Chapitre 12 : La ville oubliée

Chapitre 12 : La ville oubliée

 

Le vent soufflait fort sur les terres rocailleuses, soulevant des volutes de poussière dorée sous un ciel de cendres. L’air était sec, chargé d’une odeur de terre brûlée et de pierre chauffée par le soleil du jour. Thalixia et Azaria avançaient à travers ce paysage désolé, leurs pas crissant sur les pierres et les herbes sèches. Le monde autour d’elles semblait figé, sans le moindre signe de vie, hormis quelques buissons tordus par le vent et des ombres incertaines qui s’étiraient sur le sol inégal.

Elles avaient fui la mine, échappé aux griffes des braconniers, mais désormais, une question les hantait : où aller ?

Depuis des heures, elles marchaient sans but précis, le regard perdu dans l’immensité de cette terre aride. L’horizon ne leur offrait que désolation et solitude. Nulle route, nulle trace de vie ou de civilisation. Juste la nature brute et impitoyable, un désert de roches et de vallées abîmées par le temps.

Azaria tituba légèrement, son souffle court.

— On ne peut pas continuer comme ça… souffla-t-elle en serrant sa cape contre elle.

Sa voix était faible, marquée par la fatigue. Elle tremblait aussi, légèrement, non seulement à cause du froid mordant qui s’installait avec la tombée de la nuit, mais aussi à cause du poids de la peur et de l’incertitude.

Thalixia s’arrêta, posant un regard inquiet sur la fillette. Azaria était encore jeune. Trop jeune pour être livrée à un tel monde. Elle avait passé des années enfermée, privée de lumière, privée de liberté. Maintenant qu’elle était enfin libre, elle se retrouvait perdue dans un monde qu’elle connaissait peu, voire pas du tout.

— On va trouver un endroit où se reposer, promit Thalixia.

Mais au fond d’elle, elle n’en était pas si sûre. L’obscurité commençait à engloutir le paysage, et l’idée de passer la nuit à découvert dans un territoire inconnu lui déplaisait.

Soudain, un bruit se fit entendre.

Un léger froissement dans l’air, presque imperceptible.

Thalixia se raidit immédiatement, portant instinctivement la main à son pendentif. Azaria, sentant le danger, se tassa derrière elle, son souffle se faisant plus discret.

— Quelqu’un nous suit… murmura-t-elle.

Les muscles de Thalixia se tendirent. Elle plissa les yeux, scrutant les ombres mouvantes des rochers alentour. Rien. Pourtant, son instinct lui soufflait qu’elles n’étaient pas seules.

— Montrez-vous ! lança-t-elle d’une voix forte.

Un silence pesant s’installa. Puis, lentement, une silhouette émergea de l’obscurité.

C’était un homme âgé, enveloppé dans une longue cape couleur cendre. Ses cheveux argentés encadraient un visage marqué par les années, buriné par les épreuves et les secrets. Ses yeux pâles brillaient d’une intelligence troublante, perçante. Il ne portait pas d’arme visible, mais une aura étrange flottait autour de lui, comme un vestige d’un pouvoir oublié.

Thalixia ne relâcha pas sa garde, son regard acéré ne quittant pas l’homme.

— Vous êtes bien les filles que je cherchais, dit-il d’une voix calme, presque sereine.

Azaria écarquilla les yeux.

— Un ancien… ? souffla-t-elle, la panique dans la voix.

Elle recula, le sang glacé par la terreur.

Thalixia, elle, raffermit sa posture, prête à attaquer au moindre signe d’hostilité.

L’homme leva une main apaisante.

— Je n’ai pas l’intention de vous faire du mal. Au contraire, je veux vous guider.

— Pourquoi ? demanda sèchement Thalixia, méfiante.

L’ancien les observa en silence, comme s’il pesait ses mots, comme s’il décidait de ce qu’il pouvait leur dire… et de ce qu’il devait encore taire.

— Parce que vous êtes perdues. Parce que votre combat vous mènera à une vérité enfouie depuis longtemps.

D’un geste lent, il sortit de sa ceinture un objet recouvert de tissu. Il le déplia délicatement, révélant un parchemin ancien aux bords effilochés, marqué par le temps.

— Avez-vous déjà entendu parler de Varendor ?

Les deux filles échangèrent un regard. Le nom leur était inconnu.

L’ancien hocha lentement la tête.

— Varendor était autrefois la plus grande cité du savoir. On l’appelait la ville-bibliothèque. Elle renfermait les archives du monde ancien, les secrets oubliés des peuples d’avant.

Il déroula davantage le parchemin, dévoilant des croquis de bâtiments majestueux : des tours surmontées de dômes, des allées bordées de statues, et, en son cœur, une immense bibliothèque aux murs gravés de symboles anciens.

— Mais elle a été oubliée. Effacée des mémoires par ceux qui craignent le savoir. Aujourd’hui, il ne reste que des ruines, cachées au cœur du désert d’Arren. Pourtant… certaines choses subsistent encore là-bas. Des réponses. Des vérités interdites.

Thalixia sentit son cœur s’accélérer.

— Et pourquoi nous parler de cette ville ?

L’ancien replia le parchemin et la fixa d’un regard perçant.

— Parce que c’est là que vous devez aller.

Azaria hésita.

— Pourquoi ? demanda-t-elle d’une voix tremblante.

L’homme la considéra un instant avant de répondre :

— Parce que c’est là-bas que vous trouverez ce que vous cherchez.

Un silence s’installa entre eux.

Thalixia sentit un frisson lui parcourir l’échine. Elle n’était pas certaine de ce qu’elle cherchait, mais une chose était sûre : cet homme disait la vérité.

Elle croisa le regard d’Azaria. La fillette semblait indécise, inquiète, mais au fond de ses yeux brillait une étincelle de curiosité.

Puis Thalixia se tourna vers l’ancien.

— Montrez-nous le chemin.

L’homme esquissa un sourire énigmatique.

— Alors préparez-vous. Varendor est loin… et la route sera périlleuse.

Et ainsi, leur voyage vers la ville oubliée commença.

 

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