Prologue :


 

Jabbartha, Quartier Nord


 


 

Le Soleil disparaissait lentement derrière les nuages, tandis que la Lune, aussi splendide qu'à son habitude, s'élevait élégamment, astre scintillant parmi les étoiles.

La silhouette encapuchonnée traversa l'allée pavée le plus silencieusement possible.


 

Malgré l'heure peu avancée de la soirée, les rues étaient désertes, ayant pour cause la chaleur étouffante qui régnait à Jabbartha, aussi bien de jour que de nuit. Les réverbères incandescents avaient été remplis de leurs pierres par le falotier, et éclairaient faiblement les ruelles.


 

Plus l'ombre progressait vers l'extérieur de la cité, plus le noir se faisait complet, et cela l'arrangeait fortement. Elle n'avait pas besoin d'y voir clair, car elle connaissait chaque recoin de Jabbartha, ce qui aurait pu paraître impossible, vu son étendue et sa complexité.


 

Elle sortit une jababulle jaune de sa poche et l'avala promptement. Ces bonbons fondants, spécialités de la région, avait l'agréable utilité de la déstresser. Que du sucre, mais que du bonheur !

La silhouette — on aurait bien du mal à savoir s'il s'agissait d'une femme ou d'un homme en raison

de sa cape — releva les yeux vers la grande arche de pierre, dédiée à l'exportation des marchandises de la cité, et dans son cas, sa porte de sortie. De part et d'autre de l'arche, s'élevaient les statues de serpents, symboles de Jabbartha, et cadeaux du Prince étranger Toscan le Jeune qui les avait fait édifier en l'an 607. Il fallait bien s'imaginer qu'après mille années somme toute composées de guerres et de tempêtes de sable, les statues avaient perdu de leur beauté et la pierre s'abîmait. Mais elles tenaient toujours bon, attirant visiteurs et artistes.


 

L'arche était passée. Désormais, plus rien ne pouvait entraver son chemin. Elle parcourut encore quelques mètres dans le désert avant de s'arrêter subitement.


 

Elle avait oublié l'eau !


 

Quel imbécile partirait dans le désert sans se munir d'une ou deux gourdes ?! Des mois qu'elle préparait et peaufinait son plan ! Des mois !


Elle respira longuement pour se calmer et sorti une carte chiffonnée de sa poche.

Le prochain village était à cinq jours, c'est-à-dire pas vraiment la porte à côté. Elle fouilla dans sa besace et en sortit une boîte contenant des concombres coupés en petits cubes et quelques tomates cerise. Avec ça, elle pourrait se rafraîchir un peu, et en plus, ça faisait deux des cinq portions de fruits et légumes recommandées par jour. Elle pouvait y ajouter le poulet braisé qu'elle avait piqué aux cuisines et elle était partie pour un repas de seigneur.


 

Elle rangea ses provisions et se remit en route aussitôt.

Quelques kilomètres plus loin, elle enleva sa cape et ouvrit légèrement sa tunique. La chaleur avait eu raison d'elle.


 

C'était une femme de petite taille à la longue chevelure grisée, contrastant étrangement avec sa jeunesse apparente. Elle portait autour de sa taille une écharpe nouée où reposait un bébé. Elle lui caressa affectueusement la tête et sourit. Si elle faisait tout cela, c'était pour ce petit bout de chou. Il la remercierait plus tard.


 

Cela faisait deux bonnes heures que la cité de Jabbartha n'était plus en vue, dissimulée par une dune de sable, mais la jeune femme n'était pas sereine. On aurait tôt fait de remarquer la disparition de l'enfant au palais, le lendemain, et le Roi enverrait probablement une vingtaine de soldats à ses trousses. Heureusement, elle avait bien pris soin d'effacer ses traces, et avait disséminé quelques faux indices menant à la sortie de la ville.


 

Elle aurait bien pris un dromadaire avec elle, mais ne sachant pas chevaucher, elle avait jugé cela plus encombrant qu'autre chose.


 

Elle se retourna afin de contempler l'étendue qu'elle avait parcourue. Ce fut là qu'elle prit conscience que tout était fichu. Le sable se soulevait comme une sorte de poussière, annonçant l'arrivée d'un troupeau. Enfin, elle avait encore l'espoir qu'il ne s'agisse que du vent, mais sa théorie fut réduite à néant lorsque elle aperçut les premiers cavaliers.

Elle se mit à courir, mais c'était peine perdue. Elle se prit les pieds dans sa robe et trébucha. Le bébé commençait à pleurer, ballotté dans tous les sens. Une main ferme l'agrippa par le col et la traîna dans le sable sur une vingtaine de mètres. Elle cria en tentant de ne pas écraser l'enfant avec son corps. Soudain, un sifflement aigu retentit, et l'homme la relâcha. Les cavaliers l'encerclèrent, rendant toute fuite impossible.


 

Au début, elle avait pensé avoir affaire aux gardes royaux, mais leurs tuniques rouges démontraient le contraire, et jamais au grand jamais ils ne se seraient permis de faire du mal au bébé.

Elle voulut parler, mais elle avait la gorge sèche et la langue râpeuse après s'être ramassé le sable en pleine face. Un des hommes — celui qui avait sifflé — descendit de sa monture et s'approcha dangereusement.


 

Il s'accroupit en face d'elle et tendit les bras.


 

— Donnez-moi l'enfant, dit-il.


 

La femme joint ses mains autour du bébé dans une étreinte protectrice, comme pour signifier qu'elle ne céderait pas.


 


 

— Pathétique, ricana le cavalier en se relevant, bientôt suivi par ses comparses. Donnez-le, reprit-il. Passez-le-moi et votre vie insignifiante sera épargnée.


 

Elle fit non de la tête et se recula. De toute façon, ils ne la laisseraient jamais vivante et, qu'elle soit consentante ou non, ils le lui prendraient de force.


 

— Alors mourrez !


 

Elle ferma les yeux et offrit un dernier baiser à l'être humain serré contre son cœur.
L'homme dégaina son sabre à une vitesse hallucinante et lui trancha la tête froidement.

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Ella Palace
Posté le 12/03/2022
Bonjour,

un prologue assez efficace et plutôt agréable à lire. Je m'attends à voir l'enfant, x années plus tard, dans des aventures au coeur de déserts sombres. Et apprendre, au fil des lignes, qui était cette femme et qui il est réellement. Peut-être un prince, une princesse... sauvé d'un certain destin pour basculer dans un autre pire encore...

A voir...

Au plaisir!
eysselia
Posté le 18/01/2022
Salut,

Après avoir lu ton prologue, je m'attend un peu à découvrir une histoire assez sombre, enfin avoir une ambiance plus proche d'un thriller que d'un feel good, parce sombre c'est subjectif et les échelles ont tendance à jouer au chaise musicales. Bref, donc à découvrir une histoire contenant de la tension, un peu de question géopolique ou de complot entre société et un groupe autre (ou plus, est-ce compréhensible ?), une prohécie (ça c'est plus le prologue). Pour autant est-ce qu'un prologue donne le ton de l'histoire sans permettre d'écart ? (c'est une vraie question, est-ce que je peux m'autoriser à attendre de nouveau éllément, comme des scène plus drôle ou cocasse, bref qulque chose qui n'est pas vriament l'mbiance dépeinte ici)
Par contre ce qui est plsu facile à dire, c'est que oui je suis intrigué par ton prologue et j'aime bien la façon dont tu as écris. Par contre s'ils veulent voler le bébé j'espère qu'ils n'avaient pas besoin de lui vivant, car vu comment ils s'y prennent pour le récupérer, je doute un peu sur leur capacité à le transporter sans le tuer.

"homme en raison
de sa cape —" -> petit retour à la ligne ligne qui c'est glisser malencontreusement ici

Sur ce bonne écriture ^^
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