La cite phocéenne accueillit Martial sous son soleil légendaire.
Arrivé au volant d’une voiture de location avec seulement une valise et quelques cartons pour seuls bagages, il s’était directement rendu au Prado pour passer sa première nuit à l’hôtel. Il avait prévu de ramener son deux roues la semaine suivante et la page serait tournée.
Une nouvelle vie commence, pensa-t-il.
Il avait réservé une chambre pour deux nuits seulement, décidé à s’installer le plus simplement du monde dans un appartement du centre et commencer au plus vite son activité d’architecte dans cette nouvelle région.
Après une douche réparatrice, il se jeta sur le lit et sombra dans un sommeil profond. A son réveil, sa montre affichait déjà quinze heures.
« S’organiser et passer à l’action sans tarder » décida-t-il. Prenant son bloc note il inscrivit les tâches les plus urgentes à réaliser :
Premièrement : trouver un appartement meublé
Deuxièmement : trouver un bureau en ville
Et troisièmement: créer une nouvelle agence
« J’allais oublier » se dit-il en relevant les sourcils comme une évidence :
Quatrièmement : s’inscrire dans une salle de sport !
Un sandwich à la main, il parcourait déjà les rues du centre ville à la recherche de la première agence immobilière qui s’afficherait sur son Smartphone.
A peine avoir poussé la porte de l’agence, il fut accueilli par une femme des plus distinguée; la quarantaine, tailleur Farfetch, qui se présenta comme la responsable d’agence. Le charme de la jeune directrice, dans sa tenue plutôt femme fatale lui rappela subitement qu’il était célibataire depuis moins de trois jours.
A quarante huit ans, Martial avait conservé une allure plutôt branchée. Il n’avait pas encore pris du poids ayant évité la fameuse bouée, attribut habituel des hommes de son âge, ne portait pas encore de lunette de vue et n’était pas encore abonnés aux dégarnis anonymes.
Et côté vestimentaire, il se devait d’être toujours impeccable vis-à-vis de sa clientèle aisée. Bref, il n’avait pas le physique d’un Georges Clooney mais se dit qu’il arriverait peut être encore à séduire s’il le voulait vraiment.
Reprenant ses esprits, il exposa ses critères de sélection, appartement meublé d’environ 60 mètres carrés dans un quartier calme. Par chance, l’agence disposait de ce produit, disponible immédiatement à la location.
Moins d’un quart d’heure plus tard, il visitait ce F3 et se réjouissait du panorama imprenable depuis la terrasse. Avec vue sur la mer, sa nouvelle résidence jouxtait le Parc Valmer, espace luxuriant qui domine la corniche Kennedy.
Encore un endroit architectural hors normes qui se prêtait à l’admiration de Martial pour ce genre d’œuvre du siècle dernier. Au large, le château d’If, imposante et magnifique réalisation du règne de François 1er , semblait posé sur la houle. Mais c’est surtout la terrible prison du célèbre roman d’ Alexandre Dumas qui lui revenait en mémoire.
Affaire conclue.
Mais l’agence pouvait aussi lui faire visiter des bureaux d’affaires bien situés, près du vieux port, qui seraient libérés en fin d’après midi par leur occupant, un jeune expert comptable en phase de croissance.
L’agent immobilier avait garé son véhicule non loin du lieu de la visite ; ils avaient marché à travers le quartier empruntant la rue Neuve Sainte Catherine. Il se dit en lui-même que le nom de Catherine lui était finalement prédestiné pour ce qui était de ses recherches immobilières.
La visite fut concluante, les bureaux convenaient parfaitement à son activité. En rez-de-chaussée, visible et bien agencé, cet espace de travail serait opérationnel dès le lendemain. Il n’avait besoin que d’un bureau, un fauteuil, une chaise visiteur et une connexion internet.
L’agence immobilière proposait même ce service en option : meubler le bureau, voire s’occuper de la vitrophanie. Les choses prenaient une très bonne tournure pour Martial.
Mieux encore, la visite n’était pas encore terminée quand il aborda pour le saluer le jeune diplômé en comptabilité, la tête dans les cartons et des auréoles de sueurs sous les aisselles. Martial se voyait à son âge, à ses débuts, en pleine activité professionnelle, obliger de tout faire à son agence, les peintures, la déco et le ménage.
« Vous pourriez vous charger de la création de ma nouvelle affaire ? » le questionna-t-il timidement.
Le jeune expert releva la tête et esquissa un sourire. La situation ne se prêtait pas à faire une lettre de mission sur le champ mais il avait pour principe de ne jamais refuser un nouveau client.
« Bien entendu, je vous laisse ma carte si vous voulez, rappelez moi demain pour que nous fixions un rendez vous »
« Excellent » reprit son interlocuteur en se frottant les mains machinalement à la façon du négociant qui vient de réaliser la bonne affaire du jour
«Ce sera la société MMA, comme les assurances mais M.M.A qui signifie Martial Marseille Agency »
Les deux hommes se serrèrent la main. Martial prit congé de la belle professionnelle de l’immobilier, rendez vous pris pour les formalités administratives qu’ils règleraient dès le lendemain.
En une seule journée, il avait réussi à s’installer dans un appartement très agréable avec vue sur la grande bleue et avait tout préparé pour démarrer sa nouvelle activité.
Sa nouvelle vie commençait sous les meilleurs auspices.