Mais alors que je ne m’attendais plus à rien par rapport au cadeau que je lui avais demandé, je le vis un jour rentrer dans ma chambre avec du matériel étrange, que je n’avais jamais vu auparavant.
« Béryl, prépare toi ! Tu vas développer tes propres photos !
– Quoi ?! »
Je me levais brusquement de mon lit, alors qu’il riait en installant par terre tout ce avec quoi il était arrivé.
« Je vais demander un chariot à des infirmières, elles m’ont dit qu’elles étaient d’accord pour m’aider au moindre problème ! Attends-moi. »
Il s’en alla sans attendre ma réponse, me laissant seule avec tous les objets étranges qu’il avait ramené. Je restai immobile à contempler sans oser toucher quoi que ce soit, jusqu’à ce que mon frère revienne.
« C’est bon ! On va tout mettre en place sur le chariot. Essaie d’accrocher ces ficelles quelque part ? Sans te faire mal, évidemment !
– Bien ! »
Heureuse de ne plus être désœuvrée, je tentais d’accrocher du mieux que je pouvais les fils que m’avait donné mon frère entre deux appareils médicaux. Une fois toute l’installation passée, il me donna toute sortes de vêtement étrange :
« Ordre des médecins ! Il faut que tu mettes tout ça.
– Comment ?
– Ah, attends… Je vais t’aider. »
Il commença à me mettre des lunettes étrange, ainsi que des gants, alors que je demandais :
« A quoi sert tout ça ?
– A te protéger des produits que l’on va utiliser. Il ne faut pas que tu aies le quelconque contact avec tout ce qu’on va manipuler !
– Et toi, non ? »
Il eut l’air gêné.
« Théoriquement, moi aussi, mais… Je risque moins que toi. »
Il esquiva mon regard, mais je n’insistai pas. Il reprit alors du poil de la bête.
« Alors… tu es prête ? »
Je hochais vigoureusement la tête. Nous commençâmes alors le développement de photo de soleil, dans l’obscurité rougie de la chambre sombre. Méthodiquement, il m’expliquait le principe, le fonctionnement, les étapes. Beaucoup de procédé me semblait incompréhensible, mais j’étais vraiment heureuse d’apprendre, et d’autant plus d’apprendre de mon frère. Il était concentré, efficace, imperturbable. Ma présence ne semblait pas le déranger, comme si j’avais été là à chaque développement qu’il avait pu faire. Je me sentis, à ses cotés, à ma place.
Je le vis et l’entendis maîtriser le temps comme personne. Armée de la montre-chronomètre de papa, il la faisait sonner à la seconde près, l’arrêtait avec une facilité déconcertante, comme s’il avait fait ça toute sa vie. Il me montra comment celle-ci fonctionnait, et bien que je comprenais intellectuellement le principe, je n’arrivais pas à toucher du doigt le fonctionnement du temps, ainsi je me fis toujours surprendre par ces sonneries incessantes et qui, bien que programmées précisément, me paraissait tout le temps aléatoire.
Tout particulièrement durant ce moment, le temps me sembla hors de ma portée. Je ne pouvais malgré tout jamais le mesurer et comprendre comment il s’écoulait. Durant ce moment magique, qui fut l’un des plus grands instants de bonheur de ma vie, tout me semblait aller aussi vite que lentement. Je ne pouvais que me concentrer sur l’instant présent, ne contrôlant plus ce que je pouvais dire, ne réfléchissant plus à ce que je devais être. Aïden et moi discutâmes durant des heures, sans s’arrêter, sans jamais un moment de silence gênant ne s’installe, et tout ceci ne semblait me durer que très peu de temps. Mais quand il parti, une journée s’était écoulée. L’infirmière aux cheveux noirs rentra dans la pièce :
« Excusez moi, mais l’heure des visites est bientôt terminée. »
Et prise d’une peur panique, à l’idée de briser d’un seul coup la sérénité que j’avais pu ressentir durant tout ce temps, je tentais pour la première fois de retenir Aïden.
– Oh non, mais on n’a pas fini !
– Ce n’est pas grave, je reviendrai demain matin et on fera le tirage. Si ça ne vous dérange pas, ajouta-t-il en direction de l’infirmière. »
Elle tenta de répondre, mais, paniquée à l’idée qu’elle puisse manipuler mon frère, je lui coupais énergiquement la parole.
– C’est génial ! On continue demain alors, je vais t’attendre ! A demain, Aïden ! »
Il m’adressa un sourire innocent avant de quitter avec l’infirmière la chambre sombre. Malgré tous mes efforts, le bonheur et la tranquillité était parti de mon cœur. Et cachée sous les couvertures froides et sombre, je ne pus m’empêcher de les pleurer. Pour la première fois depuis longtemps, je me pris à espérer que le temps passe plus vite en fermant les yeux.
Mais quand je les ouvris, ce ne fut pas mon frère mais l’infirmière vibrante d’une colère inexpliquée qui me fit face.
« Tu n’es qu’une sale petite peste ! »
Elle me prit par le col. Choquée, je restai immobile, à regarder son visage déformé par la rage avec mes yeux de poisson.
« Tu n’es qu’un poids mort pour tout le monde. Une cause perdue. Non seulement tu dilapides de l’argent rien que pour ta santé inutile, mais en plus tu détruits la vie de ton propre frère par pur égoïsme ! Ils feraient mieux de partir. Mieux, que tu disparaisses de leur vie ! »
Je ne répondis pas. L’obscurité sembla m’envelopper pour de bon, rendant tout ce qui était autour de moi plus terne que ce ne l’était déjà. Voyant que ses paroles ne me faisait pas réagir, elle lâcha mon col, pour s’accrocher à ma pierre jaune. Un sursaut d’effroi me traversa tout le corps.
« Arrêtez !
– Et pourquoi, hein ? Pourquoi mériterais-tu de posséder un tel bijou ! Moi aussi, j’en veux un ! »
Je tentais de reculer, mais elle maintenait son accroche. Je sentais avec horreur la chaîne se serrer sur ma nuque, jusqu’à ce qu’un petit craquement se fit entendre. Sous le choc, je tombais en arrière. La petit chaîne en métal avait fini après un temps d’horreur, par céder sous la pression. Paniquée, je serrai mes mains sur ma gorge, pendant que l’infirmière regardait de plus près la pierre précieuse avec un air de mépris.
« Tu parles d’une camelote ! Tes parents ont bien fait de te l’offrir. Elle ne vaut strictement rien. »
Et elle jeta ma pierre dans l’obscurité avant de s’en aller, sans un mot.
Mon frère avait laissé tout son matériel photo et dans tout ce matériel, se trouvait une petite lampe rouge. Avec la panique, je la rallumais aussitôt. Mais avec la lumière ne revint pas ces sentiments positifs que j’avais pu ressentir. N’existait en moi qu’une angoisse, un sentiment de solitude et de nudité, une panique féroce à l’idée de vivre désormais sans cette pierre, cette seule petite possession que j’avais, autour du cou. Je fouillai dans toute la chambre, partout où je pouvais ; mais la pierre était introuvable. Je refouillai aux mêmes endroits, une nouvelle fois. Puis, encore une nouvelle fois. Je savais qu’elle n’était pas loin, mais il m’était impossible de remettre la main dessus. Car dans l’obscurité, je n’avais pas pu voir où l’infirmière l’avait jetée. Et malgré une lumière rouge, plus forte que celle que je possédais habituellement, j’étais incapable de voir nettement le sol. Quand je compris que je ne pourrai jamais la retrouver seule, il était trop tard. J’avais atteint un point de non-retour. Je hurlais de toute mes forces, au bord de la convulsion, au sol.
Des infirmières arrivèrent immédiatement et me replacèrent dans mon lit. Je n’arrivais plus à m’exprimer correctement, mais en les voyant sortir les sangles, j’arrivai à articuler :
« Je ne veux pas ! Je ne veux pas être sanglée ! »
Et face à un air ahuri, je commençai à tétaniser le moindre muscle de mon corps en réponse. J’étais devenu un bâton immobile. Une infirmière s’approcha de moi :
« D’accord, Béryl. D’accord. Nous n’allons pas t’immobiliser. Mais parle moi ; qu’est-ce qu’il s’est passé ?
– Ma pierre ! Je n’ai plus ma pierre ! »
Surprise, l’infirmière regarda mon cou ; elle ne pu que constater que j’avais raison.
« Mais… Où est-elle, Béryl ?
– On… On me l’a arrachée ! »
Je tétanisais davantage. La lumière rouge semblait me brûler les yeux. Les infirmières, silencieuse, restèrent à se regarder sans comprendre.
« Mais… Mais qui ?
– Je n’ai plus ma pierre… Je n’ai plus ma pierre !
– D’accord ! D’accord, Béryl, calme toi. S’il te plaît, respire. Voilà, comme ça. Une grande inspiration… Et tout recrache tout, tu vides tout, tu te débarrasses de tout ! »
Je toussai. Il m’était difficile de respirer correctement dans un état pareil. Mais elle n’eut pas l’air de s’en formaliser.
« Voilà, c’est bien. Tu continues à souffler, nous allons retrouver ta pierre, d’accord ? On va la retrouver, ne t’inquiète pas. Elle n’est pas loin c’est ça ? »
J’eus un acquiescement intempestif.
« Alors allonge toi, et on reste là à chercher. Ne t’inquiète pas, d’accord ? »
Je sentis mon rythme cardiaque se calmer. Cette infirmière avait une voix douce, un visage rond et une peau sombre, qui me mettait en confiance. Elle posa la couverture sur moi, qui étais désormais incapable du moindre mouvement. Et en silence, je les regardai s’activer au sol, chercher ma pierre précieuse dans les moindres recoins.
« Tu n’as pas une idée d’où elle a pu tomber ? Demanda l’infirmière à la voix douce.
– Non… Je suis désolée.
– Tu n’as pas à l’être. Explique moi ce qu’il s’est passé. »
Alors je racontais. D’une voix monocorde, j’expliquais toutes les interactions que j’avais pu avoir, tout ce qui avait pu mener jusqu’à cette explosion soudaine et incompréhensible. Personne ne me coupa, mais je sentis monter malgré tout une colère sourde parmi les infirmières.
Elles ne retrouvèrent pas plus ma pierre que moi, au final. Les unes après les autres, elles laissèrent tomber pour retourner à leurs occupations.
« On est désolée, Béryl, dit une infirmière. On va trouver une solution.
– Quelle solution ? Allumer la lumière ? »
Elles ne répondirent pas. Je me retrouvai seule. Ne pouvant plus supporter l’obscurité qui m’avait fait si mal, les mains sur ma gorge, serrant jusqu’à l’apnée, je restai avec la lumière rouge de mon frère allumée. J’avais presque envie que mes yeux brûlent. Je voulais oublier le noir, m’en détacher autant que possible, me noyer dans le rouge de la lampe que je fixai. A force de la regarder, mes yeux se fermèrent tout seul et je réussi enfin à m’endormir.
Quand mon frère revint, le lendemain, mon premier espoir fut qu’il remarque la disparition de ma pierre. Mais il n’en fut rien. Toujours perdu dans son monde et ses photos, il n’aperçus pas que mon cou était nu, marqué, pour la première fois de ma vie. J’avais pourtant laissé la lumière rouge allumée, espérant que le manque de reflets de ma pierre lui mettrait la puce à l’oreille.
« J’aime beaucoup cette lumière là, aussi ! Ça rend la pièce plus jolie, tu ne trouves pas ? »
Mon frère eut un air étrange. La lumière rougeâtre se reflétait mal sur ses yeux bleus. Mais il ne sembla toujours pas remarquer ce qui avait changé chez moi.
« Aïden, tu pourrais me la laisser, s’il te plaît ! Insistai-je.
– Quoi ? Mais…
– Allez, tu pourras bien t’en racheter une, non ? »
Il continua de me regarder et de regarder la lampe, sans comprendre. A vrai dire, même moi je ne me comprenais plus. J’étais désespérée.
« Ce n’était pas vraiment ce qui était prévu, fini-t-il par dire.
– Allez, comme cadeau d’anniversaire !
– Bon… D’accord…
– Génial, tu es parfait, Aïden ! »
Je vis, comme de l’extérieur, mon corps embrasser Aïden. Mais il me sembla être plus loin que jamais de lui. Il continua, perdu dans ses pensées.
« Le problème, c’est que j’en aurai besoin bientôt pour un tirage… Et que m’en racheter une aussi rapidement, ça va être compliqué…
– Mais l’infirmière m’a dit que cette lampe m’allait bien ! Insistai-je encore, au bord des larmes.
– D’accord, je soupirai. Je me débrouillerai.
– Sinon, tu n’auras qu’à développer ici ! Je peux cacher les produits, et…
– Tu es folle ? »
Choquée, je restai sans voix a le fixer. Son regard dériva droit vers le sol.
« Non, mais… Béryl, on peut développer si on a l’autorisation des médecins et que ça n’est pas dangereux pour toi, mais garder en cachette des produits toxiques et t’y laisser confrontée constamment sans aucune idée de quel impact ça pourrait avoir sur ta peau, je ne peux pas prendre cette responsabilité là, tu comprends ? »
Je restai silencieuse. Il me semblait impossible de lui parler à nouveau. Le rêve de retrouver la sérénité de la veille semblait disparaître de plus en plus, comme si un tel sentiment ne pouvait plus exister.
« Aussi bien ça ne me ferait rien, et les médecins refusent toujours quand ils ne savent pas…
– C’est normal, leur travail c’est de te préserver, et si il y a un risque inutile, ils préfèrent éviter. »
Je restai silencieuse. Je ne savais pas ce que j’aurais pu lui dire de plus. Il tenta de me sourire, se débarrassant du malaise d’un geste de la main.
« Allez, on oublie ça, on va passer au tirage des photos. Ça ne te plaît pas ?
– Si... »
Je n’étais plus à ses cotés. J’étais loin, très loin en arrière, dans une obscurité inexistantes. Mon frère regardait ses appareils photographique, soignant chaque détail, et j’avais été inaperçue, oubliée. Je n’arrivais plus à mon concentrer sur ce qu’il faisait, et encore moins apprécier ce qu’il se passait. J’étais invisible. Puis, mon regard s’accrocha à la montre que mon frère avait laissé sur le lit.
« Ton chronomètre va encore sonner ?
– Oui, pour prévenir du temps passé. La durée de traitement dans le révélateur est d’environ quatre-vingt-dix secondes, dans le bain d’arrêt environ une minute, et le fixateur environ sept minutes… Pourquoi ? »
J’entendis les battements de mon cœur exploser dans ma poitrine. J’avais peur de l’idée que je venais d’avoir.
« Je vais me consacrer à éteindre la sonnerie de ta montre et regarder les effets, alors.
– Tu es sûre ?
– Oui, ça va être plus drôle, de regarder.
– Tu sais, j’ai une pince, si tu veux, moi je peux y aller avec les doigts.
– Non, mais ne t’inquiète pas, j’essayerais après. Vas-y. »
Il ne me regarda même pas. Prenant d’une main tremblante la montre de mon frère, qu’il m’avait appris à utiliser la veille, je commençais lentement à dérégler l’heure qu’elle affichait.
J’aimerai justifier cet acte de façon rationnelle. De me souvenir véritablement à quoi je pensais en agissant ainsi. Je sais que les paroles de l’infirmière aux yeux noirs tournaient dans ma tête, mais je pense surtout que plus rien ne passait dans mon crâne. Quand je voyais l’heure reculer avec une facilité déconcertante, je n’arrivai qu’à peine à faire le lien avec une réalité tangible. Cet acte me semblait au final n’être qu’une fuite en avant, un suicide que je n’avais qu’à peine prémédité. Une fois mon crime effectué, le chronomètre déréglé, je retournais aux cotés de mon frère, voir les photos apparaître sur les papiers glacés. Il ne me sembla jamais aussi simple de faire semblant d’être heureuse. Mais je compris que mon frère n’était pas si aveugle quand il fini par me demander :
« Mais qu’est ce qui te prend, aujourd’hui ? Pourquoi tu insistes à ce point ? »
Surprise, je crus être démasquée, prise sur le fait. Mais il était véritablement interrogateur. Je répondis d’une voix sourde :
« Cela ne te regarde pas. »
Malgré tout, j’espérais qu’il insiste. Qu’il fasse l’effort d’essayer de m’atteindre. Mais ce ne fut pas le cas. Il resta silencieux, regardant l’heure sur sa montre chronomètre. Je ne pus retenir un frisson.
« Ah, il va falloir que je partes dans une petite heure, j’ai un cours important à midi que je ne veux surtout pas rater !
– Ah bon, tu vas faire quoi ?
– C’est la course, le jeudi midi. On va sur le terrain, on s’entraîne au sprint, au cent mètres, au deux cents mètres et au relai. Je ne suis pas très bon en relai, mais le reste est vraiment bien. »
Je le vis sourire innocemment. Il était encore aveugle. Mon frère n’avait rien remarqué, ni de mon geste, ni de ma détresse. Il continuait de me parler légèrement, comme si rien ne s’était passé. Comme s’il refusait de me voir. Et sachant parfaitement que la montre n’indiquait pas la bonne heure, je ne lui dis rien. Je n’étais plus capable, même en sachant que ça lui ferait du tort, d’avouer ce que j’avais fait.
Nous continuâmes à discuter, éclairés par la lampe rouge. Il ne s’étonna pas que je cherche pas à éteindre la lumière. Il me parlait de sport, de course, comme si je pouvais le comprendre. Puis, au bout d’un certain temps, une infirmière passa la porte de ma chambre et mon cœur manqua un bond. Cette infirmière avait les cheveux noirs.
« Que tu rates le lycée, passe encore, mais je ne vais pas vous fournir un repas pour tous les deux au frais de la maison. Tu n’es pas résident ici, quand même. »
Mon frère resta interdit alors que l’infirmière s’approchait de moi d’un pas brutal. Déjà, mon regard commença à le fuir.
« Mais enfin, bredouilla-t-il, c’est absurde, il est à peine dix heures…
– Tu plaisantes ? Il est midi passé. Il est temps de se réveiller, mon garçon. »
Les yeux de mon frère s’agitèrent. Il regarda sa montre, puis me fixa avec un regard incrédule. Il avait parfaitement compris ce qu’il venait de se passer.
« Je suis vraiment désolée… »
Ma voix ne fut qu’un murmure, qu’il n’entendit sans doute pas. Il récupéra ses affaires en première vitesse et sorti en courant, sans un mot. Jamais je n’avais vu mon frère courir aussi vite.
« Heureuse ?
– Comment ça ? »
L’infirmière claqua la langue d’exaspération.
« C’est la dernière fois que tu me vois. A cause de toi, j’ai été virée. Contente de toi ?
– Non. »
Ce n’était pas pour les raisons auxquelles elle pensait, mais eut l’air d’en retirer une certaine satisfaction.
« Et bien, adieu, gamine. En espérant qu’on ne se revoie pas.
– Adieu. »
Elle s’en alla d’un pas rapide. Je me retrouvais seule avec mes remords. J’éteignis la lumière. J’avais beau détester l’obscurité, elle était devenue la seule chose qui avait pouvoir l’air de m’accepter, dans laquelle je pouvais être vraiment moi. Malheureuse, mais entière.
On sent tellement la détresse de Béryl quand elle espère se faire voir par son frère... J'avoue que ça m'avait semblé moins profond, moins lourd du point de vue d'Aïden, je crois. Pas capricieux pour autant, mais pas aussi désespéré qu'on le sent ici. Les histoires se raccrochent l'une à l'autre avec beaucoup de subtilité :)
J'ai vraiment essayé d'imaginer ce que ça pouvait être d'avoir toujours été hors du temps. Je me dis que l'ennui vient du fait qu'on sait ce que ça fait de "faire quelque chose". Et en plus quand on a vraiment jamais aucun passage du temps visuel (aucune alternance jour/nuit, aucune horloge, aucune montre) , je pense que tout peut paraître très absurde. Pour nous le temps a du sens parce qu'on le voit passer, par les jours, les saisons, les différence de temps et même pas les emploi du temps, les activités... C'est quelque chose que Béryl n'a jamais eu et qui ne peut pas coller a ce qu'elle observe ! Ça rend tout ceci pas forcément évident à appréhender ^^
Et je trouve que ça justifie bien l'histoire parallèle aussi, ce que tu dis. On a bien plus l'impression d'accumulation et de désespoir qui se construit, plutôt qu'une explosion qui semble surgir de nulle part.