Prologue

Notes de l’auteur : Bienvenue dans ma tête ! J'aimerais en premier lieu m'excuser des potentielles fautes d'orthographe que vous pourrez certainement trouver, je fais mon maximum pour les éviter mais je suis loin-trèèèès loin- d'être infaillible…

Maman tapote le volant avec ses doigts manucurés sur le rythme de la chanson qui passe à la radio. Elle tourne la tête vers moi et me sourit, ce sourire complice qu'elle n'adresse qu'à moi seul, celui qui a le don de me rendre heureux à chaque fois que je le vois. Je lui souris en retour et baisse le volume.

-Tu peux passer chez Tom's ? J'ai besoin de nouvelles cordes pour ma guitare.

-Bien sûr mon chéri.

-Merci, maman.

Elle se met à fredonner doucement en prenant la sortie suivante avant de reprendre d'une voix sereine.

-Qu'est-ce ce que tu fais ce soir ? Si je dois te conduire quelque part, préviens-moi maintenant pour que je m'organise, j'ai un vernissage à la galerie à 19H30.

Sa galerie d'art plantée en plein milieu de Manhattan attire les foules presque chaque les soirs. Je ne comprend pas pourquoi tous les riches sont passionnés par l'art, même le plus étrange parfois.

-Rien de spécial, je vais juste rejoindre les gars au skatepark ou au terrain de basket, on ne s'est pas encore décidé. Dans tous les cas, j'irais en skate, je n'ai pas besoin du taxi Jefferson ce soir.

Elle fait une moue mi-renfrognée, mi-perplexe. Je ris lorsqu'elle se racle la gorge bruyamment ,façon passive de me réprimander. Elle se reconcentre sur la route en secouant la tête.

-Qui tu exposes ce soir ?

-Une jeune photographe très talentueuse, elle est partie en voyage humanitaire cette année et est revenue avec des photos bouleversantes.

-Une photographe ? C'est la première fois que tu en exposes une, non ?

-Oui mais je suis focalisée sur l'art en général, pas seulement la peinture.

-C'est bien de se diversifier de toute façon.

Elle sort définitivement de l'autoroute et s'engage sur une route déserte entourée d'une forêt recouverte des reflets dorées du soleil de fin d'après-midi. Nous parlons de Max, mon meilleur ami depuis aussi loin que je m'en souvienne. Il vient de se faire larguer par sa copine et il est au fond du trou en ce moment, notre amie Abby et moi essayons de le réconforter comme nous le pouvons mais il n'arrête pas répéter qu'il préfère gérer ça seul alors on essaie d'être là sans le couver. Maman me demande des nouvelles de lui tous les jours, il est un peu comme son deuxième fils, même s'il est blanc et que ça ne colle pas trop avec son teint d'afro-américaine. Elle enchaîne sur la prochaine sortie cinéma et sur le dîner de ce soir. Elle énumère les propositions quand le flash des phares d'une voiture me surprennent, une grosse voiture rouge cramoisi débarque à toute vitesse sur la gauche, maman accélère et tente de dévier, sachant très bien que si elle freine la voiture nous percutera de toute façon, mais l'autre voiture est trop rapide.Mon corps entier se crispe. En une fraction de seconde notre voiture est propulsée sur la droite, la voiture n'a même pas le temps de tanguer, elle se renverse rapidement.

Un tonneau. Mon corps percute la vitre qui explose dès que la voiture entre en contact avec le macadam déclenchant l'airbag qui heurte mon front. Je sens une puissante déflagration dans mon cerveau comme si il venait d'exploser sous la pression avant qu'une douleur intense parcourant mon flanc droit me paralyse, des bouts de verre se plantent sur l'arrête de mon nez et sur ma tempe, mon épaule brûle. La douleur est le seul mot qui obstrue mes pensées. Un goût cuivré me parvient aux lèvres, du sang. Maman hurle à plein poumons.

Un deuxième tonneau. Le pare-brise éclate. J'essaie de me protéger des éclats de verre comme je peux et je me rend compte que je ne peux pas bougé mon bras droit. Je tourne la tête vers ma mère qui ne crie plus, son visage est ensanglanté, des bouts de verres maculent l'entièreté de son visage, ses yeux sont ouverts mais complètement vides. Elle ne hurle pas. Elle devrait hurler. Pourquoi je ne crie pas non plus?

Un troisième tonneau. La voiture percute un arbre, mon crâne brûle, je ne vois que du rouge, le rouge cramoisi de la voiture qui prend la fuite au loin, le rouge flamboyant qui dégouline à flots sur mes bras et mes mains. Je détourne le regard pour appeler ma mère mais aucun son ne sort de ma gorge, je tend la main vers elle mais je n'ai pas assez de force pour la toucher ,je tente de rester éveillé pour l'aider mais mes paupières sont lourdes, si lourdes. Je n'arrive pas à les garder ouvertes. Ma vue se brouille, je lutte de toutes mes forces mais l'obscurité m'entraînent  avec elle.

J'ouvre les yeux difficilement, je suis aveuglé par des lumières blanches intenses. J'inspire, j'expire, j'inspire, j'expire, j'inspire et j'ouvre les yeux à nouveau. Je ne ressens rien, rien du tout. Je suis dans un lit d'hôpital. Grand-mère est dos au mur, elle regarde le plafond en croisant les bras. Mon père est là, lui aussi, avec Susan qui est endormie dans un fauteuil. J'inspire, j'expire. Je tourne la tête difficilement quand j'entends une voix étouffée à côté de moi, Max me fixe en pleurs, il me parle mais je n'entends qu'un flot de parole étouffé devenant de plus en plus net au fil des secondes, Abby pose une main sur la mienne en essuyant ses larmes du revers de l'autre. Je ferme les yeux. J'inspire, j'expire. Quand je les ouvre, ils sont tous les cinq autour de mon lit. Grand-mère me fixe tendrement, des larmes perlent au coin de ses yeux. J'ai compris, grand-mère qui pleure, Max et Abby qui pleurent à chaudes larmes, je ne suis pas con. Toutes expressions quittent mon visage. J'enfile un masque impassible et impénétrable, évidemment que j'ai compris. Je regarde Max dans les yeux, puis Abby, ensuite grand-mère. Leurs regards sont pareils, accablés, sombres, plein de pitié. Je tourne la tête vers mon père que je vois pleurer pour la première fois de ma vie. Susan a une main posée sur l'épaule de son mari et l'autre me tient le bras délicatement. Je commence à entendre clairement la voix de Max.

-Alex, tu nous entends ?

Je hoche la tête difficilement et je ferme les yeux. J'inspire, j'expire. J'entends mon cœur battre dans mon bras droit. Mon père pose sa main sur ma jambe.

-Comment tu te sens mon grand ?

C'est quoi cette question ? Je suis dans un lit d'hôpital et ma mère est probablement morte. J'ouvre la bouche pour parler mais rien ne sort. Je parviens à articuler au bout de quelques secondes, d'une voix grave sans aucune émotion, vide de sens masquant un espoir infime.

-Où est-elle ?

Max se laisse tomber dans le siège derrière lui en croisant les bras, Mon père soupire et répond d'une voix brisée.

-Je suis désolé Alex. Il réprime un sanglot. Melissa n'a pas survécu.

J'ai envie de hurler. Maintenant que ces paroles ont été formulées ,je ne peux plus les croire. Ma mère ne peut pas être morte, cet être-humain incroyablement positif, drôle et talentueux ne peut pas juste avoir disparu. C'est impossible qu'elle m'ait abandonné à mon propre sort. Les sanglots de grand-mère se décuplent. Mon père essuie ses larmes  en frictionnant ma cuisse. Je ferme les yeux. Les larmes acides brûlent mon visage. J'entends mon cœur cogner dans ma poitrine, de plus en plus fort, de plus en plus vite. J'espère juste que le marteau-piqueur qui remplace mon cœur va terminer le travail et taper à m'en défoncer le thorax pour faire taire la douleur. Je ne ressens rien physiquement, sûrement à cause d'une bonne dose de morphine mais émotionnellement, la douleur est si vive que je peux à peine respirer, je ne peux pas stopper mes larmes, j'entends Max renifler en sanglotant. Je sais que lui aussi a perdu une mère, je sais qu'il comprend la douleur qui m'empêche de réfléchir rationnellement. Je sers les poings si fort que je sens ma peau se rompre sous mes ongles. Je n'entends plus rien après ça, je décide de m'empêcher d'entendre les voix extérieures essayant de me rassurer alors qu'une phrase m'obsède "Pourquoi elle et pas moi ?".

Mon être entier est remplacé par une colère noire, destructrice, irrationnelle. Une boule de tristesse intense me déchire l'estomac et je m'en veux de ne rien ressentir physiquement, je veux souffrir comme elle a souffert, la rage me dévore de l'intérieur, je finirai par exploser, inexorablement. Je ne connais juste pas encore la date. Je suis devenu une bombe à retardement qui attend que son heure sonne, bien déterminée à tout exterminer sur son passage.

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