Bon, je vais être honnête avec toi…Tu permets que je te tutoie? Oui, je te parle à toi : le lecteur. Je sais, on ne se connait pas encore, mais comme je m’apprête à étendre ma vie comme une tartine de beurre de peanuts, je préfère rendre les choses moins officielles. Donc; honnêtement, le titre Dijon et Daron, ce n’est pas ma meilleure idée. Je sais, c’est plutôt nul. Dijon : Je n’ai jamais visité la ville et je n’ai rien contre la moutarde, je te jure qu’il n’en sera pas question dans le livre. Daron : Une expression beaucoup trop « française » qui n’existait même pas à l’époque où se déroule mon histoire. En plus, mon daron (mon père) n’a rien à voir avec mes aventures… Alors tu vas me demander : « Pourquoi D&D (Dijon et Daron)? » Seulement une précaution pour éviter les poursuites pour droits d’auteurs par la méga corporation « Wizards of the Coast* » propriétaire du jeu Donjons & Dragons…
Maintenant que tu es averti, Je commence mon histoire. Revenons à mon père. Pour être franc, c’est quand même par sa faute si je me retrouve là. Il a décidé pour un Xième fois de changer d’employeur. À chaque fois, ça bouscule tout. On change de ville, de maison, d’école, d’amis. Lui, il doit s’en foutre de ses amis, mais moi? En plus, je ne comprends même pas ce qu’est sa job « directeur des ressources humaines ». S’il était médecin, architecte ou bien comédien, j’dis pas… donc, je me retrouve là, caché en arrière de mon toupette à regarder défiler le paysage. La fourgonnette file vers Québec dans un roulement bruyant. C’est fou, je me sens seul, mais la voiture ressemble à un autobus qui déborde de monde et de bagages entassés. Premier rang : mes parents tentent de discuter ensemble. Deuxième banquette : mes deux petits frères bouchent les derniers espaces avec leurs chicaneries. Troisième banquette à gauche : mon grand frère, les écouteurs sur les oreilles, écoute en boucle sa cassette de U2. À droite : j’ai les genoux pliés sous le menton à cause des boites empilées dans l’allée. C’est ma place habituelle, Je me retrouve toujours les cannes entortillées dans le sac de piscine ou squeezées contre la glacière, mais là, c’est pire que d’habitude, on déménage.
Pour me désennuyer du trajet interminable, je fuis. Je suis un expert de la fuite. Derrière mes yeux rivés à la fenêtre, je plonge dans mes rêvasseries, dans les profondeurs abyssales de mon crane. Pour le moment, je m’amuse à faire courir un gymnaste imaginaire. Je le fais bondir de cabanon en maison, se balancer entre les toits, gravir les immeubles, parcourir à une vitesse folle les obstacles qui bordent la route. J’aime inventer, créer, imaginer. C’est pratique quand tu es tout seul. Plus besoin de penser… même pas besoin d’angoisser.
Je vais te paraitre bizarre, mais je crois que j’ai toujours esquivé la réalité. La preuve? Mon plus ancien souvenir : je devais avoir trois ans, ma mère me gronde pour je ne sais plus quelle raison et m’envoie réfléchir dans ma chambre. Résultat? j’en profite pour découvrir qu’à travers mes larmes, les lumières forment des étoiles modulables lorsque l’on plisse les yeux. Wow, je gage que même Einstein n’a pas réfléchit à cette propriété de la lumière. Évaporée la pépeine! Sérieux, je suis vraiment un maitre de l’évasion.
Autre petit jeu désennuyeux : Si un jour tu te retrouves sur la banquette arrière, entre ta tante dormante et ta grand-mère ronflante, ou bien coincé entre deux bancs de bébé, imagines le rétroviseur en soucoupe volante. En bougeant la tête de gauche à droite, tu peux la déplacer pour éviter les fils électriques et les poteaux; Petit conseil, assures-toi que ton père ne te surprenne pas lors de tes ondulations de cobra… c’est gênant.
Cap-Rouge. Quand j’ai annoncé à mon cousin que je déménageais là, il m’a servi une blague cochonne en mimant la masturbation… Pas super vendeur comme nom de ville. La voiture prend un dernier virage et remonte la rue. Notre nouvelle maison est tout en haut de la côte dans un rondpoint.
La famille Ankylosaurus évacue le véhicule stationné sous le vaste abri d’auto. Moi je rampe sur les bagages, encouragé par mon grand-frère pressé de sortir. Détail surprenant, la porte d’entrée est jaune… moutarde. Pas celle de Dijon, je t’ai juré de ne pas t’en parler, la moutarde baseball, jaune, quasi fluo. Mes frangins se ruent à l’intérieur. J’attends pour éviter la bousculade.
Ok. Je commence à comprendre pourquoi mon père a changé de travail, ce n’est pas une maison, c’est un palace! Le plafond du hall doit s’élever à six mètres, le salon vitré expose une gigantesque cour boisée, en prime, un imposant mur de brique entoure le foyer. Et ce n’est que le début, chacun a sa chambre, plus besoin de partager l’espace, une salle de jeu, une salle à manger, trois toilettes, alouette.
Ma chambre est super… super vide! Les déménageurs vont se pointer la semaine prochaine avec les boites et le mobilier. D’ici là, c’est camping intérieur dans notre nouvelle grotte. Demain, je dois justement m’attaquer au peinturage des parois de mon bout de caverne. Pour me faire accepter la préhistorique tapisserie carotté, bleu pet, verte tendre et rose nanan, mes parents « Cro-Magnon » ont négocié avec moi un mur charcoal.
En attendant, assis jambes croisées, dos vouté et livre entre les mains, j’expérimente le tapis de ma planque mal éclairée. Le boucain est épais, premier tome de la trilogie du seigneur des anneaux : La communauté de l'anneau, 736 pages.
À part deux ou trois livres dont vous êtes le héros, je n’ai jamais lu de roman. Je suis fébrile, je m’apprête à gravir l’Everest de la littérature fantastique. Ce livre de poche, c’est le cadeau d’adieu d’un ami, Jonathan Montpetit, six pieds, deux cent cinquante livres. C’est le fils d’un couple d’intellectuels; une enseignante et un barbus philosophe. Ensemble on parlait d’aventures de Sherlock Holmes, de BD européennes, on dessinait. Il me manque. Toute ma gang me manque. À mes huit ans, mon père a changé d’emploi au milieu de mon année scolaire. Ça m’a pris quatre longues années pour me refaire des copains de mon âge. Si mes calculs sont exacts, je devrais retrouver des amis à l’environ de mes dix-huit ans… Génial.
« Prologue
1 | Des Hobbits
Ce livre traite dans une large mesure des Hobbits, et le lecteur découvrira dans ses pages une bonne part de…
- Etienne, maman dit que tu peux me conter une histoire? s’il te plait, dit oui.
Jean-Thomas, mon petit frère jacasseur, un vrai M. Je-sais-tout. Le problème, c’est qu’il n’a pas encore cinq ans. Toujours dans mes jambes, pas moyen d’être tranquille deux minutes… en toute honnêteté, c’est moi qui l’ai déformé, en jouant beaucoup trop avec lui, à démolir des châteaux de blocs de bois avec nos fusils à élastiques, à le faire voler aux commandes de son hélicoptère humain (moi), à se battre à l’épée bouteille de pepsi. Je suis l’unique responsable de ce désastre infantile. Je dois assumer.
- Maman! Jean-Thomas ne veut pas me laisser lire. Je crie à travers les étages.
- S’il te plait, juste une histoire pas longue, pas milles minutes, juste cinq-six.
- C’est bon, vient t’assoir à côté de moi, face de Blédiche. Je ne peux rien lui refuser à lui. Je l’aime tellement.
•••
Tu reprends conscience, congelé, à moitié submergé dans l’eau cristallisée d’un étang. Ton corps meurtri réagit à peine, tes dents claque de froid, tes mains sont engourdies. Tu attrapes une racine pour te tirer de ce piège liquide. Frissonnant, tu tournes le regard vers la canopée ; Où es-tu ? Qui es-tu ? Tes souvenirs sont suspendus et brouillés, au milieu d’une forêt aux pins centenaires s’élevant comme une assemblée de géants gris.
Tu t’inquiètes des brulures violacés et douloureuses qui cernent tes poignets et pour tes jambes marquées de contusions. Dans le manteau de tes bras, tu tentes de contenir le peu de chaleur qui maintient ton corps en vie. D’un pied boiteux, tu gravis le remblai terreux qui borde la mare. Une route : Du nord au sud, elle s’enfonce dans la forêt profonde. En face, la pente abrupte et sauvage te semble impraticable dans ton état. Porté par ton instinct, tu choisis de suivre la voie vers le sud.
Attends, tu penses qu’il manque des pages ? Tu te demandes où peut bien être passé
Le passage qui nous mène à cette portion de l’histoire ? C’est le principe, tu dois te servir de ton imagination, te plonger dans un monde fantastique peuplé de créatures monstrueuses…
Tu peux toujours sauter ce bout, je ne vais pas t’en vouloir. Va au chapitre 3
Si tu préfères poursuivre l’aventure, retrousses tes manches et continus ta lecture au chapitre 2
J’aime énormément ce que ces lignes promettent.
Le style est peu conventionnel mais c’est ce qui le rend tellement attachant et réaliste, impatiente de découvrir la suite.
Très cool, bravo.
Quel ne fut pas ma déception cruelle en apprenant dès le début que Dijon ne serait pas à l'honneur ! Mais bon, tu m'as quand même convaincu, donc je vais être obligée de continuer à lire !
Je viens découvrir ton histoire, j'avoue que le titre m'a pas mal intrigué xD J'aime bien le ton, avec de l'humour, un 4e mur très friable et un style léger. C'est agréable à lire. Je me demande vers où tu vas nous emmener, en tout cas pas forcément le récit d'enfance classique auquel on aurait pu s'attendre vu la chute du chapitre^^ J'aime bien le clin d'oeil aux histoires dont vous êtes le héros évoquées un peu plus tôt.
Mes remarques au fil de la lecture (pas toujours pertinent, à toi d'en juger) :
"Il a décidé pour un Xième fois de changer d’employeur" -> la Xeme fois ?
"comprends même pas ce qu’est sa job" -> son job
"je gage que même Einstein n’a pas réfléchit" -> réfléchi
Un plaisir,
A bientôt !