Au chapitre précédent, Samira et Guillaume ont abattu toutes leurs cartes, mais aucun des étudiants interrogés ne peut devenir le petit ami de la sœur de Guillaume.
En sortant du bureau de Samira, Guillaume a une mine décrépite. Il prend l'ascenseur, jusqu'au rez-de-chaussée, et arrive dans le grand hall des Grands-moulins. Il s'approche du distributeur de canettes. Il fouille ses poches, sort de la monnaie pour commander un soda énergisant à bulles. Il introduit ses pièces dans la machine et compose le numéro de sa boisson.
— BAM
La canette tombe.
Il se baisse pour récupérer sa canette, en se relevant il tourne la tête et voit Émilie recroquevillée sur un banc en grillage jaune vif. Il lui fait un signe de main et s'approche d'elle :
— Alors, Émilie, qu'est-ce que tu fais là, ça ne va pas ?
— Moyen, je devrais être en cours, mais je me sentais pas bien...
— Tu veux pas qu'on sorte prendre l'air ?
— J'attends mon meilleur ami... bah tiens il arrive...
Une large silhouette aux vêtements clairs se rapproche d'eux. D'un blond platine étincelant, Valentin pose ses yeux bleus translucides sur Guillaume.
— Oh ! Vous êtes Guillaume, le frère de Solène, l'amie d'Émilie ? questionne Valentin dont le visage s'illumine.
— Ouep ! fait Guillaume, sans vraiment prêter attention à lui.
— Présentez-lui mes hommages, Monsieur Guillaume... dit Valentin avec un air solennel.
— Hm, et c'est la part de qui ? demande Guillaume, en levant un sourcil.
— Valentin DELALUNE... serviteur ! répond-il, en s'inclinant d'une manière ridicule.
Quelques pas plus loin, Guillaume ouvre sa canette et boit une gorgée.
***
Dans sa cage d'escalier, Guillaume monte les marches avec son casque de moto sous le bras. De la musique s'échappe de son appartement, il reconnaît la ritournelle de la guitare de Georges Brassens, et distingue distinctement les paroles :
Un bon petit diable à la fleur de l'âge,
La jambe légère et l'œil polisson,
Et la bouche pleine de joyeux ramages,
Allait à la chasse aux papillons...*
Guillaume tourne la clef dans la serrure de son appartement. En ouvrant la porte, Guillaume remarque que son appartement vient d'être redécoré avec des affiches de comédies romantiques célèbres, et que les coffrets DVD trônent dans ses étagères en lieu et place de ce qu'il y avait avant. Puis il voit Solène de dos en train de chanter, elle continue son couplet avant de se rendre compte de la présence de son frère.
...Comme il atteignait l'orée du village,
Filant sa quenouille, il vit Cendrillon,
Il lui dit : "Bonjour, que Dieu te ménage,
J' t'emmène à la chasse aux papillons*
*Georges Brassens, la chasse aux papillons.
Solène lui saute au cou :
— Tu devineras jamais ce qui m'arrive ??!
— Je suis bien content que tu aies abandonné tes prières en latin, mais je m'attends au pire... réplique Guillaume en grimaçant.
— Devine quand même, insiste-t-elle, en faisant la moue
— Euh, vous apprenez Brassens à la chorale ? hasarde Guillaume, sans conviction.
— C'est la chanson de ma future comédie musicale !!! rectifie Solène, rayonnante.
Devant la figure dubitative de Guillaume, Solène continue, extatique, les yeux emplis d'étoiles pétillantes :
— Il y a un concours de scénario, un appel à projet pour une exposition pour l'anniversaire de Brassens à la cité de la musique en 2011. Ils feront une projection de courts-métrages d'étudiants en cinéma, j'ai tout de suite imaginé une romance bucolique du jeune George Brassens dans le monde actuel, en 2010 ! anonne Solène, d'une traite, sans penser à respirer.
Solène devient écarlate et sort de son apnée puis reprend :
— ... sur le thème de la chasse aux papillons !!
— C'est original, je te connaissais pas de passion naturaliste et j'aurais cru que ça te dégoûtait de tuer des insectes... raille Guillaume.
— Très drôle, réplique Solène, vexée. T'es super fier de ta sœurette ! Vrai ou pas vrai ?
— Vrai, c'est une très bonne idée, petite sœur ! lâche finalement Guillaume en lui tapotant le haut du crâne.
— Oh, j'ai gardé le meilleur pour la fin, dit Solène, on va pouvoir regarder toutes les comédies romantiques classiques qui ont marqué l'histoire du cinéma pour s'en inspirer et faire le chef d'œuvre le plus romantique du grand écran.
— ON ?!
— Allez, sois chic... avance Solène en papillonnant des cils. J'ai besoin d'un homme sensible à mes côtés pour m'épauler, et je ne te savais pas si séducteur... j'ai découvert une facette de toi que j'ignorais quand j'ai rencontré certaines de tes étudiantes à l'université, t'as l'air d'avoir la cote, grand frère !
— OK, c'est bon, tu as gagné... je ferai ce que tu voudras, s'incline Guillaume en s'affalant dans le canapé recouvert de sa housse à fleurs.