Jour 54 : Silence

Vendredi 8 mai 2020, 21h / Cela fait deux semaines que je ne me suis plus exprimé ici. Ce journal est sorti de mon esprit, d'autres préoccupations sont venues me tarauder. Il faut le dire aussi, l'inspiration manquait, je ne savais plus quoi écrire ni sur quoi réfléchir. Mon esprit s'est figé autant que le mouvement de mon corps s'est arrêté : à force d'immobilité, l'esprit s'englue, lui aussi, dans le confort des journées trop tranquilles. Ce déséquilibre n'est pas sain. Il a quelque chose d'agréable mais il n'est pas souhaitable, je le sais. Je sais aussi qu'un retour au mouvement pourra se faire à partir de lundi. C'est peut-être cette perspective qui me permet de sortir de ce quasi sommeil éditorial.

Je me dis qu'il faudra un jour mettre un point final à ce journal. 

Je ne crois pas que lundi soit le jour approprié pour faire cela. Ce serait se bercer de l'illusion que nous en avons terminé avec cette épidémie. Les contraintes sont toujours là, plus souples qu'auparavant mais elles pèsent toujours comme autant anomalies dans nos libertés. Tout ceci s'arrêtera quand les chercheurs trouveront un vaccin ou un traitement contre la maladie. Cela devrait être possible d'ici un ou deux ans. En attendant, nous devrons vivre avec. Le silence dans lequel était plongé le pays depuis deux mois sera légèrement brisé : nous réentendrons quelques voitures rouler, les routes nous offriront des échappatoires concrètes et nous quitterons nos téléphones portables pour retrouver nos proches, enfin !

En attendant, je me concentre sur ces derniers jours de confinement strict. Le climat était doux, je n'ai jamais autant entendu les oiseaux chanter, j'ai lu plus que d'habitude, et j'ai pris le temps de partager ces lectures. J'ai fait le choix de ne retenir que les moments agréables, cela aide à générer de la gratitude, envers Charlotte avec qui j'ai vécu ces deux mois, envers la vie en général et l'expérience qu'elle nous a imposé : un dialogue muet avec le silence. Dans cette conversation, il convient surtout de ne rien forcer. Sinon, l'harmonie déjà en place se retrouve perturbée inutilement. Lundi, il ne s'agira plus d'interroger le silence mais de capter la musique d'une société en réveil. La tâche sera délicate car il s'agira de raconter la nécessaire recherche des nouveaux équilibres à construire.

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Debout la Nuit
Posté le 01/06/2021
C'est bien le choix que tu as fait "de ne retenir que les moments agréables". Bonne stratégie, malgré les sentiments contradictoires qui nous assaillent.
Souvent, la colère envers nos dirigeants, scientifiques, le virus lui-même, oblitere notre jugement. Mais, comme ce fut magique de revoir les êtres aimés !
Imre Décéka
Posté le 09/07/2021
Merci pour ton commentaire.
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