La porte du sarcophage se referme avec un chuintement, suivi d'un claquement bref et définitif.
Dans les jeux de mon enfance, le féroce fauve des neiges tombait dans un puits profond, un piège qui l'avalait, creusé dans la couche blanche épaisse. J'applaudissais et riais à la déconfiture du monstre.
Ma satisfaction se fait plus discrète aujourd'hui.
Toutes mes « proies » reposent dans des caissons de suspension comme celui-ci, colis encombrants éparpillés dans des recoins secrets de la galaxie. Sans le savoir, ils ont fini leur existence en dossiers estampillés top secret dans les archives de l'armée fédérale.
En face de moi, l'Autre me regarde, un sourire malicieux à peine perceptible sur les lèvres, ses yeux bleus pétillants d'amusement. Se moque-t-il de cette sensation d'accomplissement que j'éprouve à chacune de ces cérémonies macabres ? Il connaît par cœur ce que je pense... Que je l'imaginerais bien là dans le caisson la prochaine fois, les paupières closes, les drogues figeant son visage en un masque de satisfaction factice, lui conférant une sérénité de pacotille loin de son habituelle ironie mordante.
Mais ce n'est qu'un jeu entre nous, je ne l'envisage pas vraiment. Plus vraiment...
Quelques personnalités majeures au plus haut niveau de l'armée fédérale nous gratifient de leur présence, assistant comme témoins à ce simulacre d'obsèques. Je les vois à peine, comme si son éclat les rejetait dans l'ombre.
- Commandant, il ne vous reste qu'à sceller la procédure de suspension.
J'authentifie ma signature d'une pupille distraite, l'assisticiel me remercie d'une voix synthétique agaçante de féminité mièvre :
- Caisson verrouillé, cryptage de degré sept. Procédure de fermeture de l'enceinte de confinement en cours.
Le tombeau métallique devient pratiquement indestructible une fois clos. Sa façade lisse renvoie la lumière et heurte le regard en le brouillant d'une façon désagréable. Cette sensation presque vertigineuse qui remue l'estomac trahit la présence d'un champ de force ; autonome autant qu'inaltérable, comme le caisson lui-même, il prévient à la fois intrusions et agressions.
L'État fédéral prend tant de précautions que plusieurs niveaux d'autorisation sont requis le jour où une improbable situation nécessiterait le réveil d'un télépathe surpuissant, incontrôlable et imperméable à l'intérêt général. Autant dire jamais.
Il est presque plus facile de fourrer dans un caisson une de ces aberrations de la nature que de l'en faire sortir un jour.
Presque.
Argh... c'est déjà hyper prenant ! J'adore cette ambiance et ce ton (presque) blasé de baroudeur.
Je ne sais pas si le reste est aussi à la premiere personne et au present, mais en tout cas c'est original.
Et la derniere phrase, je l'avais déjà repérée dans le résumé, elle déchire
Je continue !
Oui, c'est au présent et à la première personne, je me suis pris la tête un max au début... (je revenais toujours au passé... )
(et pas qu'avec ça, j'ai une chronologie un peu complexe...)
Coucou Rachael,
État fédéral, télépathes, ça me rappelle quelque chose...<br /> L’assisticiel crée une onde rouge dans mon traitement de texte, mais dans un univers futuriste, on peut bien oser quelques néologismes.<br /> Ce prologue donne déjà un aperçu des activités du narrateur ainsi que de sa relation avec l’Autre. Il laisse aussi entrevoir l’univers dans lequel l’histoire se déroule. En tout cas, il éveille la curiosité.
J’aime bien la description de l’Autre. La couleur de ses yeux me rappelle celle de Naelmo et Kaelán, de même que certains mots ou certaines notions me rappellent les mondes dans lesquels ils évoluent. (Dans les titres de chapitres, j’ai même vu Chuoo.) Alors si on n’est pas dans le même univers, c’est bien imité...<br /> Les rapports sexuels arrivent assez abruptement. Pour le romantisme, on repassera… Mais j’aime bien cette relation tiraillée entre agacement et attirance.
Le climat et les paysages de cette planète ont l’air d’être une illustration du caractère des gens qui y vivent. On dirait que la religion est censée être une affaire privée ou du moins, c’est ce qu’on dit ; pourtant elle semble régir la société. Mais ce genre de contradiction est assez typique des régimes totalitaires.<br /> Après avoir lu Naelmo, c’est intéressant d’être face à cet autre point de vue sur les télépathes : des monstres, des gens irrémédiablement infectés par des esprits nuisibles. Ça va beaucoup plus loin que le fait de se sentir espionné jusque dans ses pensées. <br /> J’ai hâte de savoir comment Sengo a perdu son grade et son honneur.
L’écriture est fluide et à mon avis les informations sont bien dosées ; mais je ne peux pas dire dans quelle mesure le fait que ton univers ne m’est pas inconnu m’aide à comprendre.<br /> Je retrouve ta plume avec plaisir, dans ce monde d’adultes, à la fois différent de celui de Naelmo et similaire. Je n’y vois pas un autre monde, mais plutôt un autre point de vue sur le même univers.
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Coquilles et remarques :
j'aurais traité de fou ou de répugnant pervers celui qui m'aurait dit que je le mettrai un jour dans mon lit [mettrais ; le conditionnel exprime la postériorité]
022ième [normalement, l’abréviation est 022e (voir ici : http://www.academie-francaise.fr/abreviations-des-adjectifs-numeraux); mais c’est peut-être voulu...]
par mille cryptages ou chausse-trappes [l’orthographe classique est chausse-trapes ; avec un seul « p » : ça ne vient pas de « trappe », mais de « treper », qui a donné « trépigner »]
Très littéralement [cette expression me paraît redondante]
il maintient le contact entre nous à minima [comme c’est une locution latine, j’écrirais « a minima », en italique pour qu’on comprenne que ce n’est pas une faute d’orthographe (comme pour « a priori ») ; avec les rectifications orthographiques de 1990, on peut mettre « à »]
La mienne me fut assénée à coup de préceptes [à coups de / j’écris aussi « asséner » (plutôt qu’« assener »), mais c’est l’orthographe rectifiée, qui est bien passée dans l’usage]
Un autre aspect distinctif de Nigato généralement incompréhensible aux étrangers est la façon dont y sont considérés et traités les télépathes. [Ici, je mettrais « généralement incompréhensible aux étrangers » entre deux virgules ; ça change très peu de chose, mais ça facilite la lecture.]
Voilà. Je sais que tu es bien occupée avec le PaCNo ; alors, comme j'essaie aussi d'avancer dans mes projets, je vais lire cette histoire sans me presser.
Oh, mais je n'avais pas vu que tu avais laissé un commentaire, car l'email était parti dans les indésirables :-(
(et avec le pano, je suis un peu moins attentive à ce genre de choses, je l'avoue...)
Bref...
J'espère que cette histoire te plaira; comme tu l'as remarqué, c'est plus adulte dans le style, mais on se trouve bien dans le même univers, avec un autre point de vue. (tout à fait bien vu !)
Comme tu l'as remarqué aussi, la nature (sexuelle) de la relation entre les deux personnages est dévoilée dès le début. Mais il reste toute l'histoire pour savoir comment on en est arrivé là... Mais c'est vrai, le romantisme, l'idéalisation de l'être aimé, toussa, ce n'est pas trop mon truc (ni celui de Sengo) :-p
Merci pour les remarques, je vais aller rectifier tout ça.
Je profite du Club de Lecture pour enfin découvrir le Journal, qui me fait de l’œil depuis un bon moment !
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Coquillettes, pour commencer, parce qu'il faudra pas arrêter de chipoter (… n'est-ce pas ?) :
"le féroce fauve des neiges tombait dans un puits (puit) profond, un piège creusé dans la couche blanche épaisse qui l'avalait." Là, j'ai l'impression que c'est la couche blanche et non le piège qui l'avale ^^
"Sans le savoir, ils ont fini leur existence en dossiers estampillés top secret dans les archives de l'armée fédérale, en colis encombrants remisés dans des consignes automatiques." Je verrais plus un « et » à la place de la virgule, parce que là on dirait que la phrase n'est pas finie.
"Je les vois à peine, comme si sa lumière les rejetait dans l'ombre." La lumière de l'Autre ? Outre le fait que je l'imagine un peu comme une ampoule maintenant, ce n'était pas très clair ^^
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Ce prologue est très alléchant en tous cas ! La fin me donne comme l'impression qu'un de ces caissons va s'ouvrir un jour, mais c'est juste une intuition comme ça XD Et puis ça soulève pas mal de question, comme la nature des « proies » de ton personnage (Sengo, je présume ?) ou sa relation avec l'Autre... sans pour autant perdre le lecteur, parce que tu donnes quand même quelques éléments qui suffisent pour le début.
La narration en « je » passe très bien je trouve, puis ça permet de voir la scène à travers les yeux de ton personnage...
(C'est un détail, mais je tenais à mentionner le fait que j'aime bien le fait que certains mots ne soient pas « expliqués » (comme "assisticiel"), ça fait plus réaliste sans pour autant entraver la compréhension.)
Beau début en tous cas, je file à la suite !
Bon bref, je vois que tu m'as fait des tonnes de commentaires, merci beaucoup !!!
Merci pour les coquillettes, j'ai déjà fait des retouches, sauf sur "puits", qui a toujours un s;
La narration en je au présent, c'était une expérimentation, ça a été compliqué au début, mais j'ai finalement beaucoup aimé.
Bon, allez, moi aussi je file à la suite des commentaires !
Bisous !
Keina
A un de ces jours alors !
Bises
Elka m'a dit tant de bien de ton histoire que j'ai pas pu résister longtemps, surtout avec les votes pour les Plumes à lire qui ne dureront pas éternellement ! Je me suis dit qu'il était donc tant de plonger dans ton univers.
Je suis une grande fan de SF et j'adore déjà l'ambiance que tu instaures dans ce premier chapitre. Y'a une menace qui plane à l'évocation de ces télépathes, même si la scène en elle-même ne présente aucun danger.
L'Autre est donc lui-même télépathe ? Il bénéficierait d'un accord pour ne pas être traqué comme les autres ? Bon, je suppose qu'il est un peu tôt pour commencer à essayer de tout démêler, alors je vais simplement poursuivre ma lecture !
Je tiens aussi à te dire que tu as une super plume ! J'en doutais pas un instant, mais vraiment, tu écris très très bien, il a suffit de cette petite intro pour m'en apercevoir ! (ce qui me rend d'autant plus impatiente de recevoir Arthen !)
A très bientôt =D
Si ce prologue t'intrigue et que tu te poses mille questions, alors il atteint son but. (et du coup, je ne vais pas répondre, hein !? )
J'espère que la suite de l'histoire te plaira également.
Elle est très différente d'Arthen dans le style et le public visé, ici, c'est nettement plus "cru" dans le ton, et écrit à la première personne au présent, ce qui sonne très différent. J'expérimente...
Et merci pour les compliments :*)
"Il connaît par cœur ce que je pense... que je l'imaginerais bien là, dans le caisson, la prochaine fois... Les paupières closes, le visage détendu par les drogues, lui donnant un air de satisfaction factice, une sérénité de pacotille, loin de son habituelle ironie mordante." Je pense que tu peux faire une seule phrase sans craindre la longueur : Il connaît par cœur ce que je pense... Que je l'imaginerais bien là, dans le caisson, la prochaine fois, les paupières closes, le visage détendu par les drogues, lui donnant un air de satisfaction factice, une sérénité de pacotille, loin de son habituelle ironie mordante. (J'aurai plutôt vue découpé comme ça (?).)
"Mais ce n'est qu'un jeu maintenant entre nous, je ne l'envisage pas vraiment, plus vraiment... "
Et là, plutôt comme ça (mais je chipote...) Mais ce n'est qu'un jeu maintenant entre nous, je ne l'envisage pas vraiment. Plus vraiment...
Des télépathes !! Chouette !
J'aime beaucoup de prologue qui suggère un certains nombre de choses (relation ambigue entre le signataire et l'Autre, peur des télépathes, considérés comme des monstres (d'ailleurs ça me rappelle qu'au tout début, le père de Louis était télépathe, mais j'ai finalement supprimé ce truc là pour faire plus simple, car moi, je ne maîtrise pas comme toi ce monde là :)), possibilité de les réveiller, ce qui nous renseigne sur le fameux sarcophage/caisson, présence d'un état fédéral et d'une armée qui semble pleine d'autorité, bref, en peu de mots tu réussis à m'apâter, à me faire me poser dejà des tas de questions et donc à avoir envie de voir la suite. Bravo ! Quant à l'écriture, je retrouve ton style, qui s'affirme de plus en plus.
À bientôt (je ne pense pas repasser ce week-end qui est, comme tu sais bien occupé)
Oui, tu vois, encore des télépathes, je ne sais pas m'en passer... Tant mieux si ce prologue suscite des questions (j'espère que la suite y répondra de manière satisfaisante), et s'il te donne envie de poursuivre.
C'est d'ailleurs une des questions que je me pose : jusqu'ou expliquer les choses, sachant que pour le narrateur, certaines choses vont être impossible à expliquer (on comprendra pourquoi), et d'autres au contraire vont de soi et il ne verrait pas l'intérêt de les expliquer. C'est un des pbs de la narration à la première personne, mais il y a évidemment d'autres avantages par ailleurs...
En effet, on devine une relation compliquée entre le narrateur et l'Autre. Cette relation et son évolution sont des éléments importants de l'histoire (je n'en dis pas plus pour ne pas trop dévoiler...)
C'est rigolo ce que tu dis sur le style, parce que j'avais l'impression qu'étant au présent et à la première personne, avec les contraintes un peu différentes que ça implique, ça allait "sonner" de manière différente de ce que j'écris habituellement, dans Naelmo ou Arthen.
Merci pour la ponctuation, c'est en effet mieux comme tu le suggères (bah, tu sais que j'aime bien qu'on chipote !) :)
Merci pour ce commentaire et bonne fin de weekend !
Et j'aime bien!
Salut Rachael :) Bon ce n'est qu'un prologue mais cette histoire de chasseurs m'a l'air bien intéressante. Je vais attendre la suite :D
Céline
J'espère que la suite te plaira aussi. A ce stade, en effet, on ne peut pas trop se faire une idée encore.
Comme je le dis dans mon journal, ca me change complètement de mes écrits précédents, que ce soit au niveau sujet, audience, style... J'expérimente !
Merci de ton passage :)
Je profite des Histoires d'Or afin de découvrir ton histoire. J'ai trouvé que ce prologue se lisait tout seul, qu'il parvenait à m'intriguer et que c'était très bon signe. Je suis curieuse d'en apprendre plus sur ton univers, mais aussi sur l'Autre que le Commandant aurait bien mis dans un caisson. Je sens qu'une grande relation les unit tous les deux, pleine de prommesses pour l'avenir...
Je la sens bien cette histoire, alors je vais poursuivre tranquillement l'aventure ! Prologue réussi en tout cas !
Eh ben quand tu t'y mets... Merci d'être venue pointer ton nez ici !
L'idée c'était bien d'essayer d'intriguer par ce prologue, tant mieux si ça a marché pour toi ;-)