Chapitre 3

Zia retint son souffle alors que le Prince Kaelen avançait, sa démarche à la fois majestueuse et terrifiante. Bien qu'elle n'eût jamais croisé le regard d'un membre de la noblesse, elle savait exactement qui il était. Les récits de sa puissance et de sa beauté se propageaient dans le désert comme un souffle brûlant et tous parlaient de ses talents en magie. Mais le prince, aussi captivant qu'il fût, portait en lui le stigma du vilain petit canard de la famille royale. Né dans l'ombre de son frère jumeau, il avait été délaissé par sa propre lignée, condamné à l'oubli. Puis, un jour, il avait disparu, laissant place à des rumeurs dont la plus connue et populaire : celle de sa mort orchestrée par sa propre famille.

Zia se remémora cette période de terreur, les jours sombres où les Terres des sables avaient perdu leur jeune souverain. Les habitants de Taniar, acculés par la peur, racontaient les horreurs d’un massacre à la capitale. Le prince exilé, dont le nom avait été effacé de la mémoire de tous, était réapparu, le cœur noirci par la vengeance. Dans un acte de cruauté inimaginable, il avait tué son frère jumeau de sang froid, traînant sa dépouille dans les rues, avant de lancer sa tête sur le visage de leur père. Les rumeurs disaient même qu'il avait dévoré le cœur de son frère, cherchant à s'approprier son pouvoir. Un frisson d'angoisse et de fascination l'envahit alors qu'elle réalisait qu'elle se tenait en présence d'un homme dont le simple nom pouvait faire trembler les cœurs.

Les gardes se dispersèrent autour de lui, établissant un périmètre de sécurité, tandis que Zia restait immobile, son cœur battant à tout rompre. Elle savait qu’elle devait se cacher, mais la curiosité la tiraillait. Pourquoi le prince se trouvait-il ici, loin des cités ? Que cherchait-il dans ce désert aride ? L'angoisse s'intensifia lorsqu'elle pensa que la découverte de Taniar pouvait être imminente.

Taniar, une oasis pour les voleurs, avait été révélée par des brigands. Ils avaient découvert qu'une partie du désert était protégée par une magie mystérieuse, la rendant invisible aux regards extérieurs. Ce qui avait commencé comme un refuge pour les butins était vite devenu le berceau d'une ville où les criminels avaient prospéré.

Soudain, un homme à la stature imposante, s’avança et s’agenouilla devant le prince. « Majesté, nous avons ressenti une sorte de champ de force un peu plus au sud. Cela nous empêche d’avancer. »

L'estomac de Zia se noua. Ils parlaient de la magie qui protégeait Taniar. Sa curiosité devait céder le pas à son instinct de survie. Si Kaelen cherchait la ville, alors Taniar était en grand danger. Si c'était un autre qui découvrait leur cachette, les habitants seraient simplement envoyés en prison. Mais face au prince, qui avait tué son propre frère, pouvait-elle espérer une once de pitié ? Elle devait fuir, retrouver Kamel et prévenir les autres avant que le prince ne décide d’explorer les dunes à la recherche de l’entrée de la ville.

Zia commença à ramper lentement dans le sable, mais alors qu'elle se retournait pour s’éloigner, le prince tourna brusquement la tête dans sa direction. Leurs regards se croisèrent, et Zia sentit un choc, comme si l’air autour d’eux s’était figé. Ses yeux bleus, perçants comme des flammes, traversaient l’ombre de son abri de sable, et elle pouvait presque sentir l’énergie sombre qui émanait de lui, pulsant dans l’air brûlant.

Kaelen plissa les yeux, puis, d’un geste de la main, il ordonna à ses gardes de se taire. Le silence tomba comme une couette épaisse, étouffant le bruit du vent. « Je sens une présence », murmura-t-il, sa voix grave résonnant comme un écho lugubre dans l’immensité du désert.