Chapitre 8

Par Mimi

 

-       Tu sais, j’ai toujours rêvé d’avoir mon petit coin à moi, dit Isabeau en entrant pour la seconde fois dans le cagibi.

C’était le mardi après la classe. Jimmy était encore parti plus tôt que prévu, les journées étant encore courtes et la nuit tombant tôt, pour tenir compagnie à sa trouillarde de sœur.

-       En fait, ce n’est pas vraiment mon coin rien qu’à moi, expliqua Bertille. C’était aussi l’endroit préféré de ma maman.

Ça ne lui faisait même pas mal à dire. En fait, c’était même l’endroit où elle se sentait le mieux pour le dire, parce que beaucoup de choses vivaient encore de la présence de sa mère.

-       C’est elle qui a installé tout ça.

-       Tous ces livres lui appartenaient ?

-       Non, dit Bertille en rougissant. J’en ai ramené pas mal de la bibliothèque… marmonna-t-elle.

-       J’imagine que ça ne plaît pas beaucoup à ton père.

Isabeau lui montra le livre qu’elle venait de pêcher sur une étagère, et qui portait l’étiquette de la bibliothèque de l’école.

-       Ça le met très souvent en colère, reconnut Bertille.

-       Du coup, il t’achète plus de livres ?

-       Non, il est persuadé que je fais ça pour embêter Valérie, la dame de la bibliothèque. C’est vrai que je ne l’aime pas beaucoup, mais c’est surtout parce que je les emprunte et j’oublie souvent de les remettre.

-       Elle ne te les a jamais demandés ? s’étonna Isabeau.

-       Je vais les chercher en cachette, le soir, quand elle est partie. On peut y aller, si tu veux.

Isabeau refusa. Bertille se dit qu’elle était peut-être un peu trop sage pour faire ce genre de choses - pourtant, elle s’était toujours demandé si on pouvait reprocher à une fille de son âge de trop lire.

Bertille avait confiance en Isabeau. Malgré tout ce qu’elle lui avait avoué, tout ce qu’elle lui avait montré, Isabeau n’avait rien révélé à personne. Bertille se sentait mieux dans la cour de récréation. Personne n’osait venir l’embêter maintenant qu’elle avait Isabeau avec elle.

-       Dommage que Jimmy ne soit pas resté, dit rêveusement sa nouvelle amie. J’aurais bien aimé lui poser plus de questions sur ce soi-disant fantôme.

-       Tu ne l’as pas vu pendant la classe ?

-       Il est tout au fond, et comme il est avec ses copains et que je ne le connais pas…

Bertille acquiesça. Elle-même n’avait fait que croiser Jimmy, parti juste avant que son père ne vienne lui dire qu’Isabeau resterait tous les soirs après la sortie des classes. Bertille n’avait même pas pris la peine de cacher son enthousiasme. M. Fauripré avait seulement réussi à obtenir que les deux filles fassent leurs devoirs dans la cuisine en attendant la tante d’Isabeau, ce qu’elles s’étaient empressées de faire avant de se précipiter dans le cagibi.

-       Qu’est-ce que c’est ? demanda soudain Isabeau.

Elle désignait une boîte en fer blanc peinte de toutes les couleurs et fermée par un cadenas. Bertille déglutit. Elle aurait préféré qu’Isabeau ne pose pas la question.

-       Avant, il y avait des bonbons à l’intérieur. On en mangeait lorsque ma mère m’apprenait à lire. Elle est fermée à clé depuis que Maman… je ne sais pas où est la clé du cadenas. Je ne sais même pas ce qu’elle contient maintenant ou pourquoi elle est fermée à clé.

Isabeau secoua légèrement la boîte. Un léger bruit de froissement de papier en sortit, mais Bertille ne reconnut pas ce qui pouvait se déplacer dans la boîte.

-       Tu devrais demander à ton père, suggéra Isabeau en reposant la boîte.

Isabeau n’était visiblement pas convaincue par l’explication. Bertille n’avait pourtant rien à cacher là-dedans. Elle avait même presque oublié l’existence de cette boîte et de son contenu, persuadée que seuls les papiers d’emballage avaient survécu à sa mère.

-       Il n’aime pas beaucoup parler de Maman, même quand je lui dis qu’elle me manque, expliqua-t-elle finalement, comme si l’absence d’intérêt du contenu de la boîte nécessitait une telle explication.

Bertille baissa la tête. Elle ne voulait pas perdre ses moyens devant Isabeau.

- Tu voudras bien me présenter Jimmy un de ces jours ? demanda cette dernière, voyant bien que Bertille préférait changer de sujet. J’aimerais bien lui demander deux ou trois trucs…
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Fannie
Posté le 18/02/2020
En fait, j’ai lu le chapitre suivant avant celui-ci. Je viens de m’en rendre compte.
On voit que ce qui concerne la mère de Bertille est encore un sujet douloureux. Mais j’aime bien la sensibilité de tes protagonistes, par exemple celle d’Isabeau qui change de sujet au moment opportun, comme celle de Bertille qui promet d’avertir l’ancien concierge si elle voit son chat. (C’est vrai, j’anticipe…) Moi aussi, j’aimerais bien savoir ce qu’il y a dans la boîte en fer-blanc.  ;-)
Coquilles et remarques :
— Ça ne lui faisait même pas mal à dire. [La formulation est étrange ; je propose : « Ça ne lui faisait même pas mal de le dire ».
— c’était même l’endroit où elle se sentait le mieux pour le dire [Comme il y a déjà « dire » dans la phrase précédente, je propose « pour en parler ».]
— J’aurais bien aimé lui poser plus de questions sur ce soi-disant fantôme [Une fillette peut bien s’exprimer comme ça, mais « ce prétendu fantôme » serait préférable ; « soi-disant » signifie « qui se dit, qui prétend être ».]
— Elle désignait une boîte en fer blanc peinte [en fer-blanc]
— Je ne sais même pas ce qu’elle contient maintenant ou pourquoi elle est fermée à clé [ni pourquoi]
Mimi
Posté le 05/03/2020
Je suis une boule d'émotions donc probablement que j'ai mis un peu de moi dans les personnages hihi !
Merci !
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