pourtant sans entache, il avait eu de gros clients et était connu dans le milieu. Pourquoi avait-il voulu jouer à celui qui pisse le plus loin ? Aucune idée. Et puis, ça ne servait à rien de se le demander : il était trop tard. Alors il posa ses doigts sur la poignée chaude et collante et tira.

      

Elle n’avait pas porté de chaussures à talons depuis bien longtemps. Elle ne se souvenait même pas de la dernière fois qu’elle avait enfilé de telles horreurs pour les pieds. Elle essayait de rester droite. En sortant de la voiture, elle avait déjà failli tomber. Elle s’était retenue de justesse à la portière et à la main moite tendue par l’homme face à elle.

Un pied devant l’autre, garder la tête baissée, se frayer un chemin entre les journalistes et le public qui n’avait pas pu être retenu, tout cela n’était pas chose aisée. Son instinct de survie voulut se rappeler à elle, dans un sursaut de vitalité, si bien qu’elle eut envie de courir dans l’autre sens. Mais à quoi bon ? Il était trop tard.

— Une question ! Une question !

La femme manqua de lever la tête. L’homme poussa le journaliste trop curieux.

— Poussez-vous de là ! On ne répondra à aucune question !

Les flashs des appareils photos qui les mitraillaient commençaient à étourdir la femme. Elle buta du pied contre une marche, manqua de partir en avant. L’homme la retint d’une main sur le buste. Elle tourna la tête pour le remercier, mais il ne lui laissa pas le temps de répondre. Il hocha simplement la tête avec un air grave. Ça ne l’aidait pas, pas du tout, à se rassurer.

Ils arrivèrent finalement en haut des escaliers. Elle releva la tête, risquant un regard par-dessus son épaule. Elle avait besoin de se rendre compte, de voir par elle-même, combien elle était haïe. Les gens s’étaient déplacés par centaines, par milliers même si on en croyait les rues adjacentes pleines à craquer. Son cœur se serra lorsqu’elle entraperçu quelques pancartes dont les slogans semblaient en sa faveur.

 

Soudain, un coup de feu. Ou plusieurs. Des cris. L’affolement, la peur. La précipitation.

On les tira en avant, on les poussa.

 

Il était trop tard. Mais, au moins, ils étaient en vie. Pour l’instant.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Jeff St Pierre
Posté le 15/12/2023
Bonjour Melau, ce qui est difficile dans une histoire, c'est d'intriguer le lecteur dès les premières lignes, et là, vous avez parfaitement réussi ! Vous donnez l'envie de connaître la suite. C'est bien écrit, avec des mots choisis.
Je ne suis pas expert dans le genre, mais pour moi, c'est très réussi. Bravo !
Melau
Posté le 19/12/2023
Hello :)
Merci pour votre commentaire, c'est très gentil, et ça m'encourage d'autant plus à continuer ! J'espère que la suite vous plaira :)
Artichaut
Posté le 14/12/2023
Bonjour,

Une ouverture intrigante. Le suspense est très palpable tout du long du chapitre. Et clairement, ça ne donne pas envie de lâcher l'histoire.

Je suis un peu surpris que la voiture n'ait pas été escortée par la police (en tête). La police est prête à laisser la fouler lyncher ses occupants ? Car on n'en était pas loin, j'ai l'impression.

Bonne continuation/écriture.
Je vais lire la suite.
Artichaut
Melau
Posté le 19/12/2023
Hello Artichaut :)

Ravie que ce premier chapitre ait fonctionné pour toi, et qu'il t'ait plu, apparemment !
Effectivement, la voiture n'est pas escortée, et quelque part, on peut le comprendre dans la suite du récit... A toi de découvrir ;)

Bonne lecture à toi alors !

Encore merci
djinn
Posté le 10/11/2023
Bonjour,
On se demande pourquoi la foule hait tant cette femme... Et pourquoi, malgré cette haine, elle a l'air de se sentir aussi sereine... On pense à certains de nos politiques, bons ou mauvais.... La suite au prochain numéro...
Une toute petite remarque... Ces gens dans la voiture qui se fraient un chemin au milieu de la foule haineuse sont des puissants (du moins je pense). Peut-être que nous ne ressentons pas suffisamment cette puissance.... Mais ce n'est que mon avis ;-)
A bientôt
Melau
Posté le 10/11/2023
Hello !
Bienvenue ici ! :)
Merci pour ton avis, la suite apportera peut-être des réponses à tes questions ! Je te laisse lire et me dire ce que tu en penses, peut-être sont-ce des puissants, peut-être non... A toi de le découvrir ;)
En tout cas, merci beaucoup pour ton commentaire, à bientôt j'espère !
Ombreline
Posté le 09/11/2023
Bonjour Melau,
Premier chapitre qui rentre dans l'action et où on sent monter la tension au fil du déplacement de cette voiture.
J'ai hâte de découvrir l'identité de ces personnages et le rôle de ce chauffeur dans l'histoire.
Melau
Posté le 09/11/2023
Hello ! Merci beaucoup pour ton commentaire, j'espère que la suite te plaira :)
Vous lisez