Régions inconnues 10 après Yavin
Il sentait un liquide chaud couler sur son front, glisser sur son nez et s'échouer sur le carrelage glacé. Petit à petit, il avait ouvert les yeux et il distinguait à peine la pénombre tant sa vision était trouble.
Depuis combien de temps était-il là, sur le sol ?
Il puisa dans toutes ses forces pour se redresser doucement. La tête lui tournait et il fut pris d'un vertige qu'il essaya de contrôler en fermant les yeux. D'un revers de manche, il frotta le sang qui avait coulé sur son visage.
Armitage était seul et semblait avoir perdu conscience depuis déjà une bonne heure. A cet instant, son esprit se remit en route et il s'inquiéta : qu'allait dire son père s'il ne le voyait pas dans sa chambre?
Encore un dernier effort et il se redressa sur ses jambes cotonneuses.
Malgré la douleur, il était obnubilé par l'idée de rentrer le plus vite possible dans ses appartements. Marchant aussi vite qu'il put, se rattrapant ça et là contre le mur. Son cœur battait la chamade, se pourrait-il que Millicent soit retournée dans sa chambre ? Il l'espérait de tout cœur, d'autant qu'il avait laissé un entrebâillement à la porte pour lui permettre de rentrer.
Mais ce qu'il vit lorsqu'il finit par arriver chez lui le fit tressaillir.
il était là, assis sur la chaise de bureau.
« Où étais-tu ? » La voix de Brendol Hux était aussi sinistre que le personnage lui-même. Il avait fait fit du sang qui coulait du front de son fils, et même de son état général, seul comptait le fait qu'il n'était pas là lorsqu'il devait l'être.
Armitage referma la porte, baissant les yeux au sol, paniqué. Il entendit le froissement de l'uniforme de son père qui s'était levé de sa chaise pour s'avancer vers lui.
« OU ETAIS-TU ?! » hurla-t-il, insistant sur chacun de ses mots.
Le jeune garçon était mort de trouille, mais il ne devait rien laisser paraître, il savait que ça serait bien pire sinon.
« Je... »
Il n'eut pas le temps d'achever qu'il sentit déjà la poigne de son père l'attraper par le col et le plaquer au mur.
« Dépêche-toi, je perds patience ! »
Le jeune garçon ne savait que répondre, le visage de son père était si proche du sien qu'il pouvait sentir sa respiration nerveuse.
« Je...J'ai été piégé. J'ai... Archex m'a frappé, je me suis évanoui, je...n'ai pas vu...je suis désolé. »
Il était désolé, mais désolé de quoi ? Désolé d'avoir voulu retrouver Millie ? Désolé d'avoir été frappé et abandonné là comme un cadavre ? Désolé d'être arrivé en retard ou désolé de décevoir à nouveau ?
« T'es en train de me dire... » commença Brendol sur un ton méprisant, ne relâchant pas sa prise. « Que tu es en retard à cause d'Archex ? »
Armitage ne répondit pas. Il n'y arrivait simplement pas. Choqué par le fait que son père semblait plus en colère encore par le fait que son fils dénonce les maltraitances de Cardinal que par son retard.
« Père ...je... » il suffoquait, la prise de Brendol s'était renforcée sur son cou et il ne parvenait plus à respirer normalement.
Il le plaqua sur le sol !
« Ne remet pas ta faiblesse et tes erreurs sur le dos d'Archex !!! » hurla-t-il . « Tu n'es qu'un lâche, un incapable ! »
Son corps ne répondait plus, chacun de ses mouvements étaient douloureux. Il essaya de se mettre sur le dos, afin de regarder le plafond et son père, mais alors qu'il essaya de se retourner, il sentit un violent coup de pied s'enfoncer dans son estomac. Il en eut le souffle coupé et toussota pour reprendre son souffle.
« Tu as intérêt à ne plus commettre la même erreur, fils, ou la prochaine fois, ça sera bien pire encore. »
Il claqua la porte derrière lui, laissant l'enfant seul avec sa douleur. Pas un seul moment il ne lui avait demandé s'il allait bien. Que du contraire, il avait jugé bon de le frapper à nouveau.
Comme si ce qu'il avait vécu n'était pas suffisant.
Armitage vit au loin une petite boule rousse sortir de dessous de son lit, il ferma les yeux, soulagé. Elle au moins était revenue, elle au moins ne l'abandonnerait jamais. Il n'avait pas fait tout ça pour rien.
Il regarda une dernière fois le plafond de sa chambre, se sentant à nouveau pris d'une violente nausée. Il avait beau avoir l'habitude de cette vie, il ne parvenait pas à se faire à l'idée que tout ce qu'il vivait étaient juste.
« Je les déteste... » souffla-t-il. Et il ferma les yeux, espérant qu'un jour le destin finirait par faire tourner la roue.
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Donnagher – Maintenant
Elle était revenue le cœur chargé d'émotion. Assise à son pupitre, elle faisait balancer le pendentif de Cardinal le long de sa chaine, tel un pendule qui semblait l'avoir hypnotisée. Mais Enael n'était plus là. Depuis sa discussion avec Vi Moradi, elle ne parvenait pas à se détacher de l'idée qu'Armitage Hux ait du sang sur les mains dans cette affaire.
Bien sûr, Phasma aussi était responsable, mais pour elle, l'idée qu'elle ait pu tuer quelqu'un lui semblait davantage logique. Mais comment un homme comme Hux pouvait-il être impliqué dans la mort de son propre père ? Comment pouvait-on participer à la mort de son père ? Tout cela la dépassait.
Et elle repensait sans cesse à lui, à ce qu'ils avaient vécu tous les deux et au fond d'elle, elle avait toujours été certaine qu'il cachait beaucoup de chose derrière ce masque impassible et impitoyable. Mais elle était à mille lieues d'imaginer que c'était aussi grave.
Enael essaya de retrouver ses esprits ayant du mal à se dire qu'elle s'était trompée à ce point sur quelqu'un. D'habitude, elle avait tendance à percer rapidement les barrières des autres, étant sensible à ce qu'ils vivaient, à ce qu'ils ressentaient. Mais dans le cas d'Armitage Hux, elle semblait désemparée, car bien incapable d'en faire autant. Il était si difficile à comprendre qu'il la décontenançait et l'idée qu'il ait pu commettre une telle chose la plongeait dans un profond désarrois. Elle continuait d'observer la plaque militaire de Cardinal en repensant à ce que Moradi lui avait dit. Étrangement, l'amirale avait de la compassion pour cette rebelle et un profond respect pour sa force de caractère. L'idée qu'elle ait sauvé ainsi la vie de son tortionnaire en lui pardonnant tous ses méfaits relevait à ses yeux d'un exploit militaire.
« J'ai bien peur que maintenant, je sois obligée de tout comprendre... » souffla-t-elle à elle-même alors que la chaine se balançait encore devant ses yeux. "J'ai ouvert la boîte de Pandore..." ajouta-t-elle en repensant à ce que lui avait dit Lewis. Mais cette plaque ne semblait pas apporter beaucoup de réponse. Et tandis qu'elle la fit glisser entre ses doigts, essayant d'extérioriser sa nervosité, elle se dit qu'elle pouvait encore faire marche arrière. Annoncer à Pryde son échec à découvrir la vérité et en rester là.
Mais soudain, elle cessa de faire tourner la plaque entre ses doigts et se mit à l'examiner. Son regarde se fixa sur un détail étrange. Si ses yeux ne distinguaient rien, elle repris son rituel : glissant l'objet entre ses doigts, la tournant dans tout les sens, touchant délicatement sur le métal lisse à plusieurs reprises. Et alors qu'elle sentait la froideur du métal sur sa peau, l'amirale fut saisie d'une étrange frénésie. Précipitamment, elle se jeta sur le meuble à tiroirs et commença à ouvrir chacun d'entre eux, les retournant presque tous. Ne trouvant pas ce qu'elle cherchait, elle retourna à son bureau et le fouilla de fond en comble, levant les feuilles qui s'étaient accumulées depuis des semaines. C'est là qu'elle finit par trouver la lunette grossissante qui trainait et, allumant la lumière du pupitre, elle se pencha sur la plaque en métal tout en posant la lunette sur ses grands yeux bleus.
« Bordel ! » souffla-t-elle, en sautant hors de son siège. Elle sortit précipitamment du bureau, tenant le pendentif dans une main et la lunette dans l'autre, traversant les couloirs en saluant rapidement chaque membre de l'équipage qu'elle croisait. Elle devait trouver Lewis et celui-ci était probablement au poste de commandement à l'heure qu'il était.
Lewis regarda l'amirale arriver le pas hâtif d'un air suspicieux. Elle semblait arborer un regard vif du chasseur qui avait flairé une proie. Quoi qu'il en soit, il savait que lorsqu'elle déboulait comme ça sans crier gare, cela n'annonçait que des rebondissements.
Elle brandit le pendentif devant ses yeux.
« Je peux savoir où est le souci, amirale ?
- Vous ne voyez rien hein ? Non bien sûr, on est tous passé à côté ! »
Elle resserra le pendentif et la chaine dans son poing.
« Vous vous souvenez de cette manie que vous détestez ? » lui avait-elle lancé en s'installant sur un des pupitres du poste de commandement. Lewis savait très bien de quoi elle parlait. Depuis qu'il travaillait ensemble, il avait noté chez elle quelques tics nerveux parfois agaçants. Parmi eux un l'insupportait grandement : lorsque sa supérieure était contrariée, elle avait tendance à ne pas savoir restée les mains vides. Aussi saisissait-elle tout ce qui était à portée de ses mains pour s'occuper l'esprit. L'ennui était que souvent, une fois sa crise passée, elle abandonnait là le malheureux objet sans vraiment le remettre à sa place. Chose qui insupportait Lewis et son grand sens du rangement et de l'organisation. Il s'était déjà permis une ou l'autre remarque qu'Enael avait pris à la plaisanterie, sachant qu'elle ne pouvait rien faire contre ça.
« Qu'avez-vous donc fait cette fois ? » lança-t-il sur le ton de la plaisanterie.
« La plaque, j'ai...j'ai touché cette plaque et ...j'ai senti un truc...bizarre.
- Bizarre ?
- Une plaque, faite en une seule fois est lisse et sans rebord, sauf qu'ici j'ai senti quelque chose d'inhabituel... Et du coup, j'ai pris cette lunette pour regarder de plus près.
- Un défaut de fabrication est tout à fait possible, mais...
- Non, c'est différent, c'est extrêmement fin, mais il y a une irrégularité, ici sur ce bord !» Elle désigna le bord inférieur de la plaque et Lewis y jeta un oeil d'un air suspicieux sans pour autant s'en approcher.
« Lewis, cette plaque n'est pas faite d'un seul bloc. Il y a deux parties et elles sont soudées ! »
Le capitaine sursauta surpris, elle avait éveillé définitivement sa curiosité et il s'approcha du bureau.
« Êtes vous certaine de ce que vous dites ? »
Pour simple réponse, Enael lui lassa sa place sur le pupitre et lui tendit la lunette.
« J'en suis sure ! » lança-t-elle. « A l'œil nu, ça passe inaperçu, mais aux lunettes on voit sans peine la soudure, là. » Elle avait du mal à contenir son enthousiasme en montrant le bord du doigt.
Lewis y jeta un œil rapidement avec la lunette que lui avait tendu son amirale. Puis lança un regard dubitatif.
« Pourquoi soudé deux plaques ensembles ? » souffla-t-il.
Enael lui répondit d'un regard malicieux, laissant le cerveau de son capitaine en ébullition, un sourire s'afficha sur ses lèvres lorsqu'elle vit son regard s'illuminer.
« Il y a quelques choses entre les deux plaques ! » S'exclama-t-il comme s'il avait trouvé un trésor.
L'amirale avait du mal à contenir son enthousiasme, elle agita le doigt vers son capitaine avec un sourire espiègle. « Bingo ! » s'était-elle exclamée.
Et sans un mot, Lewis quitta le poste de commandement à la hâte, laissant la chaine sur le bureau. L'amirale comprit très vite ce qu'il avait en tête lorsqu'elle le vit revenir avec un appareil de dessoudage.
« Il faut délicatement faire fondre cette partie-là » souffla-t-il.
Spencer hocha la tête, tremblante d'excitation. Elle avait l'impression que Lewis était en train d'ouvrir son cadeau d'anniversaire. Elle laissa faire l'expérience de son capitaine et s'écarta légèrement lorsqu'il mit des lunettes de protection. L'amirale craignait qu'avec l'excitation elle ne parvienne à faire une bourde et à endommager ce qu'il y avait à l'intérieur des deux fines plaques métalliques.
Lorsque les deux plaques se détachèrent d'un coup net, elle distingua le contenu: une micro-puce fixée au centre de la plaque où était gravée son nom. C'est un microprocesseur tellement petit qu'il ne pouvait être extrait sans une pince. Tous deux regardèrent leur trouvaille ébahis, et Lewis ne put contenir son émotion.
« Merde alors... » souffla-t-il. Enael le regarda décontenancée. Avait-elle déjà entendu Lewis juré une seule fois depuis tout ce temps.
« Oh... »Souffla-t-il en se rendant compte que c'était peut être la première fois qu'il jurait devant sa supérieure. «On va mettre ça sur le dos de l'émotion! » fit-il en haussant les épaules, elle lui répondit par un sourire. Pas de doute que le Donnagher et son équipage avaient été faits pour elle. Ou plutôt, qu'elle avait été faite pour ce vaisseau depuis toujours. C'était là qu'elle devait être.
« Sergent ! » s'exclama-t-elle, et une jeune femme apparut, les cheveux blonds attachées en arrière par un stylo, elle prit les lunettes et observa attentivement l'objet qui était devant elle.
« C'est... un processeur d'enregistrement vocal extrêmement discret. » lança le sergent abasourdi. « J'en ai rarement vu comme ça, mais ils existent. »
Enael sentit son sang descendre dans ses jambes. Elle avait devant elle un enregistrement vocal de Cardinal en personne.
« Est-ce possible de...l'écouter ? » Bien qu'elle se demandait vraiment si c'était une bonne idée, sa curiosité avait vaincu sa raison. Maintenant l'objet en sa possession, Enael n'avait d'autre choix que de l'écouter.
Le sergent hocha la tête. « Oui Madame, il y a un lecteur dans tous les vaisseaux amiraux.
- Faites le venir dans mon bureau !
-En réalité Madame, il y est déjà. Seuls les amiraux qui y ont accès. »
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Enael était là, seule, dans son bureau. Elle avait pris place sur le rebord de la fenêtre et regardait l'espace qui s'étendait à travers la vitre. L'immensité de la galaxie parvenait à lui faire oublier l'énorme angoisse qui l'avait saisi à la gorge depuis qu'elle avait le microprocesseur en sa possession.
Entre ses mains, se trouvait probablement toute la vérité.
Elle avait glissé la micropuce dans l'appareil et avait écouté avec attention les conseils du sergent. Quand elle l'avait remerciée, la jeune femme était partie, mais Lewis avait voulu s'attarder un peu plus.
« Êtes-vous sure de vouloir écouter cela seule ? » Lui avait-il demandé. Lewis était inquiet, il craignait que le contenu de l'enregistrement ne soit pas agréable à entendre.
Elle avait hoché la tête.
« Maintenant oui... » souffla-t-elle. « Vous m'aviez dit que si j'ouvrais votre dossier j'ouvrais la boîte de Pandore n'est-ce pas ? Peut-être est-ce le moment pour moi de la refermer. »
Lewis avait hoché la tête, ajoutant qu'il n'était pas très loin et avait fini par partir lui aussi.
Elle était seule, face au possible dénouement de cette enquête. La fin d'une époque, la fin de plusieurs mois de travail acharné à vaciller entre découragement et adrénaline.
* Il est trop tard maintenant pour reculer, Nell, souffla-t-elle doucement à son esprit. * Elle posa doucement le doigt sur le bouton d'activation et ferma les yeux lorsqu'elle exerça une délicate pression dessus.
Son souffle se coupa.
« Comment as-tu pu ? »
Une voix grave s'échappait du haut-parleur. Elle découvrait pour la première fois la voix de l'homme sur lequel elle avait enquêté depuis tout ce temps. Il y avait quelque chose de sévère et de triste dans l'intonation de sa voix. Elle ne s'attendait pas à ce genre d'intonation venant de lui. Longtemps, à travers les dossiers et les dires des cadets, Enael s'était fait une image de cette homme et entendre cette voix lui donnait une étrange sensation.
A qui parlait-il ?
« C'était ton père... Il... » la voix de Cardinal s'éteignait et le cœur d'Enael se serra lorsqu'elle comprit à qui s'adressait ce message.
Ce message s'adressait à Armitage Hux.
« Je sais tout désormais, je sais comment Phasma a accédé à ce titre, je sais ce que tu lui as promis si elle faisait ça. Tu n'es qu'un lâche Armitage, un lâche comme tu l'as toujours été. Un petit être qui n'aurait jamais dû naître et qui survit qu'aux détriments des autres. Ton père avait raison sur toi ! T'as même pas eu les couilles de lui régler son compte toi-même ! »
Une larme perlait sur ses joues. Son corps tout entier s'était mis à trembler. Toute cette haine dans quelques phrases lui donnaient le tournis. Cardinal détestait Hux de tout son être, elle le sentait dans chacun des mots qu'il prononçait. Elle était saisie d'une intense tristesse qu'elle était incapable de comprendre. Si pour le moment le message n'indiquait rien sur ce qui était arrivé à Cardinal, il indiquait beaucoup de chose sur le passé d'Armitage Hux. Alors ils se connaissaient ? Et son père le détestait si fort que cela ? Comment cela était-il possible ? Enael avait déjà entendu beaucoup de chose sur le passé du général, elle savait que sa naissance n'était pas noble et qu'il avait du se battre pour se faire une place dans le monde, mais elle était loin de s'imaginer à quel point ...
« Les coups que t'a pris t'ont visiblement pas suffi à comprendre ce qu'était le respect... J'aurais dû te buter quand j'en ai eu l'occasion... » continua le stormtrooper à l'armure rouge.
Enael avait le coeur au bord des lèvres et elle ne parvenait plus à contenir ses sanglots. Pourquoi pleurait-elle ? Pourquoi n'arrivait-elle pas à se calmer ? Elle avait l'impression que toutes ses insultes étaient pour elle. Elle n'arrivait pas à supporter...
L'idée qu'on puisse parler de Hux comme ça.
« Comment pourrais-je continuer à servir cette bannière que tu commandes ? Comment pourrais-je continuer à servir au nom de ton père alors que désormais tu es là ? Comment pourrais-je continuer à supporter d'être sous ton autorité ? Tu as tout gâché ! Tout !
Mais vous le payerez, toi et Phasma. Tu veux que je te dise ? Tu n'écouteras sans doute jamais cet enregistrement, mais aujourd'hui Phasma vit ses derniers instants et je foutrai le camp d'ici lorsque je la verrai morte. Quant à toi... Tu ne vaux même pas la peine !
...Si cet enregistrement est entendu un jour, j'espère que celui qui l'écoutera comprendra la vérité et qu'il la fera éclater au grand jour. Tu ne mérites rien de plus que la honte! »
L'enregistrement se coupa et Enael fit tomber le lecteur au sol, posant ses mains sur son visage pour contenir ses larmes. Pour elle, cet enregistrement ne lui prouvait pas seulement la culpabilité de Phasma, il lui balançait à la figure qu'elle s'était peut-être totalement trompée en pensant qu'Armitage Hux n'avait été qu'un privilégié dissimulé dans les régions inconnues après la chute de l'empire.
Qu'il avait fait assassiner son propre père.
Qu'il était peut être un monstre comme tous les autres.
Mais pourquoi pleurait-elle vraiment ? Était-ce pour cette raison ? Ou n'avait-elle simplement pas supporter la façon dont cet homme parlait ?
Elle était incapable de voir clair dans son esprit embrumé par les émotions. Elle était noyée tout simplement, arrivant à peine à retrouver son calme.
Lewis avait entendu un bruit sourd et s'était permis d'ouvrir la porte. L'inquiétude l'avait submergé lorsqu'il avait vu la silhouette de l'amirale recroquevillé sur le rebord de la fenêtre, saisie de temps à autre de légers soubresauts.
« Tout va bien, amirale ? »
Elle releva les yeux, rougis par les larmes.
« Visiblement, non... » souffla-t-il en fermant la porte dans son dos. Il s'avança doucement vers elle, puis sachant quoi faire dans ce genre de situation, s'en alla vers la bouilloire et lui versa sa boisson favorite. Le thé amer infusait doucement lorsqu'il posa la tasse à côté d'elle et il vint s'installer à ses côtés. L'amirale le remercia d'un hochement de tête avant de regarder à nouveau dans le vide.
« Comment ai-je pu être aussi bête ?
- A quel propos ? »
Elle marqua une courte pause. En vérité, elle ne savait pas vraiment que répondre à Lewis, car elle n'arrivait simplement pas à exprimer davantage ce qu'elle ressentait. Tout était bien trop fouillis.
« Vous aviez raison, parfois la vérité n'est pas ce qu'on rêverait entendre...
- On ne la dissimulerait pas autant si c'était le cas, Madame. »
Ils restèrent un instant silencieux. Elle repensait à tout cela et se demandait si ça avait un sens. Rien n'avait de sens. Pourquoi lui avoir demandé de courir après un fantôme? Pour découvrir ça ? Pour qu'elle abandonne ? Pour qu'elle ouvre les yeux sur les personnes qui l'entourent ? A moins que le but était bien plus vicieux..
Lewis sourit. Elle le touchait au fond de son cœur. Cette jeune femme était tellement clairvoyante lorsqu'il s'agissait de comprendre les autres.
Mais incapable de comprendre son propre cœur.
Elle était désemparée lorsque les choses ne se déroulaient pas comme prévu, lorsqu'elle était submergée par les émotions et qu'elle ne parvenait plus à raisonner correctement.
« Je pense que vous êtes submergées par vos émotions. Si je pouvais vous donner mon avis, vous devriez tirer les derniers détails au clair et faire votre rapport au plus vite. En finir avec ça nous fera le plus grand bien. Vous prenez vraiment cette affaire beaucoup trop à coeur.
- Je n'en sais rien... » souffla-t-elle en prenant une gorgée de son thé. « Je ne sais plus trop quoi penser à dire vrai.
- Vous avez besoin de repos. Prenez le temps de réfléchir. Après tout, cette histoire dure depuis des mois, alors autant attendre encore un ou deux jours de plus, non ? »
Elle sourit. Lewis avait le don de dédramatiser la situation et cela lui faisait du bien. A ses yeux, désormais il fallait tirer certaines choses au clair et dresser un rapport précis et honnête de l'affaire Cardinal. Bien qu'elle ne sache toujours pas où il était à l'heure qu'il était, Enael restait persuadée que le nœud du problème ne se situait pas là. »
« Avec tout ça, j'ai oublié de vous remercier Lewis... » souffla-t-elle doucement en faisant tourner sa tasse entre ses doigts. Le capitaine tourna la tête vers elle, l'air surpris.
« Me remercier, Madame ? » Le ton de sa voix trahissait son étonnement. Il savait que l'amirale avait la gratitude facile, mais ne semblait pas avoir fait quelque chose d'extraordinaire ces derniers temps. Cette conversation n'était qu'une simple formalité et il avait trouvé cela normal de l'aiguiller lorsqu'elle doutait.
« Eh bien... Pour le traceur dans la poche de ma combinaison !! Sur Jakku ! Vous ne vous en souvenez pas ? »
Lewis semblait désarçonné. Pourquoi avait-il l'air si troublé ? Son capitaine ne se souviendrait-il pas de cette mission catastrophique avec le capitaine Phasma ?
« Mais je n'y suis pour rien Amirale, je n'ai pas mis ce traceur dans votre poche. »
Enael cessa de respirer. Sentant des picotements la parcourir de la tête aux pieds. Pendant tout ce temps elle avait cru que Lewis avait glissé ce traceur dans sa poche. Et alors qu'elle était encrée dans ses certitudes, tout s'effondrait.
« Je pensais qu'au vu de la haute considération qu'avait le capitaine Phasma à votre égard, vous aviez jugé bon de prendre ce traceur avec vous. » Lança-t-il.
« Non... » souffla-t-elle. « Je n'y avais pas pensé... » ses paroles ressemblaient bien davantage à un soupir. Si Lewis n'y était pour rien et qu'elle non plus, qui avait pu mettre le traceur dans cette poche ? Et alors qu'elle resta figée un instant à regarder le vide, elle repassa l'ensemble des évènements qui s'étaient déroulés avant son départ en mission avec Phasma.
Jusqu'à cette altercation avec lui.
Elle en lâcha sa tasse qui tomba sur le sol en mille morceaux.
Comment a-t-elle pu être aussi stupide ?
« Tout va bien Amirale ? » lança Lewis, très inquiet de voir sa supérieure si déstabilisée. Elle était devenue livide et il avait l'impression qu'elle n'était plus avec lui, qu'elle avait perdu connaissance tout en gardant les yeux ouverts.
« Je dois y aller, Lewis. » se contenta-t-elle de dire.
« Mais où ça ? » lança-t-il. Mais il n'eut jamais de réponse. Comme hypnotisée, elle avait quitté la pièce sans même tenir compte de sa présence. Elle s'était déjà engouffrée dans les couloirs du Donnagher. Ne prêtant plus attention à ce qui se passait autour d'elle.
Seule comptait sa destination.
Le Finalizer.
J'aime beaucoup le parallèle où Enael se demande comment Hux aurait pu tuer son père et au vu des scènes en flashback, ça paraît pas aberrant. Je me demande encore tout ce qui a bien pu se passer (et je me dis que j'aurais des réponses dans le chapitre suivant, lors d'une confrontation avec Hux), mais beaucoup de possibilités sont envisageables ! :3
Et sans compter qu'il y a aussi le parallèle avec Vi (j'ai un doute sur son nom >.<) dans les chapitres précédents sur le fait d'aimer un monstre. Je me dis que peu importe ce qu'il s'est passé, on ira chercher l'humanité derrière chacun.
Je m'attends à une bonne confrontation du coup avec tous ces éléments en tête. :')
Et je me demande si Hux n'est pas responsable pour le traceur héhé :D
Pour les corrections :
- "Ne remet pas ta faiblesse" > remets*
C'est exactement ce qui se passe entre Vi et Cardinal et aussi entre Spencer et Hux. Elle cherche à comprendre, alors qu'elle pourrait se contenter de croire que c'est une enflure. Elle veut passer au dessus. Ça sera le problème de toute sa vie.
Le traceur ? Quel traceur ? *Sifflote*
J'adore tellement ce genre de parallèle, surtout qu'il a un impact dans ce que j'ai lu dans la suite héhé :')
Ce fameux traceur, du coup, j'ai eu ma réponse en continuant ma lecture XD
Est-ce que les sentiments de Hux envers Enael sont si forts qu'il risquerait sa propre vie pour elle en mettant une puce ? En mettant une puce, il avait donc une idée de ce Phasma allait faire alors...
L'enchainement des paragraphes est parfait pour créer un suspense, j'ai l'habitude de lire des livres avec un seul narrateur et je dois dire que j'aime bien ça ! Bien sûr, il faut se souvenir des années et des endroits pour savoir exactement quand ça se passe. Disons que si c'était une télévision, ça passerait crème, mais là heureusement que j'ai une bonne mémoire.