Un matin de printemps

Prologue

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En 1938, Bruxelles baignait dans la lumière douce d’un printemps timide. Les rues pavées, légèrement humides, portaient les échos de pas discrets, et dans les jardins publics, l’air frais du matin caressait les visages. Le parc Leopold, avec ses arbres anciens et ses bancs de bois, semblait être un endroit hors du temps. Là, trois jeunes filles se retrouvaient presque chaque jour, dans un silence fait de gestes familiers et de sourires partagés.

 

Leurs rires, en échos à ceux d’autres enfants qui jouaient plus loin, se mêlaient au bruit doux des feuilles frémissant sous la brise. L’ambiance était calme, comme si la ville elle-même suspendait son souffle, savourant ces instants d’innocence.

 

Nim, toujours un peu à l’écart, observait les passants, ses yeux curieux cherchant à lire dans les visages des inconnus. Elle n’était pas du genre à se laisser distraire, mais aujourd’hui, elle semblait plus pensive. Anna, les cheveux attachés en un chignon négligé, avait plongé son regard dans l’horizon, peut-être perdue dans une pensée qui lui échappait. Tandis que Chloé, plus enjouée, jouait distraitement avec une mèche de cheveux, observant les nuages qui flottaient lentement dans le ciel.

 

Sans échanger un mot, elles sortirent leurs carnets, comme elles le faisaient souvent, dans ce même lieu. Nim ouvrit son carnet en premier, suivie de Chloé et Anna. Les plumes glissèrent sur les pages dans un silence quasi religieux. Les mots, chacun avec sa propre cadence, semblaient presque se dessiner d’eux-mêmes, nourris par un quotidien qui, bien que simple, était tout ce dont elles disposaient. Elle y notaient leurs émotions, ce qui les entourait, leurs peurs, leurs joies.

 

Ce rituel, qui leur avait été donné par le temps, était devenu leur secret. *Bouton d’or*, inscrite dans chaque carnet, était à la fois un symbole de refuge, mais aussi une manière de garder une trace de leur monde, de leurs pensées, de leurs rêves. Un moyen de se dire des choses qu’elles ne pouvaient pas toujours verbaliser, comme une promesse tacite de se retrouver, peu importe ce que l’avenir leur réserverait.

 

L’écriture était lente, presque méditative. Les pages se remplissaient avec des histoires simples – des journées passées à errer dans la ville, des conversations qui flottaient à peine, des espoirs qui se dessinaient sous la plume. Rien de lourd, rien de pressant. Juste des instants de partage.

 

Autour d’elles, le monde continuait de tourner, paisible. Quelques rares nuages traversaient le ciel bleu, mais la chaleur du soleil réchauffait l’air. 

Les filles étaient là, dans ce moment suspendu, à écrire sans savoir que chaque mot écrit marquait un instant particulier dans leur histoire. Elles n'avaient pas besoin de s’en rendre compte. Elles étaient ensemble, et pour un instant, tout semblait encore possible.

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Lealaparisienne
Posté le 23/02/2025
Il y a une latence extrêmement bien rendue dans ce texte.
Bien sur le contexte (la date, le lieu) y est pour beaucoup : mais cela crée seulement l'attente de quelque chose dont on sait par avant l'intervention prochaine.
Exploiter cette certitude funeste avec un texte qui sème autant de mélancolie que de quiétude malgré les nuages annoncés n'en est que plus intéressant.
Voilà un début qui m'intéresse et m'interpelle.
Plume_jasmin
Posté le 24/02/2025
Bonjour !
Je te remercie pour ton commentaire.
Ça fait plaisir de voir que ça vous plaît !
J'espère que la suite ne vous décevra pas.

À bientôt
Reglisse000
Posté le 07/02/2025
Très beau premier chapitre ! Hâte de voir comment cela va évoluer, mais ça promet une suite très intéressante ; Ton écriture est très belle et fluide à lire, j'adore !
Plume_jasmin
Posté le 08/02/2025
Merci pour ton commentaire !!
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