Chapitre 8

Par Phoebe

VIII

 

-Bon-jour.

Durant le voyage, Abbondanza avait appris à ses fils les quelques mots de français qu'elle connaissait. Dans un village, entre deux trains, elle acheta un petit dictionnaire italien-français. Elle aurait préféré "piémontais-français", mais elle n'avait pas trouvé. La femme qui lui avait vendu, enchantée, avait babillé pendant des heures en italien. Abbondanza, en traversant la France, même si elle l'avait fait en train, se rendait compte de l'immense proportion d'italiens qui y étaient déjà. Cela l'avait quelque peu rassurée. Beaucoup d'entre eux étaient piémontais, mais on retrouvait aussi pas mal de lombardiens.

-Gar-çon.

Paolo les répétait scrupuleusement avant de s'endormir, dans leur wagon-couchette, juste après ses prières.

-To-ma-te.

-Dors, Paolo. Demain, nous arriverons à Paris. Repose-toi tant que tu sais que tu peux te reposer. On ne sait pas ce qui nous arrivera, là-bas.

-J'ai peur, Mamma, l'entendit-elle murmurer.

-Dors, mon petit.

Elle attendit que le souffle de ses enfants devienne régulier pour s'autoriser à se reposer un peu, elle aussi. Mais elle ne faisait jamais de nuits complètes. Elle attendait toujours, étendue dans sa couchette, les yeux fixés sur le plafond. Terzo, parfois, se réveillait, et, paniqué, il pleurait en appelant sa mère, effrayé de ne pas se réveiller chez lui. Alors, elle caressait longuement son front, ses cheveux, jusqu'à ce qu'il se rendorme. Elle avait eu, en quatre nuits, la possibilité de repenser à toute sa vie. À sa mère, à son père. Sa mère si éthérée, aux yeux écarquillés, son père si fatigué, qui avait toujours les mains pleines de terre. Son frère. Son frère perdu, qui s'amusait à pêcher des têtards dans sa bouche, quand il était petit, et qui avait toujours des bestioles plein les poches. Silvio. La première fois qu'elle l'avait vu, quand il avait quinze ans, des cheveux trop longs, et les joues rougissantes quand il la regardait. C'était si loin, si près. Et puis, surtout, tous ses enfants. Elle repensa à l'odeur de chacun d'eux, la matérialisa si bien qu'elle s'imaginait parfois qu'elle prenait tout le wagon. Silvia, la douce Silvia, aux yeux si beaux, qu'elle aimait tant. Providenzia, si vive. Elle pleurait en pensant à la mèche de cheveux qu'elle avait perdue. Et il y avait eu la petite Abbondanza, aussi. Elle avait vécu six mois, mais était déjà un bébé très souriant. Ensuite, c'était Laura, la rebelle Laura, qui ne pliait ni ne reculait devant rien. Celui d'après, c'était Primo, son premier fils, qui pleurait souvent. Ensuite, il y avait eu Rita, nommée ainsi en l'honneur de la sainte patronne des causes perdues. C'était la plus jolie des enfants qu'elle avait eu, et la plus rieuse. Elle s'était éteinte d'une mauvaise grippe, après la naissance de Paolo. Après Rita, il y avait eu Segundo, qui n'avait pas été bien plus courageux que son frère aîné, et renonça à vivre au bout d'une semaine. Et puis Paolo était né. Elle l'avait appelé comme ça, car elle savait qu'il vivrait, malgré son front au goût salé, qu’il ne suivrait pas les deux précédents. Entre Paolo et Terzo, il y avait eu la petite Carlotta, le plus petit bébé qu'elle ait jamais vu, née beaucoup trop en avance, qui avait tout de même tenté l'aventure un peu plus d'un mois. Et enfin, elle avait donné naissance à son cher Terzo. Devant ses yeux, ses enfants formaient un défilé. Elle savait exactement qui avait eu telle ou telle maladie, qui avait chuté ici ou là. Qui avait telle ou telle mimique, telle ou telle odeur. Elle aimait autant ceux qui n'étaient plus là que les autres : ils avaient le charme des absents. Elle finit par s'endormir profondément, entourée des fantômes de ses pensées. Tous étaient si proches. Ses parents, Silvio, ses huit autres enfants. Elle se les imaginait si bien qu'ils auraient tout aussi bien pu être dans la cabine, avec eux. Si proches, et si loin. Silvio et ses joues rougissantes. Sil-vio. Sil-vio. Bon-jour. Mais non. Elle filait à toute allure vers Paris. Demain matin, ils arriveraient à la gare. Comme elle avait dit à Paolo, on ne savait pas ce qui leur arriverait, là-bas.

La gare était en pleine effervescence. Les gens passaient vite, la tête haute, la main repliée sur les pans de leurs manteaux pour soustraire aux mains des pickpockets leurs biens les plus précieux. Les enfants se précipitaient, se poursuivant les uns les autres, plaquant leurs chapeaux sur leurs têtes, faisant voler les jupes de leurs nourrices, hurler les belles dames.

-Restez près de moi, demanda Abbondanza d'une voix qui se voulait autoritaire, mais qui se fit plaintive.

Et elle le vit. Il attendait, avec sa moustache brune, la tête en l'air, mal à l'aise au milieu de toute cette foule. En le voyant, elle revit en lui le petit garçon qui était tombé dans la mare, hilare, ses yeux pétillants tranchant sur sa silhouette couverte de vase :

-Quatre ! J'en ai attrapé quatre, cette fois !

-Vas-tu laisser ces pauvres têtards tranquilles ! Regarde dans quel état tu te mets, par leur faute !

-Mais tu comprends pas, Abbondanza ! C'est trop drôle ! Tu sais pas t'amuser, toi !

-Tu t'amuses pour deux, idiot, répondait-elle en lui ébouriffant les cheveux. Moi, j'ai pas le temps, faut que je m'occupe de toi.

-Je ferais comment, quand tu seras partie?

-Je serais toujours là.

Elle ne l'appela pas tout de suite, l'observa. Il tournait la tête de tous côtés, frottant ses cheveux, et, enfin, il leva ses yeux bleus d'azur sur elle. Elle ferma les yeux pour imprimer cette image dans sa tête. Son regard illuminé, son grand sourire immédiat quand il la vit.

-Abbondanza, le vit-elle articuler. Rien que pour ça, pour ces yeux scintillants, elle aurait traversé les océans.

-Les enfants, fit-elle, voici votre oncle Benedetto.

Terzo vit s'approcher un immense géant aux yeux bleus et aux cheveux très noirs, qui écarta les bras et écrasa sa mère si mince entre ses grandes mains.

-Oh, Abbondanza ! Que je suis heureux de te revoir !

-Moi aussi, Benedetto, moi aussi, fit-elle en serrant l'immense dos de son petit frère.

Le géant se pencha vers Terzo, et approcha son visage tout près du sien. L'enfant fronça les sourcils.

-Tu dois être Terzo !

Il ébouriffa ses cheveux et tapota sa tête.

-T'as une tête de bon p'tit gars.

Il se redressa un peu et se planta face à Paolo.

-Et toi, tu es Paolo, c'est ça ? La dernière fois que je t'ai vu, tu avais à peine deux ans ! Mais tu n'as pas tant changé de ça.

Paolo le fixa de son regard grave.

-Eh bé, ils sont pas bien bavards, tes gamins.

-Ils sont fatigués, sourit Abbondanza.

-Le voyage s'est bien passé ?

-Oui, ne t'inquiète pas.

Il lui semblait que cela faisait trois vies que Faosto les avait laissés à la gare de Milan. En réalité, c'était il y a à peine cinq jours.

-Bon, fit le géant en frappant dans ses mains. Allons chez moi ! J'ai demandé ma journée au chantier. Nous allons visiter Paris, aujourd'hui, ajouta-t-il avec un grand sourire.

Il prit dans sa main gauche la valise de sa sœur, et sentit une petite main se glisser dans la droite. Il baissa les yeux vers elle, et rencontra le regard bleu de Paolo. Le petit garçon aimait déjà bien ce colosse aux yeux clairs et aux manières d'enfants, qui parlait comme eux, dans ce pays à la langue si étrange, si fluide. Benedetto serra la main du petit, et ils sortirent tous ensemble de la gare.

-Et puis, il faut que vous rencontriez Chiara, aussi !

 

 

Chiara était un bébé potelé, ce qui n'était pas étonnant au vu de la corpulence de sa nourrice, une voisine qui portait sur ses hanches des tripotées d'enfants. Benedetto la récupéra précautionneusement. Il habitait au cinquième étage d'un vieil immeuble, où l'on entendait résonner des fortes voix italiennes dans la cage d'escalier.

-Ici, quasiment tout le monde est italien, précisa-t-il à Abbondanza. Il n'y a que les Kovacs qui sont polonais, au rez-de-chaussée. Mais ils sont gentils. J'habite à côté de Michele et Sofia. Ils vont être enchantés de te revoir, chantonna-t-il.

-Pauvre con de connard de merde, avec ta tête de con que je vois tous les jours, hurla une femme dans un appartement voisin. Va te faire foutre, Terlizzi !

-Ah, ça, ce sont les Terlizzi. Ils se prennent tout le temps la tête. Ne t'en fais pas. L'homme est gentil, apparemment, mais ne t'approche pas trop de la femme. C'est une langue de vipère, et elle crie sans arrêt. Chiara ne l'aimait pas.

Benedetto se tendait un peu quand il parlait de sa femme. À chaque fois, Paolo exerçait une légère pression dans la main, comme pour le consoler.

-Est-ce que tu allaites encore Terzo ?

-Non, pourquoi ? Cela fait bien longtemps. C'est un grand garçon, maintenant.

-Je m'en doutais, fit Benedetto. Ce n'est pas grave, les Ecco ont une chèvre. Ils habitent juste ici, fit-il en désignant une porte ouverte.

Au même instant, jaillirent hors de l'appartement deux enfants sales à l'air narquois, qui les bousculèrent en se précipitant dans les escaliers.

-Et que je vous attrape pas, bande de petits...  Ah, Benedetto, bonjour !

La mère des enfants était une femme maigre aux os saillants, bien peu engageante, le genre de femme qui était désagréable avec sa propre famille, mais souriait aux autres.

-C'est ta sœur ?

Elle s'essuya la main sur son tablier, replia celle avec la poêle sur sa hanche, et tendit l'autre à Abbondanza :

-Je suis Roberta. Quand vous aurez besoin de moi, vous saurez où me trouver. Ici, nous sommes une famille, tous. Isolés dans ce monde à part.

-Abbondanza, bonjour, murmura la concernée. Voici mes fils, Paolo et Terzo.

-Eh ben, ils sont bien plus beaux que mes Gianni et Giuseppe ! Ces deux garnements viennent de voler le repas que je gardais pour leur père. Je leur ficherais une raclée quand ils rentreront. Je ne sais plus quoi faire d'eux, mon dieu, doux Jésus et sainte Vierge, qu'ai-je fait pour mériter ces petits fripons ! s'exclama-t-elle en levant les bras au ciel. Et vous même, d'où venez-vous ?

Abbondanza rougit et marmonna :

-Vous ne connaissez sans doute pas...

À l'étage inférieur, les Terlizzi recommencèrent à crier. Au-dessus, une femme cria à son tour dans l'escalier :

-Roberta, peux-tu me passer du savon, s'il te plaît ?

Roberta hurla immédiatement en retour :

-Envoie ta fille me le chercher !

Et, intimant à Abbondanza :

-N'en donne jamais trop à cette femme. La Zuccoli. Elle attend de se faire servir comme une reine !

Suivit une jolie collection de malédictions fleuries murmurées à l'intention de la dite femme. Benedetto prit Abbondanza par le bras :

-Je te laisse, Roberta, nous allons déposer les affaires des enfants chez moi. Tu auras le temps de faire la connaissance d'Abbondanza après.

Ils évitèrent consciencieusement les autres familles de l'étage suivant, et se refugièrent dans le petit appartement de Benedetto, sous les combles. C'était un appartement petit, mais chaleureux, avec deux chambres minuscules, un petit salon-salle à manger qui avait un coin cuisine. Il était sombre, les chambres mansardées, mais une petite fenêtre dans la pièce principale et dans la plus petite des chambres donnaient sur les toits de Paris.

-C'est étrange, fit Paolo en s'approchant de la fenêtre. Les toits sont gris, ici.

-C'est joli, j'imagine, fit Abbondanza. Elle pensa à son petit village aux maisons écartées, où l'on respirait l'air frais, et le compara à cet étrange endroit où les voix se superposaient, où les gens criaient, et vivaient tous ensemble, entassés, au milieu d'une étrange odeur de renfermé et de chaleur humaine.  

-C'est... Folklorique, ici, ajouta-t-elle.

-On s'habitue, fit Benedetto en haussant les épaules.

Il jouait avec le nez de Chiara, qui dormait profondément. Entre ses deux grandes paluches, elle semblait minuscule.

-Sofia l'appelle Claire. Elle dit que c'est mieux pour elle. D'avoir un nom français. Chiara veut dire Claire.

Abbondanza acquiesçait en promenant son regard autour de la pièce. Qu'allait-elle faire, ici, toute la journée ? Où pourrait-elle installer tous ses bocaux ? De toute façon, personne ne viendrait lui demander autant de potions qu'au village. Et Terzo, et Paolo, ils ne pourraient pas courir et crier. Un vent de panique commençait à s'emparer d'elle. Elle commençait à être insupportable. Elle ne pouvait pas se le permettre. Il fallait être forte pour eux tous.

-Paolo et Terzo pourront dormir dans la petite chambre. J'ai mis deux lits. Toi, tu pourras dormir dans l'autre, avec Claire. Celle encore plus petite. Et moi, je dormirais là, fit-il en désignant un lit de fer tout enfoncé dans un coin sombre. Tout ira bien.

Il le disait plus pour se rassurer lui-même que pour rassurer Abbondanza.

-Voilà... Vous pouvez visiter...

Abbondanza fit le tour de l'appartement calmement, sans rien dire, sans même oser formuler des pensées dans sa tête. Elle finit par s'asseoir sur un fauteuil en murmurant :

-C'est bien, c'est très bien.

Elle repensa à ce que lui avait dit Silvia avant qu'elle ne parte "Tu sais, tu sais ce que tu perds, mais tu sais pas ce que tu vas gagner là-bas." Soudain, trois coups résonnèrent à la porte.

-Entrez ?

Et voilà. On y était. Chez elle. N'est-on pas chez soi dès que l'on décide de qui peut entrer ou non ?

-Bonjour ! fit Sofia en entrant dans la pièce, toute guillerette, un plat fumant entre les mains.

-Oh, Sofia !

Sofia et Michele Copoletti étaient partis du village en même temps que Chiara et Benedetto, cinq ans plus tôt. Ils avaient à peu près le même âge, trente-cinq ans, et un fils d'à peu près l'âge de Paolo. Sofia était venue trouver Abbondanza, un soir, encapuchonnée, pour lui demander une potion contre l'infertilité. Abbondanza la lui avait donné, mais l'avait prévenue qu'il y avait de grandes chances pour que cela ne fonctionne pas : ses entrailles n'étaient peut-être pas assez accueillantes pour un bébé. Malgré la potion. Pourtant, Sofia avait eu un bébé. Un garçon, Andrea. Elle l'avait toujours remerciée et tenue pour sauveuse de sa famille. Sofia était née pour être mère. Elle se demanda pourquoi Benedetto n'avait pas confié Claire aux Copoletti. Sofia aurait été enchantée de s'occuper du bébé. Et elle, elle aurait pu rester dans sa campagne du Brass di Dio avec Silvia et Laura.

-Je me suis dit que vous auriez faim, ajouta Sofia en déposant son plat fumant sur la table. Ce n'est pas grand-chose, juste un mélange de légumes cuits. On n'en trouve pas beaucoup, en cette saison.

 Abbondanza serra dans ses bras Sofia. Elle était un petit morceau de chez elle. Tiens, elle n’aurait pas pensé que cet ennuyeux petit village lui manquerait tant.

-Ma chère Sofia ! Comment vas-tu ?

-Oh, bien, bien !

-Et Michele ?

-Il va bien, et Andrea aussi. Nous étions un peu perdus en arrivant ici, mais maintenant, ça va mieux. Ça va aller encore mieux, maintenant.

Et les deux femmes s'assirent l'une à côté de l'autre, laissant de côté le temps passé, ce qui les entourait, comme elles avaient pu discuter tant de fois dans leur petit village, à des centaines de kilomètres de là.

-Venez donc voir mon appartement !

 

Sofia et Michele étaient les voisins directs de Benedetto, ce qui rassurait quelque peu Abbondanza. Elle n'aurait pas aimé que des étrangers vivent juste à côté de chez elle. Leur appartement ressemblait au leur, avec une commode en noyer dont un tiroir manquait, trois chaises de paille et une petite table graisseuse, sur laquelle reposait un pot à eau ébréché. Benedetto était resté à côté avec Terzo et Claire.

 -C'est quoi, tous ces livres ? demanda Paolo en désignant une pile de livres abandonnés dans un coin.

 Sofia faisait quelques ménages chez une vieille dame excentrique qui avait été la seule à accepter de l'embaucher. Personne d'autre ne voulait qu'une italienne touche sa vaisselle et son argenterie. La vieille dame lui fournissait régulièrement des livres, adulés ou non par la critique, qu'elle proclamait futurs grands noms de la littérature.

-Je n'ai jamais osé lui dire que je ne savais pas lire le français, rigola-telle. Tiens, Paolo, si ça t'intéresse, fit-elle en lui jetant un bouquin. Essaie donc.

Paolo l'attrapa au vol, et parcourut les pages du livre.

-Les Mi...sé...rables.

Puis, il toisa Sofia de son habituel regard grave:

-Je ne parle pas le français. Je comprends pas ça.

-Va falloir t'y mettre, piccolino. Tu vas habiter ici, maintenant. Andrea ne parle pratiquement que ça... Ça l'amuse, de me tourmenter.

-Tu parles le français, toi ?

-Je le baragouine. Je le parle juste avec mon employeuse... Oui, Madame. Non, Madame. Je comprends la majorité des choses... Mais je hoche la tête quand elle parle trop vite. Et elle parle l'italien. C’est plus pratique.

-Tu penses que je devrais chercher un travail, moi aussi ?

-Non, pas forcément. Nous n'en avons pas toute un, ici. Mais ce pourrait être bien. Cela allègerait un peu la charge de Benedetto...

-Mais je ne sais pas travailler !

-Allons, Abbondanza ! Tu étais la guérisseuse du village. Pourquoi tu ne continues pas ici ?

-Personne ne sait, ici...

-Je peux leur dire...

Sofia baissa les yeux. Elle n'assumerait pas la honte d'avoir eu recours aux plantes pour avoir son fils. Ce genre de choses restaient dans la nuit noire, sur le pas de la porte de la maison sous le pin du Brass di Dio. Une femme qui ne peut pas avoir d’enfant, que diraient les autres ?

-Leur dire ce que tu as fait pour certaines... femmes du village.

-Où est Andrea, d'ailleurs ?

-Oh, je ne sais pas trop. Il joue dans la rue, je pense, avec Gianni et Giuseppe. Je ne regarde pas trop ce qu'il fait, fit Sofia en détournant la tête. Il rentre de l'école, et après, je ne le vois plus.

Elle ouvrit un tiroir et soupira :

-Visiblement, il a trouvé la cachette du lance-pierres... Je l'avais pourtant bien prévenu que vous arriviez aujourd'hui.

-Bah, il y a peu de chances qu'il se rappelle de nous. Il n'avait que deux ans, à l'époque...

-Je lui avais dit qu'un enfant de son âge arrivait. Mais c'est vrai que tu es bien différent de lui, fit-elle en regardant Paolo.

-Paolo aussi doit aller à l'école ?

-Oui, il devra y aller. Mais ne t'attend pas à des miracles. Andrea sait à peine lire. Remarque, Paolo sait déjà lire, non ? Alors, cela l'aidera peut-être.

L'enfant resserra contre lui le livre qu'il tenait dans ses bras. Il comprenait que cela le distinguait des autres.

-Bon, nous devions visiter Paris, n'est-ce pas ?

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