Chapitre 10 : Les chaînes du passé
Assise près du feu vacillant, Azaria serrait ses genoux contre sa poitrine. La lueur des flammes dansait sur son visage, projetant des ombres sur les parois de l’ancienne mine. Son regard, fixé sur les braises incandescentes, semblait perdu quelque part loin d’ici, dans un passé qu’elle n’avait jamais pu fuir.
Thalixia, assise à côté d’elle, attendit en silence. Depuis qu’elle avait libéré la fillette, elle l’avait vue sourire timidement, rire parfois, mais derrière ces moments de légèreté, il y avait autre chose. Une douleur sourde. Une peur jamais éteinte. Ce soir pourtant, Azaria semblait prête à en parler.
D’une voix basse, presque hésitante, elle commença :
"Je suis née derrière ces barreaux, tu sais... Ma mère était une ancienne, je ne l'ai jamais revue depuis qu'elle m'a mise elle-même en cage. Je ne me souviens même pas de la lumière du jour avant mes six ans."
Thalixia fronça les sourcils. Six ans. Une enfant aussi jeune, enfermée en cage comme un animal… La rage monta en elle, mais elle se força à rester calme. Azaria avait besoin d’en parler, pas d’une tempête d’émotions incontrôlée.
"Les anciens nous gardaient dans des chambres souterraines, loin des regards. Nous étions peu nombreux. Moi… et quelques autres. Les murs étaient froids, humides. Parfois, on nous laissait sortir, juste un instant, sous bonne garde. Mais c’était pour des tests. Toujours plus de tests."
Ses doigts tremblants effleurèrent le sol pierreux, comme si elle cherchait à s’ancrer dans le présent.
"Je ne comprenais pas pourquoi on nous gardait là, pas au début en tout cas. Mais un jour, j’ai entendu l’un des anciens parler. Il disait que nous étions ‘trop dangereux pour être libres, trop précieux pour être détruits’."
Un rire amer lui échappa, contrastant violemment avec son regard brillant de larmes contenues.
Thalixia sentit son cœur se serrer. Elle connaissait la cruauté des anciens, mais jamais elle n’avait imaginé cela.
"Et quels sont tes pouvoirs ?" demanda-t-elle doucement.
Azaria prit une inspiration tremblante avant de lever la main. Une fine brume bleutée s’éleva du creux de sa paume. Elle se condensa lentement, prenant la forme d’un papillon translucide qui battit des ailes avant de se dissiper dans l’air.
"Je contrôle la brume… l’illusion."
Thalixia observa, fascinée.
"Je peux me fondre dans le brouillard, me rendre invisible aux yeux de ceux qui me cherchent. Ou… je peux leur faire voir ce que je veux qu’ils voient."
Elle fit une pause, baissant légèrement la tête.
"C’est pour ça qu’ils avaient peur de moi. Quand j’étais petite, je ne contrôlais pas bien mes dons. Parfois, sans le vouloir, je faisais disparaître mon corps entier, ou je faisais apparaître des monstres aux yeux de mes geôliers. Ils disaient que j’étais une anomalie…"
Elle marqua un silence, comme si ce mot la hantait encore.
Thalixia tendit la main et serra doucement la sienne.
"Tu n’es pas une anomalie, Azaria. Tu es un miracle qu’ils n’ont jamais mérité de posséder."
Azaria releva les yeux, et pour la première fois, une lueur d’espoir y brillait.
Azaria était restée silencieuse après avoir raconté son passé, fixant les braises rougeoyantes du feu de camp. Thalixia sentit qu’elle devait parler à son tour. Si elle voulait que Azaria lui fasse confiance, elle devait lui offrir la même vérité en retour.
Elle inspira profondément et laissa son regard se perdre dans l’obscurité de la mine.
"Mon histoire n’est pas si différente de la tienne, finalement…"
Azaria tourna la tête vers elle, attentive.
"Je suis née dans un village, parmi les miens. Mais je n’ai jamais vraiment appartenu à leur monde. Mon père, Kael, savait ce que j’étais. Il m’a protégée du mieux qu’il a pu après la mort de ma mère. Il m’a appris à cacher mon feu, à ne jamais montrer ma véritable nature."
Elle fit glisser doucement ses doigts sur son poignet, là où le bracelet de pierres rouges scintillait à la lueur des flammes.
"Mais il ne pouvait pas tout me cacher. Je savais qu’il avait peur. Peur que quelqu’un découvre la vérité. Peur des anciens. Peur de ce qui m’attendait si on me découvrait."
Son souffle se fit plus court. Elle serra les poings, sentant la chaleur familière naître au creux de ses paumes.
"Et puis… ils ont tout compris."
Elle ferma les yeux un instant, revoyant la scène comme si elle se déroulait à nouveau devant elle.
"Ils sont venus en pleine nuit. Ils ont arraché mon père à notre maison. Ils disaient qu’il avait trahi le village, qu’il cachait une anomalie chez lui."
Azaria tressaillit légèrement à ce mot. Thalixia le remarqua, mais continua.
"Je l’ai vu tomber devant moi. Son regard… il m’a cherchée jusqu’au dernier instant. Et moi, j’étais figée. Je n’ai rien pu faire. Rien, sauf regarder son corps s’effondrer."
Sa voix se brisa, et le silence s’installa entre elles.
"C’est ce jour-là que j’ai compris. J’ai compris que si je restais, je finirais comme lui. Ou pire. Alors je suis partie pour honorer sa mémoire."
Azaria la fixa, ses grands yeux remplis d’émotion.
"Mais je ne suis pas partie pour fuir. Pas vraiment. Je suis partie parce que je ne voulais plus être une ombre. Parce que je voulais me battre contre eux."
Elle riva son regard doré dans celui de Azaria.
"Et aujourd’hui, je sais que je n’étais pas seule. Il y en a d’autres. Toi, et tous ceux qu’ils ont enfermés. Je vais les libérer. Je vais détruire ce système corrompu. Peu importe ce qu’il m’en coûtera."
Le silence retomba, cette fois chargé d’une promesse.
Azaria fixa les flammes un instant, puis hocha lentement la tête.
"Je veux me battre avec toi."
Un léger sourire étira les lèvres de Thalixia. Elle passa doucement sa main dans les cheveux de Azaria, comme une grande sœur protégeant sa cadette.
"Alors on le fera ensemble."
Le feu crépita entre elles, mais cette nuit-là, ce ne furent pas seulement les flammes qui réchauffèrent leur cœur. C’était la naissance d’un lien indestructible.
étonnante découverte, j'ai rarement lu un texte aussi fluide. En tout cas, c'est bien peaufiné, ç.
J'ai juste eu quelques difficultés à me repérer dans l'espace, ou me représenter l'âge des personnages, mais c'est anecdotique.
La suite:
Le grand ancien Malagar! Sur le coup, j'ai eu du mal à le prendre au sérieux, car je lisais malabar dans ma tête, et l'imaginais avec la peau toute rose bonbon.
Mais il y autre chose de troublants, parfois j'ai l'impression d'avoir une amnésie, de relire la même chose, ou bien c'est une volonté de réappuyer certaines scènes.
Dans le chapitre 3, Eron enfant tombe façe à un cadavre d'anomalie, Garrick lui ment et détourne son attention.
Dans le chapitre 4, Eron ados tombe façe à un cadavre d'anomalie, Garrick ne dit rien, on rentre à la maison!
Dans le chapitre 6, Azaria explique son pouvoirs à Thalixia: des écailles dorées et une voix draconique.
Dans le chapitre 10, Thalixia demande à Azaria ses pouvoirs: juste une brume bleuté illusoire.
Il y a aussi les transitions entre la forêt, les montages et les mines qui ne sont pas très clair, j'ai l'impression qu'à tout moment nos protagonistes peuvent se croiser. Ça rajoute en tension, mais je trouve toujours ça un peu comique.
Dans la forêt, tu tournes à gauche, et paf le braconnier, il fuit et tourne à droite, pouf il a disparu.
Enfin, dans l'ensemble j'ai passé un bon moment et hâte de voir la suite.