Dans le désert de Yacuiba, le lendemain des olympiades kalokas.
Bénédit passa sa nuit à marcher dans le désert, guidé par ses aigles et l’appel du telsman d’une amie. Ou du moins ce qu’il espérait encore être une amie. Il attendit le petit matin pour prévenir Sophya de son excursion. Les premiers rayons de l’aube lui rappelèrent qu’il avait toujours son rôle d’Élu à tenir en l’absence de Vikthor. Le visage enrubanné dans un grand tissu beige, il prit le temps de nettoyer ses yeux qui avaient emmagasiné le sable soulevé par ses pas. Ses quelques rides et ses son regard toujours plissé trahissait la bonhomie du personnage. Toujours joviale, toujours rieur. Mais ce matin, sa mine optimiste avait fait place à un visage songeur. Il espérait que la rencontre avec Hestia d’ici deux jours l’apaiserait. En attendant, l’annonce de son départ allait tourmenter sa protégée.
_Sophya, ne t’inquiète pas. Il ne m’est rien arrivé, mais je serais de retour que dans quelques jours.
_Quoi ? Impossible. Tu ne dois pas rester à découvert tout ce temps. Pourquoi as-tu besoin de partir ? Où es-tu ? s’inquiéta Sophya alors qu’elle s’apprêtait à faire sa ronde matinale.
_Je dois retrouver quelqu’un au sud, vers Kenzack. Si tout va bien, je reviendrais avec elle d’ici quelques jours, la rassura-t-elle vainement.
_Qui ça elle ? Pourquoi ne pas la faire venir ici plutôt ? Quelqu’un à des ennuis ?
Bénédit dû s’y prendre à deux fois avant de continuer cette discussion. Il savait que Sophya n’approuverait pas, mais c’était un homme d’honneur. Si Hestia avait vraiment besoin de lui, il se devait de répondre à son appel. Seulement, dans le doute, il ne mettrait que sa personne en danger. Pas toute la résistance.
_Non, je préfère juste aller à sa rencontre avant de l’amener à la grotte, avoua péniblement Bénédit.
_Si tu prends cette précaution, c’est que tu n’es pas sûre de cette personne. Je te rejoins sur le champ !
_Non ! je préfère la rencontrer seul. Il le faut. C’est préférable.
_Qui ? Dis-moi qui tu vas voir, où tu vas et pourquoi et je n’essayerais pas de te rejoindre !
_Tu me le promets ?
_Oui, acquiesça sincèrement Sophya.
_Hestia m’a contacté. Elle veut nous retrouver. Elle aurait des choses à me dire sur Paskhal. Je me dois de lui parler en face à face.
_Mais tu es fou ? On ne rencontre pas l’âme sœur d’une personne qui nous a déclaré la guerre ! C’est un piège ! s’emporta l’adolescente.
_Tu m’as promis de ne pas interférer Sophya. Je dois la voir. Je serais prudent. Fais-moi confiance.
_C’est une Kalokas… méfie-toi !
_Dans l’ombre peut naître la lumière. Ne l’oublie jamais, la rassura une dernière fois Bénédit.
Après avoir admiré les derniers instants du lever du soleil, le Physé se remit en route. Fatigué par sa longue nuit de marche, mais pressé de connaitre les maux d’Hestia, il se hâta. Préférant les dunes de sable arides aux chemins déjà tracés, il évita les éventuelles rondes des miliciens. Averti de tous les mouvements suspects par ses aigles, il ne s’arrêtait que pour se reposer, manger et boire un peu d’eau. Il espérait que son amie l’accueillerait avec un peu de victuailles, car d’ici le lendemain, il aurait épuisé toutes ses réserves. La nuit qui tomba lui rappela son besoin de repos. Il avait déjà passé une journée et une nuit de marche sans dormir, il ne pouvait pas malmener plus son corps. Sinon, il ne lui resterait plus assez de pouvoir pour combattre en cas d’embuscade. Harassé par sa marche, il trouva une grotte où se réfugier. Pim, son ours, y prit place avec lui sous le regard protecteur des deux aigles qui les accompagnaient. Bénédit aurait pu s’endormir en quelques secondes s’il n’avait pas préféré prêter attention à la voix qui grondait dans son telsman.
_Bénédit, où es-tu ?
L’ancien Élu ne répondait pas, mais la phrase se répétait.
_Bénédit, où es-tu ?
_Où es-tu ?
_Nous avons largement dépassé Kenzack. Où es-tu ?
_Bénédit, où es-tu ?
Il souhaitait garder le silence et ainsi garder l’avantage de sa position secrète. C’est lui qui la retrouverait. Pas l’inverse. Cette fois, il ne serait pas naïf. Il serait prudent comme lui avait conseillé sa protégée. Si Hestia était sincère, elle le comprendrait. À présent, il avait besoin d’une bonne nuit de sommeil pour que son pouvoir de guérison puisse faire effet et aider son corps à se remettre de ce périple. Bénédit s’endormit alors en étant certain qu’il était encore maître de cette future rencontre.
_Bénédit, où es-tu ?
Dehors, un vent puissant soulevait les dunes du désert de Yacuiba. Si les températures n’étaient pas fraiches, elles étaient bien descendu par rapport à la journée. Sans le vent, il aurait été presque plus agréable d’avancer la nuit. Mais pour le groupe de visiteurs venus de Zorrèce, la pénombre était préférable. Eux, qui depuis quelques jours partageaient le même ciel étoilé que la résistance, avançaient à l’aveugle dans l’immensité du désert. Si Bénédit n’avait plus répondu à ses appels depuis la nuit dernière, Hestia ne pouvait s’empêcher de croire en lui. Zaven et Marie qui ne l’avait rencontré qu’une fois au paravent, ne pouvaient se montrer que plus frileux.
_On va finir par mourir dans ce putain de désert. On n’aurait pas dû abandonner la voiture en ville, grogna Zaven démotivé.
_Zaven ! Pas devant les enfants, le reprit Marie en caressant la tête d’Altis qu’elle portait sur son ventre à l’aide d’une grande écharpe.
Hestia préféra les laisser se chamailler tandis qu’elle avançait presque à quatre pattes dans le sable. La tête rivée sur le sol, elle était en quête d’indices, de traces qui auraient pu indiquer la position de son ami. Les mains prêtes à lire le moindre pas où élément qu’il aurait laissé derrière lui, elle ne prit pas garde à camoufler ses propres traces. Ils avaient quitté la ville quand il faisait encore jour, à la barbe des miliciens qui quadrillaient la région. Elle était certaine que son mari n’avait pas lancé d’avis de recherche, comment aurait-il pu expliquer son départ sans citer sa propre trahison ?
_Hestia, es-tu sûre de Bénédit ? Pourquoi nous viendrait-il en aide après ce que Paskhal lui a fait ? l’interrompit Marie.
_C’est un homme bon qui parle toujours avec son cœur et qui n’est animé par aucune stratégie de pouvoir.
_Le contraire de Paskhal quoi, commenta Zaven acerbe.
Hestia ne pouvait qu’acquiescer, son gendre avait bien raison. Elle ne comprenait même pas pourquoi Paskhal pouvait être son époux. Encore moins pourquoi elle l’aimait malgré tout, encore aujourd’hui. Mais personne ne pouvait choisir son âme sœur, c’était quelque chose qui nous habitait telle une maladie incurable. Ceux qui l’ignoraient en souffraient toutes leurs vies, les Siréliens qui ne la rencontraient pas ou la perdaient étaient amenés à supporter un manque indélébile et les couples qui se formaient restaient dépendants l’un de l’autre. Pour Hestia, Bénédit ou Sophya, leur âme sœur n’était qu’une blessure qui resterait toujours à vif.
_Il n’est pas loin, mais il doutait de moi, je le sens, répondit simplement la dame de cœur.
_Pourquoi lui avoir caché que nous étions tous les trois ?
_Zaven, il ne vous connait pas. Valait mieux qu’il me croie seule, lui répondit Hestia en s’approchant de lui pour câliner Almon, solidement attaché dans le dos du jeune homme.
_Peut-être qu’il aurait mieux fallu que tu ne mentes pas pour une fois, lui répondit simplement l’adolescent énervé par ces non-dits.
_Nous devrions nous reposer. Nous sommes tous un peu fatigués, je crois. Arrêtons-n…
Marie s’interrompit nette quand elle comprit qu’un bourdonnement mécanique semblait se rapprocher d’eux. Les phares qui interrompirent soudainement l’obscurité ne laissèrent aucune place au doute. Un véhicule de combat, entièrement chenillé, roulait dangereusement dans leur direction.
_Nous avons peut-être été suivis, il faut se cacher, s’écria Zaven en poussant Marie et Hestia à courir.
Les trois Kalokas s’élancèrent comme ils le pouvaient à travers les dunes. Marie était ralentie par le poids de son fils qui pesait sur sa poitrine et Zaven n’avait jamais été bon en endurance alors avec le second jumeau sur son dos, il n’allait guère plus vite que ses ainées.
_Ils nous traquent et surement depuis ce matin, leur indiqua Marie à travers leurs telsmans. Mon pouvoir devine leur exaltation, ils savent qui nous sommes. Je les sens pareilles à des chasseurs en pleine battue.
_Bénédit, où es-tu ? s’entêta Hestia en ignorant délibérément les révélations de sa belle-fille.
La voiture semblait avancer sur leurs traces, mais à l’aveugle. On les cherchait bien, mais ils n’avaient pas encore était repérés. Un milicien se tenait de chaque côté du tank, une lampe de poche à la main cherchant des traces à poursuivre. Mais le vent qui recouvrait tout sur son passage ne leur facilitait pas la tâche. Mais si l’obscurité et le vent étaient l’allié des trois Kalokas, le jour qui semblait vouloir pointer son nez n’allait pas leur être d’une grande aide. Au contraire.
_Bénédit, où es-tu ?
_Je ne peux plus courir. De toute façon, ils vont finir par nous repérer. C’est un miracle que mes jumeaux ne se soient pas encore mis à pleurer.
_Bénédit ! Nous avons besoin de toi ! s’énerva la dame de cœur toujours en ignorant les craintes de Marie.
Mais pour la première fois, son telsman ne resta pas sans réponse. Comme si elle avait prononcé le mot magique, Hestia entendit la voix de Bénédit dans son amulette.
_Nous ? Tu as bien dit nous ?
Essoufflée et prise de court, Hestia ne chercha pas à mentir ou à se défendre. Le ciel qui face à elle quittait son bleu nuit pour se parer d’orange ne lui laissait plus le choix. Elle devait être honnête. Elle ne pouvait pas se permettre de prendre des détours, d’avouer une vérité à mi-mots comme à son habitude.
_Je suis avec la femme d’Arthur et l’âme sœur de Solenne. Tu les as déjà vus, ils étaient là quand avec Vikthor vous êtes venus à mon chevet. Bénédit, je t’en supplie. Où es-tu ?
La réponse qu’elle attendait ne vint pas de son amulette, mais du ciel lui-même. Les cris de deux aigles royaux lui indiquèrent sa présence. Il était là, bien plus proche qu’elle ne l’aurait pensé. Mais alors qu’elle s’apprêtait à l’annoncer à ces deux acolytes, Hestia fut éblouie par la lumière des phares du char. Il fonçait droit sur elle.
_METTEZ-VOUS À GENOUX, LES MAINS BIEN EN ÉVIDENCE semblait crier le véhicule lui-même.
Le moteur vrombissant face à elle, la somation se répéta plusieurs fois avant qu’Hestia veuille obtempérer. Par mimétisme, Zaven et Marie l’imitèrent, mais contrairement à elle, ils se mirent à genoux par peur du courroux des miliciens. Courageuse, Hestia se dirigea les mains levées vers son gendre pour le libérer d’Almon qui s’agitait dans son dos. Sous le regard apeuré de Marie, la dame de cœur berça délicatement l’enfant en pleur.
_Maintenant que tu es libre de tes gestes, il faut que tu gagnes du temps. Bénédit en a besoin pour nous venir en aide, lui expliqua Hestia.
_Tu es sûre de toi ? s’inquiéta Zaven.
_Oui, lui mentit Hestia sans sourciller.
Bien que Marie perçut la manipulation de sa belle-mère, elle n’en dit rien. Elle lui en parlerait plus tard. En attendant, si ça pouvait les sortir de cette embuscade, c’était pour le mieux. Hestia continua à bercer son petit fils sans prêter aucune attention aux deux miliciens qui sortaient du véhicule.
_Combien ? se renseigna Zaven tremblant.
_Trois, je ne sens que trois humains, lui répondit Marie concentrée.
Le chauffeur était resté dans la voiture, prêt à repartir juste après l’arrestation. Se méfiant plus de Zaven que des deux femmes, le premier se dirigea vers lui et Zaven se laissa relever gentiment.
_Veuillez décliner votre identité, jeune homme ! le somma le milicien impatient.
_Je suis Hestia Agape, femme de L’Élu Paskhal Agape, le conciliateur dynaste et chef de l’armée des Kalokas, lui répondit avec aplomb Hestia bien que la question ne lui était pas adressée.
Instinctivement, le second milicien se dirigea alors vers elle. Déstabilisés par son assurance, ils ne prirent pas le temps de menotter le jeune homme. À peine le milicien eût dépassé Zaven, que celui-ci décocha son plus gros crocher du droit à celui qui s’était planté devant lui. L’officier n’eut pas le temps de riposter qu’il fût projet dans le sable. Alors qu’il était tombé lourdement en arrière, Zaven se jeta sur lui de toutes ses forces pour l’empêcher de sortir son arme. Son collègue se tourna alors vers lui pour lui venir en aide. Mais tandis qu’il courait, un aigle fonça sur lui pour s’agripper à l’arme qu’il tenait au poing. L’homme surpris ne réussit pas à retenir son pistolet et l’oiseau s’envola avec dans un bruissement d’aile. Au même moment, Marie se mit à courir vers sa belle-mère, laissant Zaven seul face à deux assaillants. Elles savaient que maintenant qu’ils étaient désarmés, sa super force aurait l’avantage. Du moins, elles l’espéraient. Ignorant les pleures des jumeaux, les deux femmes dévalèrent la pente de la dune où elles se tenaient sans se retourner.
_Suis l’oiseau ! Marie, suis-le ! la guida Hestia.
Derrière elles, Zaven se battait avec acharnement face aux deux officiers sortis du char. Un coup de feu l’interrompit alors qu’il avait largement le dessus. Le chauffeur venait du tirer un coup en l’air, le sommant d’arrêter s’il voulait vivre. Zaven hésita à l’écouter. Toutefois, il avait déjà assommé l’un des deux hommes et il tenait fermement le dernier devant lui. Protégé par son corps et rassuré par la vision irréelle qui se passait devant lui, il ne lâcha pas sa prise et referma sa main sur la gorge de l’officier qu’il tenait par le col. Hésitant, le chauffeur ne réagit pas tout de suite par peur de blesser avant tout son collègue. Mais tandis qu’il s’apprêter à retirer un coup de sommation, il se trouva le visage aplatit dans le sable. Le choc fut si violent que son arme fût projetée quelques mètres plus loin. Sonné par l’attaque, le chauffeur eut du mal à comprendre que c’était bel et bien un ours qui venait de lui sauter dans le dos. L’animal grognait face à lui, se mettant debout sur ses deux pattes arrière pour le dissuader de se relever.
_Tu peux le lâcher, il n’est plus en état de se défendre, ordonna alors une voix grave.
Zaven obtempéra et le milicien tomba inconscient à ses pieds. Le chauffeur, toujours allongé par terre, se retourna alors pour percevoir l’homme qui avançait derrière lui.
_Vous ? Bénédit Karmir, vous êtes en état d’arrestation. Vous êtes accusés d’avoir organisé le meurtre de la ministre de la Justice et de fomenter une rébellion contre le conseil ministériel, s’écria-t-il choqué par cette vision.
_Vous n’êtes pas en état d’arrêter qui que ce soit mon ami, lui répondit simplement le Physé en lui assénant un coup de bâton en plein visage pour l’assommer.
L’ancien Élu se dirigea sans un mot vers les deux miliciens allongés au pied de Zaven pour vérifier leurs poux. Aucun d’eux n’était mort, ils étaient juste sonné.
_Que fait-on d’eux ? le questionna Zaven encore secoué par son combat.
_Nous ferions mieux de disparaitre avant qu’ils se réveillent. Contrairement à eux, nous ne sommes pas ses assassins.
Par précautions, ils attachèrent les miliciens avec leurs propres menottes pour gagner du temps et récupérèrent leurs armes. Zaven le suivit silencieusement, sans poser de question. Bénédit était un homme qui imposait le respect de par son charisme. Son regard doux rassurait tous ceux qui croisaient son chemin bien que son corps trapu pouvait lui donner un aspect un peu bourru. Tout comme Zaven.
_Tes amies se cachent un peu plus loin, derrière cette colline. Suis-moi mon enfant.
Zaven acquiesça timidement et marcha dans ses pas. Il avait du mal à croire qu’il venait d’échapper à une arrestation ou pire. Pendant les quelques mètres qui le séparaient de Marie et d’Hestia, il se retourna plusieurs fois vers les miliciens laissés derrière lui. Comme s’il avait peur qu’ils se mettent à lui courir après soudainement.
_Pourquoi ils voulaient vous arrêter ? Que vous voulaient-ils ? le questionna alors Bénédit, conscient qu’il aurait peut-être plus d’informations aux prés de lui que de son amie.
_Avec Hestia, nous nous sommes enfuis d’Eybure. Pour vous rejoindre.
_Et pourquoi ?
_Parce que comme vous, Paskhal nous a trahis ! cracha Zaven avec sincérité.
Face à ces mots, Bénédit s’arrêta net pour regarder le visage du jeune homme. Il y vit la même douleur qui le hantait depuis deux jours. Il avait eu raison de leur venir en aide, Hestia pouvait être un atout pour combattre Paskhal. Tandis qu’il s’apprêter à le questionner plus, il fût interrompu par Marie qui sauta au cou du blondinet.
_Tu n’as rien ! Par la grâce de la Déesse, nous nous en sommes sortis.
_Merci Bénédit, ajouta Hestia en posant sa main sur son épaule.
_J’aime croire que tu aurais fait pareil pour moi, lui répondit-il en se tournant vers elle avec un regard plein de défi.
_C’est bien pour ça que je suis ici. Pour me battre, avec toi.
_J’espère que tes informations seront à la hauteur des besoins de la résistance dans ce cas. Tu n’as pas idée à quel point tu nous as mis en danger en venant ici. Maintenant, les miliciens vont retourner tout le désert pour nous trouver.
_Paskhal a passé un accord avec le ministre Asage, reprit Hestia fébrile.
_Oui, ils sont en train de créer une armée kalokas. La radio me l’a appris, je…
_Non ! Il a négocié avec lui pour faire enlever Manon… Le ministre devait exploiter les pouvoirs de ma fille pour destituer les Yeghes, et une fois fait il devait la tuer, le coupa Hestia.
_Mais pourquoi ?
_Parce qu’une fois morte, il n’avait plus de successeur. Personne ne lui prendrait son pouvoir d’Élu. Surtout pas sa fille, acheva Hestia en pleurant.
Bénédit l’accueillit dans ses bras face aux regards émus des deux autres kalokas. L’ancien Élu n’aurait jamais cru Paskhal capable de ça. La situation était bien pire qu’il ne l’aurait imaginé. Il aurait préféré que les révélations d’Hestia ne soient pas aussi grandes. Il ne savait pas encore quoi faire de cet aveu. Et pourtant le pire était à venir.
_Bénédit, où es-tu ? l’interpella soudainement Sophya dans son telsman.
Sa voix tendue ne laissait aucune place au doute. Elle était préoccupée. Quelque chose se passait dans la grotte de la résistance.
_Tu dois rentrer au plus vite ! L’armée kalokas détient désormais l’épée de Zro. Elle vient d’être remise par le ministre Asage en personne dans le but de défaire la résistance et de… te tuer… acheva Sophya tremblante.
_Oh, mon enfant, si seulement cette arme était la seule chose que nous avions à combattre…
_Bénédit où es-tu ?
_J’arrive, d’ici deux jours. Nous serons-là et je n’ai pas de bonnes nouvelles, lui répondit Bénédit en serrant de toutes ses forces Hestia qui pleurait à chaudes larmes dans ses bras.