Sur l’avenue des écureuils, Monsieur Guénette rafistole son enseigne pour la centième fois. Les cordes qui la suspendent finissent toujours par s’user. J’entends sa femme qui fatigue.
- Pourquoi tu demandes pas d’la broche à Bertrand ?
- C’est correct, ça m’bâdre pas de réparer.
- Me semble que ça irait mieux avec la broche du voisin.
- J’ai pas besoin de mieux.
L’établi de Monsieur Guénette est installé dans sa cabane, il restaure toutes sortes de babioles pour les résidents de la pointe. Pourtant, tout tombe en ruine chez le ramancheux. Son épouse s’en attriste un peu plus chaque jour, sa vie s’enlise avec sa roulotte sur ses fondations illusoires. La nuit, elle ne cesse de se plaindre d’avoir froid, une des fenêtres est brisée, placardée depuis une dizaine d’années. Et lorsqu’il pleut, l’eau s’infiltre et vient pourrir le prélart. Mais son mari, pareil à ses voisins, se contente d’une vie sans éclat. Pourquoi rêver de mieux quand il en a toujours été ainsi.
Je ne m’éternise jamais au village. Mes visites, je ne les prolonge pas. Les rumeurs, la mauvaise foi et les blagues salasses me portent à m’ennuyer de la forêt. De toute façon, j’adore ma vie de solitaire, je me suis toujours sentie libre ainsi. Je me sens femme avec ma sauvagerie et le paysage en osmose. Je m’approvisionne au drugstore, emprunte un livre à l’ancêtre qui bougonne et je file dans ma chaloupe. Je ne traîne pas. Enfin peut-être un peu, je pourrais t’apercevoir. Mon vendeur d’objets trouvés, mon kick secret. Francis, discret dénicheur de trésors.